Une des tables rondes de l’événement Ébullition culturelle dans Saint-Michel (EMM/Sophie Gauthier)

LA CULTURE EN ÉBULLITION À SAINT-MICHEL

Organisé à la Maison d’Haïti ce lundi 29 avril par l’Espace Culture, la Table de concertation culturelle du quartier Saint-Michel, l’évènement « Ébullition culturelle dans Saint-Michel » visait à mettre en lumière le rôle crucial de la culture comme moteur de développement social et de revitalisation du quartier.

L’événement a débuté par la présentation de la thèse de Laurent Sauvage, doctorant en études urbaines à l’UQAM à l’époque ayant travaillé sur l’utilisation de la culture à Saint-Michel dans un objectif de revitalisation et de développement local. Il a souligné que la culture est intégrée dans le secteur dès le premier plan de quartier, réalisé en 2004. Saint-Michel est également l’un des premiers quartiers de Montréal à créer sa table de concertation culturelle, en 2006. Certaines questions y reviennent fréquemment : « Comment utiliser la culture pour répondre aux besoins des aînés du quartier? Comment utiliser la culture pour faciliter l’arrivée des immigrants? Comment utiliser la culture pour avertir sur les problèmes de violence? », illustre Laurent Sauvage. 

Laurent Sauvage, doctorant en études urbaines à l’UQAM (EMM/Sophie Gauthier)

Lorsqu’il s’agit d’utiliser la culture pour dynamiser un territoire, les villes ont souvent le réflexe de créer de grands évènements ou encore des infrastructures culturelles gigantesques telles que le musée Guggenheim de Bilbao, en Espagne. « Le but de cette démarche est que le territoire soit connu pour être un endroit effervescent et d’ainsi attirer des catégories socio-professionnelles plus élevées et des touristes », explique l’ancien doctorant. 

Saint-Michel a choisi une autre avenue. Le quartier utilise plutôt la culture pour répondre aux problématiques sociales. « La culture, qui fait vraiment partie de l’ADN de Saint-Michel, apparaît ici comme un moyen de répondre aux problématiques socio-économiques des résidents qui sont assez importantes », souligne Laurent Sauvage. Pour rappel, Saint-Michel fait partie des quartiers les plus pauvres de l’île avec Parc-Extension, Montréal-Nord et Hochelaga. En effet, 30,1 % de la population de Saint-Michel est à faible revenu, d’après les données de la table de quartier Vivre Saint-Michel en santé. 

Table de concertation, organismes et culture, main dans la main

La table de concertation de Saint-Michel joue un rôle crucial en permettant aux citoyens d’exprimer leurs besoins et de contribuer activement à la création d’œuvres d’art publiques notamment, comme en témoignent les nombreuses fresques qui embellissent le quartier. « Si la table de concertation culturelle n’existait pas, ce genre d’initiatives n’existerait pas non plus », souligne Laurent Sauvage. 

En plus de ces tables de concertation, les organismes communautaires et culturels représentent des acteurs de changement important. L’organisme « À portée de mains » s’approprie par exemple la culture comme outil d’intervention sociale, s’attaquant aux défis territoriaux par le biais d’initiatives artistiques. Depuis 2021, leur projet « Nos voisins sont des artistes » invite les habitants à redécouvrir la richesse artistique cachée dans leur propre rue, favorisant ainsi le lien social.

Après la présentation de Laurent Sauvage, une palette d’organismes et d’artistes michelois, reflétant la diversité de la scène culturelle du quartier, a défilé sur scène. Parmi eux, le Théâtre aux écuries (situé à Villeray mais à quelques pas de Saint-Michel), la Bibliothèque de Saint-Michel, le Forum jeunesse de Saint-Michel, le Centre des arts de la Maison d’Haïti, la Bibliothèque des jeunes, la TOHU, l’Union urbaine et l’Espace Culture ont présenté leurs activités et leur engagement dans le quartier.

La salle de la Maison d’Haïti, qui a accueilli l’évènement, était comble (EMM/Sophie Gauthier)

Des projets futurs 

L’évènement s’est poursuivi autour d’une table ronde en compagnie des institutions du quartier telles que le Cirque du Soleil, la TOHU et la Maison d’Haïti. Car il est important de rappeler que la vitalité culturelle de Saint-Michel a été rendue possible grâce à l’arrivée du Cirque du Soleil en 1997 et puis à la création de la TOHU par la suite, en 2004. À cette période, le quartier s’est ensuite engagé dans un chantier de revitalisation sociale et urbaine : « Ces stratégies de revitalisation apparaissent sous la forme de plans de quartier qui sont concertés par l’ensemble des acteurs locaux, dont les habitants et les organismes communautaires », développe Laurent Sauvage. Chaque responsable a proposé des pistes de réflexion à l’échelle de son organisme afin de poursuivre sa participation à la revitalisation de Saint-Michel.

Stéphane Lavoie, directeur général de la TOHU (EMM/Sophie Gauthier)

Pour lancer les festivités de ses 20 ans cet été, « la TOHU organisera deux week-ends sur les arts aériens durant le mois d’août », annonce Stéphane Lavoie, directeur général de la TOHU. La Cité des Arts du Cirque regarde vers l’avenir et réfléchit au développement touristique : « Bien qu’on en soit au début des réflexions, on a un projet de musée des arts du cirque. Il n’existe pas ce type de musée contemporain en Amérique du Nord actuellement. Et on a déjà une collection privée de 7 000 oeuvres! », déclare Stéphane Lavoie.

Nicolas Panet-Raymond, directeur en chef Santé, Sécurité et Responsabilité sociale du Cirque du Soleil (Image tirée de LinkedIn)

Le Cirque du Soleil, acteur économique important, génère des emplois à Saint-Michel : « Pour le futur, je pense qu’il faudrait qu’on réfléchisse à un angle concernant nos 1 000 employés, dont les artistes qui sont de passage la plupart du temps. Beaucoup d’entre eux ne connaissent pas l’histoire du cirque et de Saint-Michel », confie Nicolas Panet-Raymond, directeur en chef Santé, Sécurité et Responsabilité sociale du Cirque du Soleil. 

Ralph Maingrette, coordonnateur artistique du Centre des arts de la Maison d’Haïti (Image tirée du site Internet de la Maison d’Haïti)

La Maison d’Haïti, quant à elle, tient à continuer de représenter les artistes afro-descendants à travers plusieurs initiatives : « J’imagine un parcours culturel pour les résidents du quartier, des ateliers interactifs et des festivals à l’extérieur. Également, je souhaiterais créer un programme de mentorat, de résidence artistique et que notre organisme soit un incubateur entre l’art traditionnel et l’art numérique », explique Ralph Maingrette, coordonnateur artistique du Centre des arts de la Maison d’Haïti. 

L’après-midi s’est enrichie d’une seconde table ronde réunissant les organismes À portée de mains, le Programme Hors les murs de l’arrondissement de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension, le Carrefour populaire de Saint-Michel et ITMAV. Puis l’évènement s’est terminé par une présentation des bailleurs de fonds, bien sûr importants pour que l’ébullition culturelle se poursuive à Saint-Michel.