Le ministre Pierre Fitzgibbon, dans ses bureaux au centre-ville de Montréal (EMM)

TERRAINS D’ESSO : UNE ENTENTE D’ICI 12 MOIS SELON PIERRE FITZGIBBON

Fidèle à la tradition de notre dossier annuel « Est en développement », nous avons rencontré cette semaine le ministre responsable de la Métropole et de la région de Montréal, Pierre Fitzgibbon, question de faire le bilan des principaux chantiers pilotés par Québec dans l’est de Montréal.

Même s’il affirme d’emblée « souhaiter toujours que le développement territorial aille plus vite », le ministre se dit néanmoins satisfait des progrès réalisés dans l’est de Montréal au cours de la dernière année. « Quand on regarde de plus près ce qui a été annoncé depuis un an, ou ce qui avance, je pense qu’on peut dire qu’il y a des progrès pour l’est de Montréal. Le prolongement de la ligne bleue est maintenant en exécution; mon collègue Christian Dubé a confirmé que l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont sera reconstruit en une seule phase avec 720 lits; la zone d’innovation projetée en santé semble vouloir se concrétiser; le prolongement du SRB Pie-IX est en exécution jusqu’à Notre-Dame; les appels d’offres pour le mini-hôpital dans l’est devraient être lancés bientôt; et le fonds de 23 M $ pour appuyer des projets locaux dans l’est est maintenant lancé. C’est quand même positif comme bilan selon moi », affirme Pierre Fitzgibbon.

Ce dernier enchaîne rapidement avec d’autres exemples « de bonnes nouvelles pour l’est ces derniers mois ». Il cite notamment la modernisation annoncée de l’immense usine de Sucre Lantic dans Hochelaga-Maisonneuve; l’inauguration des nouvelles installations de l’Institut de cardiologie de Montréal; la volonté annoncée du gouvernement d’aller en appel d’offres pour le remplacement du toit du Stade olympique; l’ouverture officielle de l’école spécialisée Irénée-Lussier; le début de la construction d’une première Maison des ainés sur le territoire; et l’avancement du dossier des terrains disponibles dans l’est (NDLR : les terrains d’Esso).

La clef demeure le transport structurant

Pierre Fitzgibbon est d’avis que le développement des grandes zones industrielles de l’est, vestiges surtout des pétrolières et des anciennes fonderies, est utopique sans la mise en place d’un réseau structurant de transport. Mais il est tout aussi utopique « de penser que le gouvernement peut débloquer un budget de 36 G $ pour réaliser un tel projet », dit-il, faisant référence à l’évaluation de l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) pour un « REM de l’est 2.0 ». Le projet a donc été reculé à la case départ il y a quelques mois par le gouvernement, qui a invité les instances impliquées (incluant le ministère des Transports) à refaire leurs devoirs afin de présenter, d’ici le printemps prochain dit-on, un nouveau projet plus « réaliste ».

Mais réseau de transport structurant il y aura, rassure le ministre : « Le premier ministre Legault, la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, et moi-même avons été clairs, il faut bâtir un réseau de transport structurant dans l’est de Montréal, et tout le conseil des ministres est également d’accord. C’est le morceau dur requis pour améliorer la mobilité des résidents et des travailleurs de l’est et développer le territoire. S’il n’y a pas un tel réseau, c’est bien sympathique, l’est de Montréal, mais il ne se passera pas grand-chose en termes de développement », soutient Pierre Fitzgibbon.

Esso et Québec seraient sur le point de s’entendre

Afin de s’assurer que les millions de pieds carrés laissés en friche par Esso à Montréal-Est ne fassent pas l’objet d’un développement qui s’éloignerait des visées d’avenir de Montréal-Est, de la Ville de Montréal et de Québec pour ce secteur industriel stratégique, le gouvernement Legault négocie depuis au moins un an avec la pétrolière pour mettre la main sur une partie des terrains présentement en vente. L’objectif serait de décontaminer ce grand espace et de le rendre éventuellement prêt à accueillir des projets. « Je pense qu’Esso n’était pas pressé de vendre, pour diverses raisons, mais je peux dire que nous sommes maintenant rendus assez loin dans les négociations. D’après moi, on devrait annoncer une entente d’ici 12 mois », avance le ministre.

Ce dernier n’a toutefois jamais eu de craintes, dit-il, quant au danger de voir s’installer des entreprises qui ne seraient pas les bienvenues aux yeux des instances publiques. « C’est sûr que ces terrains suscitent beaucoup d’intérêt, mais qui va acheter des sites contaminés de cette ampleur, qui sont peu ou pas desservis par des infrastructures publiques, pour faire un projet dont les villes et Québec ne veulent pas? Je ne vois pas comment on pourrait nous contourner. Mais c’est certain que si on devient propriétaire de ce terrain, c’est plus facile d’être le maître du jeu dès le départ pour le développer de façon concertée avec Montréal-Est et la Ville de Montréal. » Lorsqu’on lui rappelle qu’il y a quelques années à peine, Ray-Mont Logistiques a réussi à s’installer dans le secteur industriel adjacent (Assomption Sud) au grand dam de groupes de citoyens et d’élus de tout palier gouvernemental, le ministre affirme qu’une telle situation aujourd’hui serait très surprenante, puisque les deux villes sont aujourd’hui beaucoup mieux outillées pour faire face à une telle situation, notamment grâce à leur nouveau plan directeur respectif pour le développement des secteurs industriels dans cette zone stratégique.

Peut-on alors comparer cette portion de l’est de Montréal à un éventuel territoire à développer selon le modèle de Bécancour, qui accueille aujourd’hui la filière des batteries électriques? « La réponse est oui, dans le sens où des terrains qui sont prêts à construire, avec une thématique industrielle, un écosystème bien défini, des terrains qui donnent accès à l’électricité, à un bassin d’employés qualifiés, à l’eau, aux principaux axes de transport, il n’y en a pas beaucoup. L’est de Montréal a tout ça, mais il y a du travail à faire. Ça prend un réseau de transport structurant, et il faut s’occuper des terrains et des infrastructures », affirme Pierre Fitzgibbon. Comme industries qu’il serait envisageable de voir atterrir dans ce secteur de l’est montréalais, le ministre cite le recyclage, la logistique de haut niveau, l’économie circulaire… mais il n’ose pas trop s’avancer sur le sujet pour l’instant : « Il ne faut pas être trop dogmatique non plus avec ça. Moi, je crois qu’une thématique bien ciblée et bien pensée peut grandement aider à développer une zone industrielle, mais ce n’est pas non plus une fin en soi. Ça peut être autre chose aussi comme pôle ou secteur d’activités à mettre de l’avant. On n’est pas encore rendu là à mon avis, mais il y a des thématiques qui semblent s’imposer naturellement dans ce secteur de l’est de Montréal. »

Zone d’innovation santé : près du but

Des acteurs majeurs dans l’est de Montréal travaillent sur un grand projet de zone d’innovation en santé depuis un peu plus de deux ans, ce qui pourrait amener des centaines de millions de dollars d’investissements publics et privés sur le territoire. Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, l’Institut de cardiologie de Montréal et la Société de développement Angus, notamment, ont déposé un projet au gouvernement Legault pour que l’est devienne un pôle d’excellence internationale en santé personnalisée qui inclut deux grandes thématiques : la thérapie cellulaire et la pharmacogénomique (voir entrevue récente d’EST MÉDIA Montréal avec le PDG du CIUSSS).

Selon Pierre Fitzgibbon, il manquerait peu de choses pour que le gouvernement annonce bientôt son intérêt à aller de l’avant avec cette zone d’innovation. « On y est presque. Je pense qu’on a fait la démonstration que nous avons l’expertise nécessaire en recherche et en médecine clinique. Nous avons aussi l’expertise en intelligence artificielle (IA) qui va jouer un rôle important dans ce créneau. Et maintenant, on voit que le secteur privé s’intéresse au projet, ce qui manquait quelque peu au départ. C’est donc un projet qui demande encore d’aligner quelques astres, mais nous arrivons près du but », soutient le ministre.

Fonds de 23 M $ : des intéressés se manifestent

Au moins une dizaine de projets auraient déjà été déposés dans le cadre du nouveau fonds de 23 M $ lancé récemment par Québec pour appuyer la revitalisation de l’est de Montréal. Le gouvernement cherche ainsi à soutenir, d’ici le 31 mars 2026, des projets qui favoriseront l’attractivité et la vitalité de l’est de Montréal par l’amélioration des milieux de vie. « Complémentaires aux grands projets de transport collectif et à la requalification des secteurs industriels, les projets soutenus contribueront à attirer des investissements, des entreprises, des travailleurs et des familles dans l’est de la métropole, tout en améliorant la qualité de vie des citoyennes et citoyens », peut-on lire sur la page web dédiée à cette mesure d’aide financière.

Selon Pierre Fitzgibbon, ce programme fonctionne bien jusqu’à présent puisque les projets commencent à être déposés sur une base régulière et certains suscitent déjà beaucoup d’intérêt. « Il est même fort possible que nous soyons en mesure d’annoncer officiellement notre aide à un premier projet dès le 13 novembre, lors du Sommet de l’Est. Nous avons annoncé un fonds de 23 M $, mais j’aimerais dire à toutes les organisations qui ont des projets novateurs dans l’est : allez-y, déposez-les! Si les projets sont porteurs et qu’il manque des sous, on va en rajouter. » Pour en savoir plus sur cet appel à projets, cliquez ici.


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