Le chantier du Locoshop Angus démarre en 1998 (Courtoisie SDA)

TECHNOPÔLE ANGUS : DE TERRAIN VAGUE À QUARTIER PHARE DE L’EST

À la fin des années 1990, débute la construction du Technopôle Angus, une initiative de développement avant-gardiste soutenue par la Société de développement Angus (SDA). Forte d’un conseil d’administration (CA) aussi dévoué que complémentaire, la SDA permettra au Technopôle de devenir un quartier convoité de l’est de Montréal, apprécié pour son offre commerciale et culinaire attrayante, et son ambiance dynamique.

Sur les ruines industrielles d’un terrain vague qui avait auparavant accueilli les glorieuses années des Shops Angus – autrefois le plus grand complexe usinier en Amérique du Nord –, un nouveau projet d’aménagement d’envergure se profile. L’aventure du futur Technopôle Angus débute sous le signe de la détermination et de l’implication. « Au départ, j’ai amené au CA de la SDA des personnes qui avaient une crédibilité que moi, je n’avais pas », se rappelle avec humilité Christian Yaccarini, initiateur de la revitalisation du quartier Angus, président et chef de la direction de la SDA.

Ce CA « béton » est composé à l’époque de 17 membres. On y retrouve entre autres François Ferland, Michel Hébert, Bernard Lamarre, Léopold Beaulieu – qui vient tout juste de lancer le fonds de travailleurs québécois indépendant Fondaction –  et Louis Roquet, qui deviendra président du CA de la SDA en 1995.

Christian Yaccarini SDA

Christian Yaccarini (Courtoisie SDA)

Aussi optimistes que visionnaires, les membres ne pouvaient pas se permettre d’échouer, comme l’a un jour mentionné Louis Roquet. « Pour nous, il y avait deux façons pour que ce ne soit pas un échec : avoir le pied sur le frein et se dire : ça n’a pas marché, mais ce n’est pas un échec pour autant; ou plutôt se dire : on va tout faire pour que ça marche et que ça soit un succès. Et c’est cette tangente-là que les membres du CA ont pris », se rappelle Christian Yaccarini.

Le président actuel de la SDA avoue qu’il avait lui-même une pression, et aussi une responsabilité, de réussir. Et pour « tester » en quelque sorte le dévouement des membres du CA Angus, Christian Yaccarini va jusqu’à organiser des rencontres qui se tiennent…. les vendredis après-midi à 14 h! Et 30 ans plus tard, l’horaire n’a pas changé, et les gens sont toujours aussi ponctuels malgré ce rendez-vous placé à l’aube de la fin de semaine.

Avec son CA maintenant en place, la SDA peut débuter ce grand projet qui marquera plus tard l’histoire du développement immobilier à Montréal et, par le fait même, l’expertise reconnue d’une équipe de passionnés : le Technopôle Angus.

Idéation et balbutiements du Technopôle

Au départ, la SDA s’était donnée pour mission de créer des emplois pour les gens qui avaient perdu leur poste lors de la fermeture massive des usines dans l’est de Montréal au début des années 90. Mais ces emplois au sein de manufactures ne pouvaient être remplacés. « On n’était pas capable, sur le terrain d’Angus, d’attirer et de développer des projets immobiliers manufacturiers, parce qu’ailleurs, il y avait déjà des terrains industriels moins chers. Les entreprises manufacturières n’avaient plus besoin d’être à Montréal et préféraient aussi s’implanter sur le bord des autoroutes », précise le président et chef de la direction de la SDA.

Une partie de l’intérieur du Locoshop Angus aujourd’hui (Courtoisie SDA)

Le plan bifurque, mais la nature de sa mission demeure : revaloriser le territoire de l’est et développer son économie. Entre 1995 et 1998, l’année de la première pelletée de terre du projet Angus, l’équipe s’affaire au développement du Technopôle. Elle commande des études, réalise des ébauches et des plans, forme son personnel et, surtout, bâti sa crédibilité pour attirer des entreprises. « Comment les attirer? On voulait mettre en place des services à leur disposition. Mais les entreprises s’en foutaient de ces services à ce moment! Ils voulaient surtout savoir combien cela coûtait de s’implanter dans Angus », se rappelle M. Yaccarini.

Les premières années sont difficiles pour la SDA. ​​Les salaires offerts par la société ne reflètent pas nécessairement la compétence des membres, et pendant près de trois ans, Angus est en déficit important. Mais les collaborateurs restent motivés et le volontarisme ambiant rallie rapidement l’équipe.

Appuis et subventions

En septembre 1994, le gouvernement de Jacques Parizeau prend le pouvoir. Le projet de développement de la SDA est alors appuyé par des ténors du Parti Québécois comme Bernard Landry, Rita Dionne-Marsolais et Louise Harel. « Lorsque le Parti Québécois a été élu, d’un coup, nous avons eu des appuis très solides. Landry a vu notre sérieux et voulait nous donner notre chance », affirme Christian Yaccarini.

La SDA obtient au départ du projet deux prêts de 3 M$, un premier du provincial et un deuxième du fédéral. De 1995 à 2002, elle bénéficiera de subventions de fonctionnement. Mais le 13 avril 2003, le vent tourne, le Parti libéral mené par Jean Charest est élu. L’arrivée du nouveau gouvernement à Québec a provoqué la fin des subventions qui aidaient notamment la SDA à offrir un service de recrutement pour des personnes sans emploi.

Ce changement de cap amène les membres du CA à revoir le modèle d’affaires de la société pour la repositionner. On signe finalement une entente avec Fondaction. « Cette décision a été la meilleure chose qui nous soit arrivée, parce qu’on a pu devenir une vraie entreprise. Ça nous a obligés à avoir un souci constant des revenus et à être complètement indépendant de l’État, ce qui était pour moi un réel bonheur », explique Christian Yaccarini.

C’est un point tournant pour la SDA qui devient alors une véritable organisation d’économie sociale.

Une vue aérienne du côté sud du Locoshop Angus (Courtoisie SDA)

La revitalisation du Locoshop Angus

Le 8 septembre 1998, la SDA lance le coup d’envoi des travaux de restauration du Locoshop Angus, ancien lieu d’assemblage des locomotives au temps du Canadien Pacifique. Le montant de 6 M$ obtenu par la SDA permet de rénover les deux tiers de l’espace. Une fois cette première revitalisation terminée, une journée porte ouverte est organisée pour présenter le nouveau lieu aux entreprises potentiellement intéressées à s’y établir. « Les fonctionnaires qui sont venus nous rendre visite ont avoué qu’ils ne croyaient pas à mon projet. Mais juste de voir ce qu’on avait réalisé avec le Locoshop, ça leur a montré le potentiel de l’endroit », soutient Christian Yaccarini.

Ce lieu représente une deuxième chance pour le projet Angus, qui, à ce moment, se trouve dans un environnement où il n’y a pratiquement rien. Les premières entreprises qui décident de venir s’installer dans le nouveau Technopôle sont particulièrement attirées par le cachet du Locoshop revitalisé. « Si j’avais construit un bâtiment neuf, ça n’aurait pas marché, est persuadé M.Yaccarini. Les gens venaient pour la beauté du lieu, les locaux du nouveau Locoshop avaient vraiment beaucoup de charme. Et finalement, on l’a rempli assez vite. »

Quelque temps plus tard, un deuxième bâtiment voit le jour et la roue du Technopôle Angus est véritablement lancée. Aujourd’hui, le site regroupe au total 17 bâtiments, occupés par plus de 70 organisations. Le projet, comme il le voulait, a finalement permis de créer des milliers d’emplois au cours des 25 dernières années. La SDA a réussi sa mission.

Pour lire le premier texte de cette série sur le 25 anniversaire du Technopôle Angus, cliquez ici.


Cette série spéciale est financée par la Société de développement Angus