Pierre Lessard-Blais brigue un 2e mandat à la mairie de MHM (photo : Mélanie Dusseault).

ENVIRONNEMENT, SOLIDARITÉ ET QUALITÉ DE VIE POUR PIERRE LESSARD-BLAIS

Durant la présente campagne électorale municipale, EST MÉDIA Montréal proposera plusieurs rencontres avec des aspirants à la mairie d’arrondissements de l’est, question de découvrir à la fois leur plateforme locale et leur vision de certains enjeux liés au territoire. Aujourd’hui, Pierre Lessard-Blais, de Projet Montréal, candidat dans Mercier−Hochelaga-Maisonneuve.

Le maire sortant de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve dit avoir réfléchi avant de se lancer dans la course pour un 2e mandat à la tête de l’arrondissement. « Je me suis vraiment posé la question à savoir pourquoi j’avais envie de me présenter à nouveau. Parce qu’il faut le dire, c’est dur ce poste-là, sans compter que la pandémie a aussi rendu la chose encore plus compliquée depuis le printemps 2020. Honnêtement, la première chose qui m’est venue à l’esprit c’est l’importance de réussir à mettre en place un véritable plan de transition écologique, c’est ce qui me motive le plus, car on le sait que nous allons frapper un mur bientôt. La question est de savoir si on va le frapper à 100 km/h ou à 30 km/h », a clamé d’entrée de jeu le candidat de Projet Montréal, lors d’une entrevue en visioconférence le 30 septembre dernier.

Si le principal intéressé n’a pas voulu élaborer en détails ses engagements électoraux pour les quatre prochaines années, compte tenu que la rencontre avait lieu en début de campagne, il nous a toutefois fait part des principaux thèmes qui ont façonné sa nouvelle plateforme, tout en abordant l’inévitable rétrospective du premier mandat.

Fier de son bilan

De toute évidence, l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve a connu ces dernières années passablement d’agitations au niveau du développement de son territoire. Ray-Mont Logistiques, REM de l’est, nouvelle vision pour les secteurs Assomption sud et nord, piétonisation de la rue Ontario, aménagement de pistes cyclables, fermeture du YMCA, campements de sans-abris, grands projets de développements immobiliers… l’administration municipale en a eu plein les bras alors qu’elle devait de plus répondre aux enjeux extraordinaires générés par la pandémie. Beau baptême politique pour le maire Pierre Lessard-Blais.

« Dans ces circonstances, ma plus grande fierté, c’est justement cette gestion de la pandémie parce qu’on a su se rapprocher rapidement des partenaires communautaires et trouver une manière efficace de collaborer ensemble. Il faut se rappeler qu’au printemps 2020 l’arrondissement était l’un des endroits les plus touchés à Montréal. On avait alors réussi à acheter 15 000 masques (NDLR : difficiles à trouver à cette époque) que nous avions distribué aux organismes sur le territoire. Nous avons mis sur pied rapidement des refuges pour les sans-abris. Offert une aide substantielle aux organismes d’aide alimentaire. Et avec les fonds spéciaux de l’arrondissement, appuyés d’autres subventions gouvernementales, c’est plus d’un million de dollars en fonds d’urgence qui ont été octroyés aux organismes sur le terrain. Mon équipe est très, très fière de cela », soutient M. Blais.

Parmi ses « bons coups », le maire sortant soulignera lors de l’entrevue, entre autres la vitalité commerciale retrouvée de la rue Hochelaga dans Tétreaultville (15 nouveaux commerces s’y sont installés depuis et malgré la pandémie, dit-il); le succès de la piétonnisation de la rue Ontario en période estivale, « qui n’était pas du tout dans nos cartons »; la gestion environnementale de l’arrondissement avec plusieurs plans directeur (verdissement, parcs, transport collectif, etc.) et la plantation de 1 700 arbres cette année, « 3x plus que le total de l’administration précédente ». Il ajoutera à cela la mise sur pied du programme de Budgets participatifs qui a permis aux résidents des trois secteurs de l’arrondissement (Hochelaga-Maisonneuve, Mercier-Est et Mercier-Ouest) de proposer des projets communautaires utiles pour leur quartier à la hauteur maximale de 350 000 $, et de décider par la suite des projets retenus. « Nous avons été le premier arrondissement à faire cela, juste avant Ahuntsic-Cartierville. La ville centre a même adopté le concept par la suite. Ce que j’aimerais pour une prochaine édition, c’est que la ville centre vienne plutôt bonifier le montant des arrondissements au lieu de promouvoir son propre budget participatif, mais tout cela reste à réfléchir dans le cadre d’un prochain mandat », avance Pierre Lessard-Blais.

Quant aux « moins bons coups », le maire sortant citera sans surprise la défaite de l’arrondissement devant les tribunaux dans l’affaire de Ray-Mont Logistiques, « qui a complètement changé la donne. » Rappelons que l’entreprise de transbordement de marchandises a gagné par deux fois en cour pour faire respecter son droit d’usage sur l’ancien terrain de la Canadian Steel Foundries dans Assomption-Sud, un projet qui suscite la grogne d’un grand nombre de résidents du secteur regroupés notamment sous la bannière de Mobilisation 6600 Parc-Nature MHM, et aussi décrié par la plupart des élus locaux. L’entreprise a également entamé après le 2e  jugement une poursuite record contre la Ville de Montréal évaluée à 373 M $.

Le dossier d’un très attendu supermarché au Faubourg Contrecoeur sera aussi abordé par Pierre Lessard-Blais, qui se dit toutefois soulagé de voir qu’enfin le projet se concrétise depuis des années de tergiversations, « pour toutes sortes de raisons souvent en dehors des compétences de l’administration municipale. » CDPQ-Infra a en effet retiré sa réserve foncière sur le terrain il y a un mois (pour le REM de l’est), ce qui donne le feu vert à Sobeys pour implanter un magasin IGA. « C’est sûr que je préférerais voir des pépines en ce moment sur le terrain, mais ça s’en vient, c’est réglé », dira M. Blais.

Une plateforme inspirée de trois axes

Environnement, qualité de vie, solidarité. Voici les trois thèmes qui ont guidé la réflexion du candidat de Projet Montréal pour l’élaboration de sa présente plateforme électorale. Et l’environnement, il en parlera beaucoup lors de l’entrevue. « Tout le monde est pour l’environnement, comme tout le monde est pour la tarte aux pommes. Mais les vrais choix que la crise climatique nous impose sont difficiles parce qu’il s’agit de changer nos habitudes de vie, et ça, ça demande beaucoup d’efforts. Par exemple, pour être conséquent avec mon discours, je prends maintenant mon vélo 80 % du temps pour me déplacer, même en hiver. Mais c’est difficile j’en conviens. J’ai fendu des complets en me promenant à vélo! (rires) », soutient le maire sortant. Il ajoute que les gens n’aiment pas être bousculés dans leur quotidien, « et c’est là que ça devient difficile pour un politicien. »

Trois thèmes qui peuvent aussi être abordés par la question du logement, alors que l’on sait que l’arrondissement prévoit un développement immobilier majeur sur son territoire visant 15 000 nouvelles unités d’habitation d’ici 15 ans (voir notre reportage à ce sujet). « Il y a une certaine gauche qui critique la densification de l’arrondissement en disant que nous sommes en train de condoïser les quartiers. Mais la réalité, c’est qu’il faut accueillir plus de monde dans nos quartiers, plus de familles, pour éviter l’étalement urbain. Les pôles que nous visons à développer sont tous près de stations de métro, ils permettront la création de plus de verdissement et de places publiques. Des quartiers plus denses permettront aussi plus de succès pour les commerces de proximité », explique Pierre Lessard-Blais. Ce dernier est aussi d’avis que le règlement pour une métropole mixte, le fameux 20-20-20, qui assure au moins 20 % de logements sociaux dans les projets immobiliers d’importance et des logements abordables, permettra de maintenir une certaine accessibilité au quartier pour les nouveaux acheteurs. « On s’entend, ce règlement est un minimum actuellement pour contrer le manque de logements sociaux et abordables. Je trouve vraiment terrible qu’Ensemble Montréal prévoit l’abolir si le parti prend le pouvoir, en disant vouloir renégocier avec Ottawa et Québec. On l’a vu ces dernières années, ça peut être long avant que les programmes, et surtout les sous, arrivent dans les coffres de la Ville pour créer des logements. Donc abolir le règlement, ce serait reculer, certainement pas avancer en tout cas. »

Toujours sur le sujet du logement, mais aussi du développement du territoire en général, Pierre Lessard-Blais affirme être « l’homme de la situation » pour défendre, ou pourfendre, les projets qui visent à s’implanter sur le territoire de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve. « Ça prend un maire qui est capable de travailler avec les promoteurs qui ont de bons projets, mais aussi un maire qui se tient debout devant les promoteurs qui ont de mauvais projets. Quand on pense au REM de l’est par exemple, on m’entend depuis décembre dernier sur le dossier et je reste très constant sur ma préoccupation quant à son intégration sur le territoire, alors que Karine Boivin-Roy (NDLR : son adversaire d’Ensemble Montréal), on ne l’entend pas sur ce problème. Je pense qu’avec CDPQ-Infra, la stratégie de ne rien dire et d’attendre une version finale du projet aurait été très naïve, car la Caisse peut et fait évoluer le projet, on l’a vu avec la portion du centre-ville. On en veut du transport collectif dans l’est, mais pas au détriment de notre qualité de vie, MHM y a goûté ces dernières décennies avec les gros projets d’infrastructures et il faut s’assurer que maintenant ça se fasse en harmonie avec nos quartiers, pas le contraire », clame Pierre Lessard-Blais.

Un autre dossier incontournable de l’arrondissement, celui de Ray-Mont Logistiques, sera à régler par la prochaine administration municipale. Où en est-on, actuellement, avec cette saga selon le maire sortant? « Il faut que l’on clarifie les pouvoirs de Québec. Comment le gouvernement peut déclencher un BAPE? Quels seraient les impacts du BAPE? Quelles sont les autorisations que Québec doit encore octroyer à l’entreprise pour la poursuite de son projet? Ces trois éléments-là nous ne les connaissons pas pour l’instant et cela amène beaucoup de flou », explique M. Blais. En parallèle, il rappelle que son administration a mis en place un comité de concertation « qui cherche des solutions advenant la réalisation du projet pour une meilleure cohabitation. »

Quant au dossier des infrastructures sportives et communautaires dans MHM, dont certains demandent la création de nouveaux bâtiments sur le territoire, notamment pour palier la fermeture du YMCA Hochelaga-Maisonneuve, Pierre Lessard-Blais demeure sur sa position habituelle depuis le début de son mandat, soit qu’il faut avant tout remettre aux normes les installations existantes, avant de construire du nouveau. « Pour le cas du YMCA, il faut avouer que la pandémie a fait qu’on l’a mis de côté pour les raisons que l’on connait. Par contre, je pense il y a une belle fenêtre d’opportunités qui s’ouvre avec la réfection que l’on vient d’annoncer du Centre Pierre-Charbonneau, qui n’est pas très loin, près du Stade olympique. Comme on prévoit réaménager complètement le Centre, on pourrait en profiter pour voir si on pourrait amener là des activités qui étaient offertes au YMCA, entre autres. C’est sûr que c’est moins sexy d’annoncer la réfection d’infrastructures qui ont subi le passage du temps que de construire du neuf, mais tous les quartiers centraux à Montréal sont pris avec ce problème qui coûte énormément cher, mais qui est prioritaire. Donc je dis rénovons intelligemment ce que nous devons rénover, optimisons tout cela, ensuite on verra ce que l’on peut faire et ce que l’on peut se payer comme infrastructures. »

Un mot sur les réseaux sociaux

Alors que de nombreux élus municipaux ont décidé de ne pas se représenter dans le cadre de cette élection simultanée partout au Québec, plusieurs de ceux-ci ont affirmé en avoir particulièrement soupé des attaques acrimonieuses qu’ils subissaient régulièrement sur les réseaux sociaux. Dans MHM, le débat est aussi loin d’être civilisé sur plusieurs plateformes qui s’intéressent aux dossiers d’actualité concernant le territoire, et Pierre Lessard-Blais, comme la plupart des autres élus, n’échappe pas à la critique constante, commentaires qui dérapent souvent plutôt dans l’insulte gratuite et même une certaine agressivité. Qu’en pense le principal intéressé? « Même s’il y a du bon dans les réseaux sociaux, parce qu’il y en a bien sûr, s’ils fermaient demain matin, je m’en porterais probablement mieux », déclare-t-il. Toutefois, il affirme du même souffle que les commentaires ou critiques qu’il reçoit sont exprimés bien différemment lorsqu’il rencontre les gens en personne, et même au téléphone. « Depuis le début de la campagne par exemple, je rencontre évidemment beaucoup de gens, et je dirais qu’il y a à peu près une seule personne durant la semaine qui va me parler comme ce qu’on peut voir sur les réseaux sociaux. Dans la très, très grande majorité des cas, les gens sont respectueux et polis. Il y a un immense clivage entre la réalité sur le terrain, et ce que le monde peut dire derrière un écran de façon anonyme. Il faut faire la part des choses, même si c’est parfois loin d’être facile. » Un commentaire souvent entendu dans le cadre de cette série d’entrevues avec les aspirants maires d’arrondissements.