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(Deposit photos)
21 janvier 2025CENTRES D’EMPLOYABILITÉ : UN SOUTIEN AUX CHERCHEURS D’EMPLOI CONFRONTÉS À DIVERS DÉFIS
Actuellement, le chômage serait à la hausse pour certaines catégories de la population, une réalité vécue notamment par les chercheurs d’emploi de l’est, selon des organismes spécialisés en aide à l’emploi du secteur. Ces derniers sont disponibles pour les guider dans leurs démarches professionnelles et faciliter leur réintégration sur le marché du travail, malgré de nombreux défis et des ressources limitées.
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Dorcas Destinoble, directrice générale d’Impulsion-Travail (Courtoisie)
Quel est plus concrètement le rôle d’un organisme d’aide au travail lorsqu’il reçoit une demande de soutien de la part d’un chercheur d’emploi ? « Nous offrons nos services en individuel ou en groupe. Parfois, il y a un parcours de cinq semaines qui permet d’outiller les personnes qui sont éloignées du marché du travail ou des personnes immigrantes récemment arrivées. Le tout afin d’ajuster le CV en fonction des exigences du marché du travail québécois », explique Dorcas Destinoble, directrice générale d’Impulsion-Travail, un centre d’emploi basé à Montréal-Nord.
Mme Destinoble et ses collègues ne se limitent d’ailleurs pas à la rédaction de documents de présentation, mais réalisent aussi des simulations d’entrevues d’embauche pour que les candidats puissent s’entrainer avant de rencontrer les employeurs. « On fait aussi des liens avec des entreprises pour favoriser des maillages entre les besoins du territoire et les profils que nous avons », ajoute-t-elle.
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Linda Raffoul, directrice générale d’Horizon Carrière (Courtoisie)
Le service de placement Horizon Carrière de Saint-Léonard offre aussi un accompagnement allant souvent au-delà de la simple recherche d’opportunités d’emploi, indique sa directrice générale, Lina Raffoul. « Les gens qui viennent chez nous ont aussi parfois besoin d’être accompagnés au niveau psychosocial. Il y a aussi des personnes qui ont beaucoup de difficultés au niveau informatique, au niveau de leur gestion de connexion avec les réseaux sociaux. Ça les rend vulnérables », explique-t-elle.
Fin de la pénurie de personnel?
Il y a environ un an, la pénurie de personnel laissait croire que les chercheurs d’emploi jouissaient d’un rapport de force vis-à-vis des employeurs. La situation n’est plus aussi simple, pense la directrice générale d’Impulsion-Travail. « On n’est plus dans la même réalité qu’après la pandémie. On sent qu’il y a une espèce de ralentissement, remarque Mme Destinoble. Il y a énormément de gens qui sollicitent les services en employabilité et on a une capacité limitée. Depuis le début de septembre, dans tous les services, on a de longues listes d’attente. »
Le taux de chômage en hausse affecte particulièrement le territoire desservi par Impulsion-Travail, selon cette dernière. « Je ne me rappelle plus la dernière fois que c’était à 5%. Mais si on regarde Montréal-Nord, on est dans les 12 %. L’indice de pauvreté y est toujours plus élevé. »
Mme Destinoble s’étonne du fait qu’il y a à peine un an, la situation était différente. « On avait des chercheurs d’emploi qui disaient : « Je vais analyser un peu les offres qui me sont faites pour savoir laquelle est la meilleure selon mes goûts… » On n’est plus là du tout! »
Lina Raffoul qualifie quant à elle la conjoncture actuelle de « période de grande instabilité au niveau de l’emploi ». Cette instabilité n’inquiète d’ailleurs pas seulement les chercheurs d’emploi, rappelle-t-elle. « On sent une grande insécurité sur le marché, chez les entreprises. Mais les chercheurs d’emploi vivent beaucoup plus de stress », croit la directrice générale d’Horizon Carrière.
Pourtant, elle explique que jusqu’à tout récemment, la situation de l’emploi semblait des plus favorables. « Jusqu’à l’année dernière, tous les indices étaient aux conditions les plus favorables pour le chercheur d’emploi. On avait un marché très actif. On avait beaucoup d’emplois, on avait une proportion de la population au plus haut niveau d’activité possible et le chômage était très bas. Tous ces facteurs menaient vers une vision du plein emploi », se rappelle Mme Raffoul.
Profil de la clientèle
Auprès des chercheurs d’emploi avec lesquels elle travaille, Mme Destinoble rencontre divers écueils. Notamment ceux issus de l’immigration récente. « Notre clientèle a beaucoup d’obstacles. On peut parler de défis linguistiques, on peut parler aussi de « déqualification ». Ça signifie que le diplôme obtenu dans un pays étranger n’est pas forcément reconnu ici, au Canada, au Québec. Il y a aussi la non-reconnaissance des expériences acquises à l’extérieur », donne-t-elle en exemples.
La difficulté s’avère d’autant plus grande pour les nouveaux arrivants en attente de statut, assure Mme Destinoble : « Il y a beaucoup de réticences de la part des employeurs par rapport à ces profils puisqu’on ne sait pas encore si les gens vont être capables de rester sur le territoire ou pas. Pour un employeur, c’est beaucoup plus difficile d’investir dans la formation d’une personne qui n’a pas encore une réponse par rapport à son statut. »
Elle tient à rappeler que son organisme ne dessert pas qu’une clientèle immigrante. « La clientèle est quand même assez variée. Nos services sont offerts à tout le monde. »
Horizon Carrière offre également des services aux nouveaux arrivants établis au Québec depuis 5 ans et moins qui ne sont pas des demandeurs d’asile. « Les demandeurs d’asile, on en a beaucoup dans l’est. Ils font beaucoup appel à nous, mais ils n’ont pas le droit au service à la base » , précise Mme Raffoul. Elle résume en expliquant que les services offerts par son organisme visent « monsieur et madame tout le monde à la recherche d’un emploi ».
Message au gouvernement
« On est dans un contexte de dépenses gouvernementales beaucoup plus limitées », s’inquiète la directrice générale d’Impulsion-Travail, qui précise être face à des listes d’attente qui débordent. Dans un avenir rapproché, elle craint de ne pas être en mesure de desservir l’ensemble de la population « qui a des besoins criants ». Pour remédier à la situation, il faudrait, selon elle, « voir si le gouvernement a cette ouverture de faire plus, de donner plus, mais ça, on ne le sait pas. Ça ne dépend pas de nous ».
La dénonciation faite par Mme Destinoble résonne aussi dans le discours de la directrice générale d’Horizon Carrière, Lina Raffoul. « Le contexte actuel des coupures de financement public fait qu’on se retrouve dans une période d’instabilité. On se retrouve à ne pouvoir accompagner que seulement un petit groupe de personnes en recherche d’emploi. Ça pourrait avoir un impact sur le marché du travail », croit Mme Raffoul.
Cette dernière explique que ces coupures pourraient même mener à des conséquences touchant l’ensemble de la population. « Toutes les études faites jusqu’à maintenant démontrent que les clientèles qui passent par nos organisations réussissent à occuper plus rapidement le marché du travail et à s’y maintenir davantage, donc à contribuer à l’économie. Si le gouvernement coupe dans ces services ou les réduit à un niveau très limité, ça serait dommage pour l’économie du Québec. »