COMMUNAUTAIRE : QUOI DE NEUF DEPUIS L’ADOPTION DE LA POLITIQUE MONTRÉALAISE?
« La Ville reconnaît l’importance des organismes communautaires et des regroupements, qu’elle considère comme des interlocuteurs clés et spécialisés dans leurs domaines. » Cette déclaration, en ouverture de la Politique montréalaise pour l’action communautaire (PMAC), explique son fondement. Or, depuis son adoption il y a près de trois ans, est-ce que les choses ont changé dans le monde communautaire de la métropole?
Montréal devient en 2021 la première ville du Québec à entériner une politique visant à soutenir les groupes communautaires sur son territoire, à la suite de consultations et d’analyses entreprises en 2018. L’objectif de toutes ces démarches est de donner la parole aux acteurs sur le terrain, de mieux cerner leurs besoins et de leur accorder le support nécessaire à l’accomplissement de leur mission. On se base ainsi sur trois principes directeurs : reconnaître le milieu communautaire, respecter et valoriser l’autonomie du milieu et développer des partenariats éthiques avec celui-ci.
« L’adoption de la Politique montréalaise pour l’action communautaire en 2021 fait suite à une déclaration de reconnaissance et de soutien aux organismes communautaires montréalais adoptée par le conseil municipal en août 2018 », nous explique-t-on aux relations média de la Ville dans un courriel.
Ainsi, à l’été 2018, le conseil municipal reconnaît dans cette déclaration « l’apport des organismes communautaires au bien-être et à la qualité de vie de la population montréalaise, dans la lutte aux inégalités, dans l’exercice de la citoyenneté des Montréalaises et Montréalais, de toutes origines et de toutes conditions, ainsi que dans le développement social et économique de la métropole. » Une commission s’ensuit, puis les travaux échéants donnent lieu à l’adoption de la politique à l’été 2021.
Mais depuis, est-ce que les choses ont bel et bien changé dans le milieu? La Ville indique que désormais, un comité de suivi a été formé, il est composé de deux membres du Service de la diversité et de l’inclusion sociale (SDIS), d’une représentante des arrondissements de la Ville de Montréal et de trois représentants du milieu communautaire. « Ce comité de suivi travaille entre autres sur l’allègement du fardeau administratif et sur la mise en œuvre de la politique sur tout le territoire », insiste-t-on.
Également, depuis l’adoption de la politique, une grande partie des programmes de soutien financier offerts par le SDIS propose du financement pluriannuel aux organismes afin de faciliter la concrétisation d’actions structurantes, renchérit l’administration.
Dans la Liste de soutiens financiers du SDIS, mise à jour en février, la Ville rapporte des sommes totalisant 71,4 M$ octroyées à divers programmes dans plusieurs secteurs d’activités : enfance, lutte à l’itinérance, sécurité urbaine, logement, etc. Ces sommes sont annuelles ou pluriannuelles. Cependant, la plupart arrivent à échéance en 2024 ou en 2025. « Certaines ententes avec le gouvernement provincial arrivant à échéance cette année expliquent la fin de ces budgets. Des discussions ont lieu avec le gouvernement pour le renouvellement de ces ententes. Pour les autres programmes dont le financement se termine cette année, de nouveaux appels à projets sont prévus au courant de 2024. La liste des soutiens financiers sera mise à jour dans les prochaines semaines », souligne-t-on à la Ville.
Déception sur le terrain
Sur le terrain, un important organisme qui a participé aux travaux de la politique se dit désappointé par le manque de progrès depuis les trois dernières années. Marie-Andrée Painchaud-Mathieu, coordonnatrice du Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal (RIOCM), croit que « pas grand-chose n’a changé depuis l’adoption de cette politique. Il y a un comité de suivi qui a été mis sur pied à la suite de la politique, mais les travaux piétinent. Il y a un comité, mais est-ce que celui-ci a réussi à mettre en application la politique? La réponse est non », soutient-elle. La question de la reconnaissance des organismes qui agissent dans plusieurs arrondissements par exemple reste problématique, car les administrations locales demeurent réticentes à octroyer des enveloppes à des groupes communautaires qui n’offrent pas des services exclusivement sur le territoire, explique la coordinatrice. Pourtant, cet enjeu fait partie des problèmes cernés dans la politique en 2021. En effet, on reviendrait encore à la table à dessin trois ans plus tard plutôt que d’apporter de nouvelles solutions, croit Mme Painchaud-Mathieu.
Ainsi, ni la ville-centre ni les arrondissements n’auraient réellement appliqué la politique à ce jour, d’après la coordonnatrice du RIOCM. De plus, selon cette dernière, les sommes présentées dans la Liste de soutiens financiers du SDIS ne découlent pas de l’adoption de la politique. Elles sont octroyées par l’entremise d’autres programmes précédemment mis en place. « Il n’y a pas d’argent nouveau en lien avec la PMAC dans ces financements », constate-t-elle. « Cette politique, ça fait plus de 10 ans que les organismes la demandent. C’est donc décevant de voir que pour l’instant, rien de concret n’est arrivé », conclut Mme Painchaud.