350e DE POINTE-AUX-TREMBLES : DES BELLES D’AUTREFOIS QUI ONT FIÈRE ALLURE
Comme elle porte le statut de deuxième plus vieille paroisse de Montréal, on pourrait croire que Pointe-aux-Trembles compte sur son territoire bon nombre de bâtiments et de maisons historiques datant du 18e et 19e siècles. Pour différentes raisons que nous verrons un peu plus loin, ce n’est pas tout à fait le cas. Mais somme toute, le territoire offre de véritables perles qui font le bonheur des passionnés de notre patrimoine bâti. Grâce à l’Atelier d’histoire de la Pointe-aux-Trembles (AHPAT), nous vous présentons aujourd’hui quelques résidences parmi les plus anciennes du secteur, dont certaines figurent au palmarès des plus intéressantes et significatives du répertoire patrimonial québécois.
Village éprouvé par le feu
À l’instar de plusieurs communautés nord-américaines au 18e et 19e siècles et dans les premières décennies du 20e siècle, le village de la Pointe-aux-Trembles n’a pas échappé aux ravages du feu. Alors que la majorité des bâtiments sur le territoire sont construits en bois (environ les deux tiers estime-t-on en 1851), un terrible incendie frappe les Pointeliers en 1912, laissant derrière lui quantité de ruines. Le village, composé alors de quelques centaines de bâtiments, est à reconstruire en bonne partie.
Comme il s’agit d’une petite communauté à l’époque, relativement peu densifiée, mais tout de même bien établie, il n’existe pas à la Pointe-aux-Trembles autant de bâtiments qu’à Montréal, bien sûr, et le feu de 1912 viendra malheureusement effacer du paysage nombre de maisons et d’infrastructures qui auraient sûrement été dignes d’intérêt aujourd’hui.
Quoiqu’il en soit, il y a de magnifiques survivantes en pierre qui trônent toujours fièrement sur le territoire, et d’autres belles résidences qui ont survécu ou qui ont été construites après l’incendie et qui méritent qu’on s’y intéresse. En voici quelques-unes.
Cinq ancestrales de pierre*
On retrouve toujours, entre la 43e et la 64e avenues, 5 anciennes maisons de pierre, érigées entre 1731 et 1829, et inspirées de l’architecture du régime français.
La maison Joseph-Brodeur, érigée entre 1814 et 1829, se situe au 4, 43e avenue. Elle se distingue de par son grand carré, son toit en croupe à la normande et son toit revêtu de bardeaux de cèdres. On a longtemps cru qu’elle avait été érigée par Louis Beaudry vers 1751, mais des études récentes en attribuent la construction à Joseph Brodeur entre 1814 et 1829.
La maison Langlois-Tenant, érigée entre 1792 et 1825, se situe au 20, 58e avenue. Presque carrée (36 pieds par 34 pieds), elle se présente avec un toit en pignon à forte pente, recouvert de tôle à baguette et se terminant par un larmier. Elle se distingue par ses murs recouverts de crépi gris. Elle était jadis propriété du député et ministre Marcel Léger puis de sa fille, elle-même députée et ministre, et on y a tenu quelques conseils des ministres au tournant des années 1970 et 1980.
La maison Jean-Baptiste-Langlois, érigée entre 1751 et 1763, se situe au 14 490, rue Notre-Dame. Plus petite, elle mesure 35 pieds par 33 pieds et est dotée d’un toit à pente de 45 degrés. Une des deux cheminées a déjà possédé un four à pain. Une annexe construite du côté nord dans le respect de la personnalité de l’édifice évoque les anciennes cuisines d’été. On observe en façade (côté fleuve) au-dessus de la porte principale, une niche contenant une statuette de la Vierge et portant les chiffres 176… ou 177… possibles années de la construction.
La maison Antoine-Beaudry, érigée entre 1731 et 1777, se situe au 14 678, rue Notre-Dame. De même plan que les maisons Jean-Baptiste-Langlois et Pierre-Beauchamp (36 pieds par 34 pieds), elle a un toit très incliné se terminant en larmier, recouvert en tôle à baguette, la cuisine d’été – un ajout plus tardif revêtu en planches – étant recouverte de tôle à la canadienne. Les terrains de l’ancien camping Henry ayant été rachetés par la Ville de Montréal et aménagés en parc, l’emplacement permet une mise en valeur exceptionnelle de cette résidence ayant maintenant une vocation muséale et culturelle.
Finalement, la maison Pierre-Beauchamp, érigée entre 1764 et 1790, se situe au 10, 64e avenue. Son toit revêtu de bardeaux d’asphalte est à pente plus faible que ses jumelles. Elle se présente avec des larmiers, qui constituent un ajout postérieur, et une entrée de cave extérieure. Les murs sont faits de moellons de plus grandes dimensions moins avides en mortier que ceux utilisés pour la maison Antoine-Beaudry.
Maisons rurales ou villageoises survivantes
Pour l’œil averti, il est encore possible d’identifier un certain nombre de maisons de ferme de jadis. Le vrai défi est de les découvrir sous une présentation modernisée ou dans un environnement trompeur.
Soulignons d’abord sur la rue Notre-Dame, les bâtiments suivants : la maison Magloire-Dubreuil (12198), la maison Marceau (12214), la maison Joseph-Bernard (12246), la maison Joseph-Bénard (12413) érigée en 1890 et déménagée en 1922, la maison Omer-Lamarche que nous verrons plus loin avec les maisons victoriennes, la maison Dubreuil-Boily (14526) érigée en 1849 et modifiée vers 1870 et la maison du gardien du cimetière Hawthorne-Dale.
On retrouve, déménagée sur la 2e avenue, méconnaissable, celle qui fut vraisemblablement la maison du forgeron jouxtant le moulin de la 3e avenue. Et deux maisons vraisemblablement centenaires au 14, 9e avenue et au 540, 24e avenue. Mentionnons également la maison située au 76, boul. Saint-Jean-Baptiste, très remaniée, avec des galeries de style Stick Style et un clocheton revêtu en écailles et qui pourrait être la survivante du grand feu de 1912 alors située à l’angle nord-est des rues Sainte-Anne et Bellerive.
Finalement, la doyenne du vieux village, la maison Fisciau, construite entre 1800 et 1823, ayant subi de nombreuses transformations au fil des ans et une judicieuse restauration par un bénévole de l’AHPAT, Steve Johannsen, et son épouse, située au 11949, rue Saint-Joseph.
Les belles victoriennes
Au fil des ans, à la suite d’incendies, au développement commercial de la rue Notre-Dame, à des subdivisions de lots ou à des décisions personnelles ou publiques, plusieurs villas victoriennes de Pointe-aux-Trembles, situées le long du fleuve pour la plupart, sont aujourd’hui disparues. Fort heureusement, une vingtaine de maisons de ce type ont survécu et offrent à la vue des passants une agréable enfilade de villas entourées de magnifiques terrains aménagés. D’ouest en est toujours, on peut observer :
- La maison Langelier : 11590, rue Notre-Dame, d’influence Queen Anne et italienne, c.1900
- La maison Roy : 11640, rue Notre-Dame, style régence
- La maison Saint-Martin/Gauthier : 11730, rue Notre-Dame, vernaculaire américain, c.1887
- La maison Bruneau : 11780, rue Notre-Dame, éclectique, très remaniée
- La maison Gagnon/Jean Versailles : 12260, rue Notre-Dame, Queen Anne, c.1890
- La maison Héroux : 12246, rue Notre-Dame, d’inspiration Four Square
- La maison Dulude/Lapierre : 12286, rue Notre-Dame, Four Square modifiée, c.1920
- La maison Éphrem Robert : 12392, rue Notre-Dame, d’inspiration Queen Anne, 1910
- La maison Desnoyers/Lamarche : 12450, rue Notre-Dame, d’inspiration italienne, 1907
- La maison située au 12540, rue Notre-Dame, Four Square et pittoresque, c1917
- La maison située au 12546, rue Notre-Dame, Four Square et pittoresque
- La maison Omer Lamarche : 13101, rue Notre-Dame, Second Empire, encastrée dans les condos voisins
- La maison située au 14486, rue Notre-Dame, style régence, c1932
* À partir de cette section le contenu est tiré du document « Le patrimoine architectural résidentiel de la Pointe-aux-Trembles ou Les Belles Pointelières », de l’auteur Pierre Desjardins, avec l’autorisation de l’AHPAT. Pour obtenir plus d’information sur le patrimoine architectural du quartier, consultez le site de l’AHPAT en cliquant ici.