LE CECI : UN ACTEUR QUÉBÉCOIS DU CHANGEMENT À L’INTERNATIONAL
Situé dans le secteur Angus du quartier Rosemont, le Centre d’étude et de coopération internationale (CECI) est un important organisme dans le domaine qui combat la pauvreté, l’exclusion et les inégalités grâce à des projets de développement durable sur trois continents et à de la formation pour les coopérants de différentes organisations. Il célèbre d’ailleurs son 65e anniversaire cette année.
Fondé en 1958, l’organisme a initié les toutes premières formations en coopération internationale au Québec. Il a actuellement 142 projets en cours dans une quinzaine de pays. Ses mandats se déploient sur le continent africain (Bénin, Burkina Faso, Guinée, Mali, Niger, Rwanda, Burundi, République Démocratique du Congo, Sénégal), en Amérique centrale et latine (Bolivie, Colombie, El Salvador, Guatemala, Haïti) et en Asie (Népal, Philippines, Vietnam).
Le CECI possède un budget annuel de 45 millions de dollars dont les 2 tiers sont financés par Affaires mondiales Canada. Il bénéficie également d’une aide financière importante du gouvernement du Québec, via le ministère des Relations internationales et de la Francophonie. Et dans une moindre mesure, il bénéficie aussi d’un coup de pouce de la banque interaméricaine de développement en Haiti, de la banque mondiale et du Programme Alimentaire Mondial (PAM). L’organisme reçoit aussi des dons de particuliers ou de communautés.
À l’occasion de son 65e anniversaire, le CECI a accueilli le mois dernier dans ses locaux de Rosemont les représentants de 10 pays partenaires. Cette semaine d’échanges et de réflexions a permis un intéressant partage d’expériences : « Ce type de réunion internationale permet de s’inspirer mutuellement », explique Philippe Dongier, directeur général (DG). Ces échanges ont fait ressortir par exemple le succès de la protection des écosystèmes en Bolivie. En effet, des associations de femmes autochtones y valorisent les habitats naturels et les productions agricoles. « Les directeurs et directrices d’autres pays ont trouvé cette action si inspirante que certains souhaitent répliquer cette expérience avec leurs partenaires, tels que des organisations de femmes en Haiti ou en Afrique de l’Ouest », ajoute le DG.
La femme au centre de tous les mandats
Les missions du CECI visent l’accompagnement de populations qui désirent améliorer leurs conditions de vie à long terme, dans une optique de partage et d’inclusion, en accordant par ailleurs une place de choix aux femmes. Il n’est donc pas étonnant que le thème de leur campagne du 65e anniversaire est « Les femmes, au coeur du changement »!
Les enjeux de l’organisme se déclinent donc à travers des combats concernant le droit des femmes (droit d’accès à la propriété, droit d’accès aux services essentiels ou droits plus fondamentaux); le pouvoir économique des femmes (leurs revenus, l’employabilité, l’entreprenariat); l’adaptation aux changements climatiques, la question de la gouvernance locale inclusive ainsi que la consolidation de la paix. Les besoins de base tels que l’accès à l’eau ou encore à l’alphabétisation demeurent aussi parmi ses priorités d’action.
Le CECI a instauré plusieurs programmes exclusifs au fil des ans, dont « Voix et leadership des femmes » au Mali, au Sénégal et en Haiti. Dans chacun de ces 3 pays, le programme appuie au minimum 15 organisations de femmes qui revendiquent une amélioration de leurs droits et de leur statut. Pour ce faire, l’organisme leur donne un coup de main au niveau de leur organisation, de leur capacité à lever des fonds ainsi que de la mise en place et de la mise en commun de stratégies. Au Sénégal, par exemple, toutes les organisations de femmes se sont unies autour de deux domaines de plaidoyer : l’âge du mariage (plus de 18 ans) et l’avancement de la place des femmes dans les instances décisionnelles ou les grandes industries.
L’équité entre hommes et femmes constitue également l’une des valeurs principales du CECI. Cet engagement se reflète au sein de leur organisme : « Au niveau global, environ 70 % des effectifs de l’organisation sont des femmes. Au niveau de notre conseil d’administration, notre présidente est une femme, Marie-Claire Dumas », souligne Philippe Dongier.
Le volontariat
Depuis sa fondation en 1958, l’organisme a mobilisé plus de 12 000 volontaires et employés au Canada ainsi que dans 30 pays. « Le CECI attire des gens qui ont envie de faire partie d’une organisation qui contribue à changer des vies à un niveau très humain, très réel », affirme le DG.
86 postes sont disponibles actuellement dans le volet volontariat. « Les partenaires, qui travaillent dans le domaine du droit des femmes ou dans le domaine économique par exemple, vont nous dire qu’ils ont besoin d’une personne spécialisée en communication ou en agriculture », raconte Philippe Dongier. Une fois que le besoin est compris, le CECI s’engage à trouver un volontaire aussi bien au Canada qu’à l’international. « On cherche des personnes qui correspondent au profil demandé et qui ont une véritable volonté d’agir en solidarité et dans le respect », insiste le DG. Les volontaires partent pour des périodes de quatre mois en général, mais parfois la durée peut s’allonger en fonction des besoins et de l’intérêt des volontaires. L’organisme se charge de tous les frais : le logement, l’alimentation, le transport, l’assurance santé… « On encadre les volontaires avec des services de sécurité et d’accompagnement pour les aider à bien s’intégrer et pouvoir travailler au mieux avec les partenaires du pays dans lequel ils vont évoluer », souligne Philippe Dongier. Et si le volontaire ne peut pas se déplacer, il est également possible de faire du « télévolontariat » à travers des mandats virtuels.
Sara Germain, doctorante en communication et actuellement gestionnaire de communauté web à Montréal, a tenté l’aventure avec le CECI. Tout a commencé en 2015, lors d’un stage de sensibilisation en Bolivie qui avait pour but de conscientiser des jeunes entre 25 et 35 ans à des réalités interculturelles. L’an passé, la jeune femme de 29 ans a réalisé un mandat au Guatemala pendant 8 mois en tant qu’agente de communication et instance politique. Elle se chargeait de toute la communication du CECI Guatemala : « Je m’occupais de l’ensemble des communications institutionnelles et je gérais leurs médias sociaux et numériques. Il arrivait aussi que je me déplace dans plusieurs zones du pays pour prendre des photos », explique la volontaire. Elle a également dirigé des formations concernant les questions d’égalité de genre au travail avec des organisations partenaires.
En plus de son intérêt pour l’Amérique latine et pour le mandat, Sara Germain a choisi de travailler pour l’organisme à cause de la présence de bureaux sur le terrain : « J’étais déjà partie en stage avec une autre organisation qui n’avait pas de bureaux sur place et ce manque renvoyait à une absence de connaissances quant à la réalité de terrain, sans compter les problématiques liées au décalage horaire », confie la volontaire.
Son mandat au CECI a changé sa vision à propos de certains enjeux, réalités et dynamiques : « Je constate que j’ai une vision dorénavant beaucoup plus humaine concernant les questions migratoires. Même chose pour les perspectives de genre. J’ai une vision très occidentale du féminisme qui est le fruit de mon parcours, mais quand on se retrouve dans des pays où la vision est complètement différente, ça nous questionne sur notre propre position », explique Sara Germain.
Les prochains défis
L’organisme projette de s’internationaliser de plus en plus : « Bien qu’on restera une organisation avec des racines et des liens importants au Québec et au Canada, on veut aussi être une organisation internationale avec des membres de notre corporation qui viennent des régions où l’on travaille », confie Philippe Dongier. Le CECI se dirige donc vers une logique de gestion égalitaire. Les membres de l’administration en Asie, en Amérique latine et en Afrique auront ainsi autant d’influence sur l’organisation que les personnes qui sont au Canada. « On s’y dirige petit à petit. Durant les 2 dernières années, nous avons intégré 4 personnes venant d’Afrique, d’Haiti et d’Amérique latine sur les 15 qui composent notre conseil d’administration. Et d’ici un an ou deux, la moitié sera constituée de personnes issues de nos pays de programmation », révèle le directeur général. « Ce changement est un défi très motivant et positif pour toute l’équipe », conclut-il.
Pour en apprendre plus sur le CECI ou s’engager pour du volontariat international, visitez le site de l’organisme ici.