Michael P. Farkas, président de la Table ronde du Mois de l’histoire des Noir.e.s (Image tirée de la page Facebook du Mois de l’histoire des Noir.e.s/Napoleon Communications)

UN CAFÉ AVEC… MICHAEL P. FARKAS

Michael P. Farkas préside la Table ronde du Mois de l’histoire des Noir.e.s, une organisation à but non lucratif, depuis 2009. Très impliqué, il représente une figure importante de la communauté de descendance noire à Montréal et au-delà. EST MÉDIA Montréal l’a rencontré dans le cadre de la 34e édition du Mois de l’histoire des Noir.e.s qui se tiendra en février 2025. Nous en avons profité pour parler avec lui des origines de cette célébration devenue « incontournable » et de ses coups de coeur dans la programmation de cette année.

EST MÉDIA Montréal (EMM) : Pourriez-vous d’abord vous présenter?

Michael P. Farkas (MPF) : Je suis Michael P. Farkas, je suis directeur de maisons de jeunes dans le quartier Petite-Bourgogne et je suis coordonnateur d’un projet pour les arts de la scène destiné aux enfants de 5 à 14 ans. Je suis médiateur urbain aussi depuis de nombreuses années. Et depuis 2009, je suis également président de la Table ronde du Mois de l’histoire des Noir.e.s.

EMM : Quelle est la mission de cette organisation?

MPF : Notre mission est de faire de la promotion, de l’éducation et de la sensibilisation sur le parcours historique des Noirs venant de partout dans le monde et qui ont atterri ici, au Québec, à Montréal et à travers le Canada aussi. C’est de démontrer aux gens qu’il y a une histoire qui fait partie de la grande histoire de tout le monde à laquelle les Noirs aussi ont pu contribuer de façon importante.

EMM : Et pourquoi le mois de février?

MPF : Il y en a qui disent que février, c’est le mois le plus froid. Mais la résilience, c’est un caractère que souvent les gens considèrent que les Noirs ont. Aussi, on fait ça en février entre autres parce que Frederick Douglass, un des grands apôtres de l’abolition de l’esclavage, et Abraham Lincoln, le président américain qui a fait casser l’esclavage en promulguant l’émancipation des Noirs, sont nés en février. C’est donc au cours de ce mois qu’on a décidé de faire ça, ici et aux États-Unis.

EMM : Parlez-moi de l’édition de cette année et de sa thématique.

MPF : Cette année, le thème est « Tout ce que nous sommes ». Comme tout être humain, nous portons beaucoup de bagages culturels, familiaux… en plus de nous être battus pour survivre. Ça n’a pas toujours été facile. On sait que le parcours des Noirs, vu qu’il a été mal documenté, est souvent caché, marginalisé. On sait aujourd’hui que nous avons tous un riche héritage. Et c’est ce qu’on veut mettre de l’avant cette année en parlant de « Tout ce que nous sommes », tout ce que nous avons, tout ce que nous portons.

Michael P. Farkas, président de la Table ronde du Mois de l’histoire des Noir.e.s (Image tirée de la page Facebook du Mois de l’histoire des Noir.e.s)

EMM : Que retrouve-t-on dans la programmation de cette année que vous aimeriez particulièrement souligner?

MPF : Il y aura la collecte de sang à Côte-des-Neiges et dans la Petite-Bourgogne, comme on fait depuis 13-14 ans. C’est un incontournable. On croit que les personnes noires peuvent plus facilement donner du sang pour d’autres personnes noires. C’est notre approche et c’est une chose qui nous tient à cœur.

Il y aura du théâtre, de l’opéra, de la danse. Il y aura Échos lointains d’Afrique entre autres. Il y aura énormément de conférences et des ateliers pour les jeunes. Parfois, c’est plus des célébrations, parfois plus des commémorations. Il y a aussi la Journée Nelson Mandela.

Mes coups de cœur demeurent les ateliers de sensibilisation sur l’histoire des Noirs au Canada. J’en animerai un le 22 février, et un autre avec le Festival Fondu au Noir, tenu par la fondation Fabienne Colas. Il y aura une discussion avec une historienne qui s’appelle Dorothy Williams, et c’est moi qui vais l’interviewer le 8 février.

Il y aura des conférences avec le Musée McCord sur la situation des Noirs dans sa globalité, on touchera à plusieurs endroits pour savoir comment se portent les personnes de descendance noire dans le monde.

Je parle des choses qui me passent par la tête, mais il y en a plusieurs autres. J’invite donc tout le monde à aller voir sur le site toutes les activités que les membres de notre communauté proposent à tous les Montréalais, tous les Québécois, tous les Canadiens.

EMM : Si on retourne en arrière jusqu’à aujourd’hui, parlez-moi du parcours du Mois de l’histoire des Noir.e.s.

MPF : Le Mois de l’histoire des Noir.e.s, c’est d’abord une idée de Carter G. Woodson dans les années 1920 qui a alors instauré la Semaine de l’histoire des Noir.e.s. On lui doit une fière chandelle d’avoir parti ça en 1926 aux États-Unis. Et par la suite, je crois vers la fin des années 1970, le gouvernement américain a décidé d’instituer le Mois de l’histoire des Noir.e.s.

À Montréal, on a été un des premiers à fêter, à commémorer l’histoire des Noirs, dès 1992. Et c’est vraiment des gens de nos communautés qui ont fait du lobbying pour que la Ville commence à honorer les personnes noires et à parler de l’histoire des Noirs. Ensuite, en 1995, c’était au tour du fédéral, avec la sénatrice Jean Augustine qui a fait passer une motion pour que le Canada aussi décide de célébrer et de considérer le Mois de l’histoire des Noir.e.s en février. Et puis, beaucoup plus tard, le provincial a décidé, je pense en 2006, avec l’apport de plusieurs députés dont Yolande James, de reconnaitre le Mois de l’histoire des Noir.e.s comme un incontournable. C’était important que nos gouvernements le fassent.

Et la Table ronde du Mois de l’histoire des Noir.e.s existe depuis 1992, 1993, et a travaillé d’arrache-pied chaque année pour montrer les qualités et les parcours historiques des Noirs qui ont cheminé et contribué à l’éducation, entre autres, du Québec et du Canada.

EMM : En terminant, quelle est l’importance d’un tel événement pour le quartier de Montréal-Nord?

MPF : C’est très important que les gens en général deviennent plus connaisseurs du parcours des Noirs et qu’ils arrêtent de penser qu’on est débarqués il y a une semaine. Dans certains cas, on est là depuis 400-500 ans, comme pour moi.

Pour Montréal-Nord, qui est un bastion important de personnes de nos communautés, comme pour tout autre quartier, c’est extrêmement important. Ça contribue au sentiment de fierté, d’appartenance, pour les jeunes, pour les familles et pour ceux qui veulent y participer.

On est très heureux que les communautés de l’est participent et adorent en général le Mois de l’histoire des Noir.e.s. Il y a beaucoup d’activités qui viennent de l’est. On sait que la communauté haïtienne est extrêmement vivante là-bas et participe à beaucoup de projets sur l’histoire des Noirs. On sait que ce n’est pas facile par les années qui courent, mais il y a des leaders qui continuent à porter le flambeau. Ils voient à ce que les générations montantes aussi se reconnaissent dans ce mois et qu’elles puissent finalement continuer d’avoir cette fierté, cette dignité pour aller porter la bonne nouvelle et pour devenir des ambassadeurs.


Dans le cadre du Mois et en collaboration avec l’arrondissement de Montréal-Nord, Le Pôle invite le public à découvrir cinq personnalités issues des communautés noires et qui ont contribué à l’essor du quartier.

« Des portraits de ces personnalités réalisés par l’artiste Niti Marcelle Mueth seront exposés dans des lieux publics et des commerces de l’arrondissement afin de valoriser leur parcours. »

La 34e édition du Mois de l’histoire des Noir.e.s se déroulera tout au long du mois de février. Visitez le site Internet de l’événement ici pour parcourir la programmation.