Photo Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs.

PLAGE DE L’EST : AU TOUR DU CHEVALIER CUIVRÉ DE FREINER LE PROJET

La baignade à la Plage de l’est de Pointe-aux-Trembles devra vraisemblablement attendre encore quelques années avant d’être autorisée, a appris cette semaine EST MÉDIA Montréal. C’est qu’en plus des problèmes causés par la contamination du littoral de la plage, voilà qu’un arrêté ministériel visant la protection de l’habitat du chevalier cuivré vient stopper tout développement et travaux sur le site jusqu’à ce que l’on évalue si oui ou non celui-ci abrite une aire d’alimentation de ce poisson en voie de disparition, confirme l’administration municipale.

Cette caractérisation d’habitat doit avoir lieu en juillet-août, alors que l’on pourra évaluer si des herbiers spécifiques à l’alimentation et à l’environnement privilégié de l’espèce se trouvent sur le site et autour de la plage. Spécifions que le chevalier cuivré a été placé sur la liste des espèces en péril en 2007 par le gouvernement canadien et selon les estimations, on compterait seulement que quelques milliers de spécimens encore en vie. On retrouve le chevalier cuivré qu’au Québec. Ce poisson se reproduit dans le Haut-Richelieu, puis va se nourrir dans des herbiers du Saint-Laurent, à la hauteur de Contrecœur et des environs, dont la Plage de l’est fait partie. Le prolongement du Port de Montréal, à Contrecoeur, fait présentement face au problème alors que l’habitat du poisson, s’il ne peut être préservé, devra être reproduit à proximité aux frais de l’administration portuaire et à la satisfaction des ministères de l’Environnement du Québec et du Canada.

Obstacles inattendus

C’est une autre tuile qui tombe sur la tête de l’administration municipale de Rivière-des-Prairies−Pointe-aux-Trembles dans le dossier de la Plage de l’est, dont l’aménagement est presque complété, mais la baignade, elle, demeure interdite. En cours de projet, la caractérisation des sols du littoral avait démontré des taux de contamination trop élevés (hydrocarbure, métaux, autres) pour permettre l’usage d’une plage à cet endroit, le tout résultant vraisemblablement des activités de l’ancienne marina Beaudoin située sur le site, combinés au dépôt de sédiments apportés au fil des dernières décennies par l’important va et vient des bateaux et l’érosion des berges.

Photo courtoise Ville de Montréal.

Québec, via la ministre et députée de Pointe-aux-Trembles Chantal Rouleau, avait rapidement annoncé une aide exceptionnelle de 5 M $ pour aider à la décontamination du littoral il y a deux ans. Toutefois, plusieurs étapes devaient suivre leur cours avant de procéder aux travaux de décontamination, et la pandémie n’a rien fait pour aider l’avancement du dossier. Ainsi, l’arrondissement devait préparer dans un premier temps les documents d’appel d’offres pour procéder à l’évaluation de la méthode qui serait appropriée pour décontaminer la plage. L’appel d’offres a été lancée l’an dernier, mais l’arrondissement n’a reçu aucune soumission de la part de firmes de génie. « On ne s’attendait pas à ça, même si nous sommes conscients qu’il s’agit d’un projet complexe et hors du commun. C’est certain que ça ralentit le processus », a exprimé en entrevue la mairesse de RDP-PAT, Caroline Bourgeois.

Mais c’est plus récemment que l’administration municipale a été confrontée à l’arrêté ministériel visant la protection du chevalier cuivré. « Nous étions à faire installer le quai permanent prévu dans l’aménagement de la Plage de l’est et cela imposait de faire une demande de permis à Pêches et Océans Canada. C’est là que nous avons appris qu’une caractérisation de l’habitat du poisson devait être réalisée avant de procéder à des travaux d’ancrage du quai. Nous avons donc installé un quai flottant temporaire, le temps de faire cette évaluation cet été », explique la mairesse.

On en saura donc plus une fois cette caractérisation effectuée. Si jamais les herbiers ciblés se trouve sur le site, l’arrondissement devra peut-être revoir son plan d’aménagement pour l’aire de baignade et l’emplacement du quai permanent. « On verra alors s’il faut s’ajuster. Dans le pire des cas, et nous en sommes vraiment pas rendus là, il y aura toujours la possibilité de compenser avec l’aménagement d’herbiers à l’écart du site de la plage. C’est le même principe que ce qui se passe actuellement avec le projet de terminal du Port de Montréal à Contrecoeur », affirme Luc Castonguay, directeur développement du territoire et études techniques à l’arrondissement de RDP-PAT.

La situation actuelle recule donc considérablement les travaux de décontamination du littoral, qui permettront finalement la baignade sur le site. Selon Caroline Bourgeois, on parle d’au moins deux années minimum avant le début de ces travaux. Il faudra attendre l’évaluation de cet été concernant l’habitat du chevalier cuivré et adapter les plans au besoin, retourner en appel d’offres pour l’évaluation des procédés à utiliser pour la décontamination, aller en appel d’offres pour la firme de décontamination, et finalement procéder aux travaux de décontamination et d’aménagement final du littoral.

Toutefois, la mairesse de l’arrondissement rappelle que plusieurs activités se déroulent normalement à la Plage de l’est et que le site demeure très populaire auprès de la population locale. « Déjà le lieu est magnifique et fortement fréquenté. Il y a les activités nautiques offertes par l’organisme La Route de Champlain comme le kayak, le canot. Il y a le volleyball, des aires de détente, la superbe passerelle. C’est certain que nous avons hâte à la baignade, mais je pense que les gens comprennent que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour aller le plus rapidement possible et qu’il y a des circonstances exceptionnelles dans ce projet qui sont hors de notre contrôle. »