EST EN DÉVELOPPEMENT : LE RÔLE DE L’AIEM PLUS IMPORTANT QUE JAMAIS
L’industrie pétrochimique occupe toujours une place importante dans l’est de Montréal, malgré les importantes transformations qui ont marqué le secteur durant les dernières décennies. L’Association industrielle de l’Est de Montréal (AIEM) souhaite demeurer à l’avant-front des relations entre les citoyens et les entreprises du milieu et, surtout, rappeler l’importance de préserver notre capacité manufacturière dans l’économie québécoise.
Que ce soit dans la fabrication de matériel médical, dans le domaine de l’emballage ou encore dans la création d’une économie véritablement circulaire, les membres de l’AIEM jouent un rôle considérable dans la production de biens qui améliorent la qualité de vie des Québécois, croit Dimitri Tsingakis, président-directeur général (PDG) de l’association.
Le départ des raffineries du géant Shell au début des années 2010 et la récente fermeture de l’usine Indorama sont indicateurs d’une importante métamorphose qui s’opère dans le monde de la pétrochimie montréalaise, et le PDG de l’AIEM ne s’en cache pas.
« Je pense qu’il est important d’aborder l’éléphant dans la pièce : les gens se posent beaucoup de questions. Est-ce que la fermeture d’Indorama a un impact tellement important que ça met en péril le reste du secteur industriel? C’est clair que cette fermeture est un coup dur pour l’écosystème de Montréal; c’était un des maillons importants de la chaîne du polyester », souligne Dimitri Tsingakis.
On aura déjà constaté l’effet du départ de l’industriel thaïlandais dans l’est de Montréal, puisqu’après l’annonce cet été de sa décision de mettre la clé sous la porte de son usine de production d’acide téréphtalique purifié, les activités de l’usine ParaChem, qui avait pour seul client Indorama, ont été suspendues.
En plus des mises à pied, cette onde de choc pourrait avoir d’autres répercussions, « avec des ramifications qui vont au-delà de cette fermeture ». « J’y vois un parallèle avec la fermeture de la raffinerie de Shell en 2010. On venait coup sur coup de perdre Wolverine et Pétromont. Ces fermetures sont venues réduire le bassin d’utilisateurs de nos services. On a dû fermer notre centre environnemental, un laboratoire qu’on opérait au bénéfice de nos membres, parce qu’on n’avait plus la masse critique des entreprises », se remémore M. Tsingakis. Cela a entraîné le licenciement d’une dizaine d’employés.
En effet, l’AIEM doit sa création à la préoccupation de l’impact environnemental des activités industrielles de ses membres sur le secteur. À cela, se sont ajoutés au fil des ans la sécurité et la prévention des risques, la liaison avec la communauté locale, le développement économique. Cette évolution s’est opérée en fonction des enjeux auxquels les industries ont été confrontées.
Une expertise à conserver
Le PDG croit donc qu’il ne faut pas voir dans la fin de certaines activités du secteur pétrochimique de l’est une victoire pour l’environnement. « Certains diront qu’il faut se tourner vers l’avenir et il faut se pencher sur les technologies propres. Tout cela est vrai, mais en même temps, qu’est-ce que cela veut dire, les technologies propres? Il faut mettre tout cela en contexte. Du plastique et des énergies à base de carbone, on va encore en avoir besoin », souligne-t-il.
Or, la perte d’expertise dans ce domaine en territoire québécois n’a rien d’une réussite aux yeux de M. Tsingakis, bien au contraire, c’est une véritable défaite. « Durant la pandémie, on cherchait partout à produire des équipements de protection, ou du désinfectant pour les mains, dont l’une des composantes est de l’éthylène. Si c’était arrivé avant 2008, je vous aurais dit : « Pas de problème, on va appeler Pétromont. » Mais malheureusement, nous avons dû répondre que nous n’en avions pas, car ce n’est plus un produit qu’on fabrique localement. Alors, il a fallu se rabattre sur le marché et espérer en obtenir », illustre M. Tsingakis. Ce dernier croit que la perte de notre capacité de nous autosuffire nous rend vulnérables pour combler nos besoins, en particulier lors de catastrophes. La crise du verglas et le conflit en Ukraine sont des exemples où la résilience énergétique est un enjeu important. Nous devenons alors dépendants d’une autre entité pour combler nos besoins.
De plus, les industries pétrochimiques en sol québécois sont assujetties à des normes environnementales parmi les plus strictes, rappelle-t-il. « Elles sont soumises à de sévères normes d’opérations, en particulier à Montréal où il y a une réglementation municipale des plus sévères au niveau de l’environnement », insiste M. Tsingakis. Il cite l’exemple de la réglementation municipale qui oblige les entreprises à capter les vapeurs lors du remplissage des réservoirs et de camions-citernes afin de réduire les émissions atmosphériques. « Ce n’est pas quelque chose qui est commun dans l’industrie au sens large », ajoute-t-il.
« C’est évident que toutes activités industrielles auront un impact, mais si on peut faire en sorte que cet impact soit le moins élevé possible et qu’on soit plus performants, on aurait avantage à maintenir ce type d’activités là ici. » -Dimitri Tsingakis, PDG de l’AIEM
M. Tsingakis ajoute que l’écosystème industriel de l’est ne se limite pas qu’aux grosses multinationales énergétiques car plusieurs entreprises d’ici profitent de leur présence. « Elles participent à la vitalité économique du Québec et à l’innovation. Chez ParaChem, par exemple, il y avait des projets innovants de capture du carbone », affirme-t-il. Polytechnique Montréal a lancé en 2017 le projet Valorisation Carbone Québec en collaboration avec l’entreprise pour réduire les émissions de gaz à effet de serre en poursuivant la recherche et le développement de solutions technologiques de capture et de valorisation de dioxyde de carbone. Un projet pilote a été installé sur le site de ParaChem à cet effet.
De plus, des entreprises en démarrage peuvent profiter de l’expertise des industries pour le développement de nouvelles technologies. « Pour faire passer un projet pilote à l’échelle commerciale, ça implique un travail de l’augmentation de la fiabilité et de la performance. Cette mise à niveau, ce sont les industriels qui la possèdent », conclut M. Tsingakis.
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