De gauche à droite : Christian Yaccarini, président de la SDA; Louise Harel, ancienne députée d’Hochelaga-Maisonneuve; Paul St-Pierre Plamondon, chef du PQ et député de Camille-Laurin; Vincent Marissal, député de QS dans Rosemont; Madwa-Nika Cadet, députée du PLQ dans Bourassa-Sauvé; et Jean-Denis Charest, PDG de la CCEM (Emmanuel Delacour/EMM)

RÉFORME DE LA CARTE ÉLECTORALE : LES ÉLUS DE L’EST DEMANDENT UNE PAUSE DES TRAVAUX

Les élus de trois formations politiques dans l’est de Montréal se sont rassemblés ce midi pour demander à la Commission de la représentation électorale du Québec (CRÉ) de mettre sur pause ses travaux de réforme de la carte électorale du Québec, alors qu’un récent rapport de celle-ci propose d’éliminer la circonscription d’Anjou–Louis-Riel.

Vincent Marissal, député de Québec solidaire (QS) dans Rosemont, Madwa-Nika Cadet, députée du Parti libéral du Québec (PLQ) dans Bourassa-Sauvé et Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti Québécois (PQ) et député de Camille-Laurin parlaient d’une même voix pour que le Directeur général des élections du Québec (DGEQ) attende jusqu’aux prochaines élections pour poursuivre sa réforme, afin que l’est ne perde pas une circonscription.

En effet, en plus de rayer de la carte Anjou–Louis-Riel, la refonte transformerait les frontières de nombreuses autres circonscriptions dans le secteur, se désole M. Marissal. « Avec la refonte qu’on nous annonce, ici. nous ne serions plus dans le cœur de Rosemont. Je serais catapulté de la Promenade Masson aux Galeries d’Anjou! », a indiqué le député solidaire, lors de la conférence qui se déroulait aujourd’hui aux Shops Angus. Ce dernier qualifie le redécoupage en question de « catastrophe » qui « ravagerait » plusieurs circonscriptions. La nouvelle circonscription de Rosemont–Louis-Riel s’étendrait sur quatre arrondissements montréalais, a ajouté M. Marissal, une absurdité selon ce dernier.

« Force est de constater qu’en ce moment, la loi électorale n’octroie pas la flexibilité nécessaire à la commission pour que celle-ci puisse bien respecter les principes de représentativité électorale », a pour sa part martelé Mme Cadet. Le PLQ a d’ailleurs présenté une proposition pour mettre sur pause les travaux de la CRÉ jusqu’en 2026. Selon le parti, il faut dépoussiérer la loi électorale pour qu’elle représente non seulement les électeurs, mais aussi les résidents sur les territoires du Québec. En effet, la loi actuelle doit dessiner une carte électorale de 125 circonscriptions, avec environ 51 000 électeurs dans chacune de celle-ci. Cette méthode de calcul ne tient pas compte des « communautés naturelles » au sein des circonscriptions, dénoncent les élus.

En effet, les députés ont souligné que plusieurs des résidents qui se présentent à leurs bureaux de circonscription chaque semaine pour leur faire part de leurs problèmes sont très souvent de nouveaux arrivants, qui n’ont pas encore obtenu leur citoyenneté canadienne; ils ne sont donc pas inscrits au registre électoral.

« En voulant régler certains problèmes, on en crée d’autres dix fois plus importants », a affirmé quant à lui M. St-Pierre Plamondon en parlant des travaux du DGEQ et de son refus d’adopter un statu quo, le temps que les élus de l’Assemblée nationale procèdent à une révision de la loi électorale. De plus, le péquiste a déploré l’absence à l’événement de la journée des élus de la Coalition Avenir Québec (CAQ) de l’est : Karine Boivin-Roy, députée d’Anjou–Louis-Riel, et Chantal Rouleau, députée de Pointe-aux-Trembles.

La société civile s’oppose aussi à la réforme

Aux côtés des élus, des membres influents de la société civile dans l’est de Montréal ont aussi pris la parole pour s’opposer à la réforme avancée par la CRÉ. Celle-ci aurait un « impact important » sur l’est, qui est en train de se développer, a insisté Louise Harel, ancienne présidente de l’Assemblée nationale et ancienne députée péquiste dans Hochelaga-Maisonneuve. Cette dernière, qui réside à proximité du boulevard de l’Assomption, rappelle que 7 immeubles de 15 étages sont en cours de construction dans les environs et que ceux-ci abriteront des nouveaux résidents qui risquent d’être mal représentés, si les plans proposés par la CRÉ venaient à se concrétiser.

Même son de cloche de la part de Christian Yaccarini, président de la Société de développement Angus, qui rappelle que dans les dernières années, 200 000 personnes sont venues s’installer à l’est du boulevard Saint-Laurent, à Montréal. « L’est de Montréal possède une diversité importante : la preuve, c’est le seul endroit où l’on retrouve des députés de quatre formations politiques différentes! La population de l’est a besoin d’être bien représentée », a plaidé M. Yacccarini.

Son comparse, Jean-Denis Charest, président-directeur général (PDG) de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal (CCEM), abonde dans le même sens. « Cela fait 40 ans que l’est connaît des injustices. Nous avons lancé il y a un an le mouvement D’est en Est pour mettre en branle la mobilisation autour de la revitalisation de l’est. Ne mettons pas à risque ce processus de revitalisation en donnant encore moins de représentativité aux gens de l’est. Leurs voix doivent être entendues », a-t-il conclu.

« Prendre le temps de bien faire les choses »

Karine Boivin-Roy, députée d’Anjou-Louis-Riel (Archives EMM)

Rejointe au téléphone, Mme Boivin-Roy a expliqué son absence aux côtés de ses collègues aujourd’hui en indiquant avoir voulu laisser la place aux députés de l’opposition pour qu’ils puissent « se faire entendre sur le sujet. J’appuie le ministre Jean-François Roberge (NDLR, le responsable des Institutions démocratiques) qui évalue présentement toutes les avenues possibles de solution. Et comme gouvernement, nous souhaitons rencontrer éventuellement les oppositions pour réfléchir à des pistes de solution », a avancé celle-ci. La députée de la CAQ a tout de même rappelé que sa position n’avait pas changé depuis la présentation du premier rapport de la CRÉ en septembre dernier et qu’elle est toujours en opposition à l’élimination de sa circonscription de la carte électorale. « Il est inacceptable de s’attaquer au poids démocratique de Montréal et de retirer une circonscription dans l’est de Montréal, soit celle d’Anjou–Louis-Riel. J’aime Anjou–Louis-Riel et je vais continuer à me positionner en grande défenderesse de Montréal. »

Pour sa part, le cabinet du ministre Roberge a envoyé par courriel une réaction à la conférence de ce matin. « Nous évaluons présentement les options qui s’offrent à nous. Comme gouvernement, nous souhaitons rencontrer les oppositions afin de réfléchir ensemble à des solutions », a indiqué l’équipe du ministre. « Le redécoupage de la carte électorale est un enjeu qui touche au fondement même de la démocratie. Il faut donc prendre le temps de bien faire les choses et trouver un consensus. Nous y travaillons actuellement. Que ce soit dans les grands centres urbains ou en région, on veut que tous les électeurs québécois soient bien représentés à l’Assemblée nationale », a-t-il terminé.