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LE MODÈLE COOPÉRATIF POUR UNE MEILLEURE ACCESSIBILITÉ À LA PHYSIOTHÉRAPIE

Née en pleine pandémie et constituée en janvier 2021, PhysioCoop est une coopérative innovante qui mise sur une approche communautaire. Son objectif principal est de démocratiser l’accès à la physiothérapie, et depuis son lancement, la coop connaît une croissance qui a de quoi ravir ses fondateurs.

Petit retour en arrière. Nous sommes en octobre 2019, à la veille du déclenchement de la crise sanitaire. L’Association québécoise de la physiothérapie organise son premier Sommet de la physio, qui est l’occasion de mener une grande réflexion sur l’accès aux services de physiothérapie au Québec. En marge de l’événement, un livre blanc énonçant six actions nécessaires pour accroître l’offre de soins dans la province sera publié. « Dans ce livre, on suggérait aussi le recours à des initiatives externes au système de santé, donc au milieu privé, pour améliorer l’accessibilité aux soins. Si on veut que ça fonctionne et qu’on augmente l’offre, il faut des initiatives nouvelles, car le réseau public n’y arrivera pas à court terme », explique Martin Gagnon, un des membres fondateurs et chargé de projet de PhysioCoop.

Martin Gagnon, membre fondateur et chargé de projets de PhysioCoop (Courtoisie)

Alors que la pandémie bat son plein et que leurs activités professionnelles tournent au ralenti, Martin Gagnon et sa collègue Corinne Lalonde, physiothérapeute dans le quartier Rosemont, entament une réflexion qui va mener à la mise sur pied du projet de coopérative. Dans leur secteur, soit les professionnels de la physiothérapie travaillent dans le réseau public, soit ils oeuvrent dans le privé pour des chaînes de cliniques bien connues. Cependant, comme dans plusieurs autres domaines, la pandémie a chamboulé les façons de faire.

« Des physiothérapeutes se sont rendu compte que l’offre de service des grandes bannières ne leur convenait pas. Alors, de plus en plus de physios décident de travailler à leur compte, de faire un transfert comme travailleur autonome », révèle M. Gagnon. Ce dernier confirme que le principal motif derrière ce changement d’orientation est la recherche chez les physiothérapeutes d’une plus grande autonomie professionnelle. « La gestion de l’horaire, c’est beaucoup axé sur l’horaire, la durée des traitements, mais il y a une crainte d’être seul, d’être isolé comme professionnel et de ne pas savoir comment faire », dit-il.

C’est donc pour répondre au livre blanc et aux besoins des travailleurs autonomes que Martin Gagnon et Corinne Lalonde, appuyés par deux autres collaborateurs, ont lancé cette coopérative de producteurs pour partager des services, de la formation et réaliser des économies d’échelle. Ayant démarré avec seulement 5 physiothérapeutes, ils sont maintenant 24 au sein de PhysioCoop, dont 12 se sont joints à la coopérative au cours des 6 derniers mois, signe d’un réel engouement pour ce modèle d’affaires à but non lucratif.

« On ne règlera pas seul la problématique de l’accessibilité aux soins au Québec, la problématique est beaucoup plus grande que tout ce qu’on pourrait faire dans notre modèle. Cependant, chaque petit pas est un pas, est un geste valable. Et c’est à force de cumuler les petits gestes qu’on va arriver à quelque chose, collectivement, ensemble », philosophe M. Gagnon.

De l’aide pour les professionnels

PhysioCoop est une coopérative décentralisée et virtuelle. Elle ne compte ni bâtiment physique ni siège social à proprement parler. Elle regroupe des membres dans plusieurs régions de la province, dont neuf à Montréal, dans les arrondissements de Rosemont–La Petite-Patrie et de Villeray.

Pour ces professionnels, la coopérative contribue essentiellement à briser l’isolement en leur permettant de compter sur des formations, des mentors et des ressources pour gérer leur propre entreprise. « Les membres vont notamment économiser sur certains achats à faire comme travailleur autonome et ils ont accès à de la formation et à un réseau pour discuter entre eux sur des sujets autant administratifs que liés à l’exercice de la physiothérapie », précise Martin Gagnon.

Et pour le public?

En devenant membre de la coopérative, les physiothérapeutes s’engagent à offrir un rendez-vous par semaine au programme communautaire de PhysioCoop, qui cible les personnes ne bénéficiant pas d’une assurance privée pour couvrir les coûts associés à ce genre de consultation. Dans une année, chaque physiothérapeute offre environ 49 séances, et avec actuellement 24 membres, c’est plus de 1 100 rendez-vous qui pourraient potentiellement être programmés sur 12 mois.

La consultation ou le rendez-vous offert dans le cadre de ce programme est fait « pro bono », c’est-à-dire que le physiothérapeute propose son temps gratuitement, ne recevant aucune rémunération. Toutefois, une contribution de 30 $ par séance est demandée au patient et sera versée directement à la coopérative afin de financer les services offerts à ses membres.

« On a vraiment une notion de desservir les gens qui n’ont pas les moyens d’aller en pratique privée, des gens qui sont en manque d’accessibilité et à faible revenu. On leur fait signer un contrat moral au début dans lequel ils confirment qu’ils n’ont pas les moyens et que s’ils ont les moyens, ils privent quelqu’un d’autre de ce service », souligne M. Gagnon.

PhysioCoop limite toutefois à trois le nombre de consultations « pro bono » possible pour un même patient, afin de maintenir une pleine accessibilité à son programme communautaire. Avec un attrait de plus en plus grand pour le travail autonome, PhysioCoop a de quoi séduire les jeunes professionnels en quête d’une plus grande liberté d’action. Et si sa contribution permet d’améliorer l’offre de soins, la coopérative pourra ainsi dire : mission accomplie!


Le dossier spécial L’EST COOPÉRATIF 2024 est produit en partie grâce à la contribution financière des partenaires suivants :