Plusieurs espaces de commerces de détail sont vacants rue Sainte-Catherine Est (Emmanuel Delacour/EMM)

LOCAUX COMMERCIAUX VACANTS : LES PROPRIÉTAIRES SERONT-ILS TAXÉS?

Devrait-on taxer les propriétaires de locaux commerciaux vacants? Le débat, lancé quelque temps avant la pandémie, demeure d’actualité, alors que dans l’est de Montréal, il pourrait s’agir d’un outil pour revitaliser certaines artères, selon des acteurs du milieu.

Les devantures de boutiques vides sont nombreuses rue Sainte-Catherine Est. Les travaux de réfection de l’artère ont pourtant pris fin depuis le mois de juin 2023. Néanmoins, malgré les efforts de la Société de développement commercial (SDC) Hochelaga-Maisonneuve, plusieurs locaux demeurent vacants. « On a entre 13 % et 15 % de locaux inoccupés sur la rue Sainte-Catherine Est en ce moment, ce qui est relativement élevé. Sur Ontario, on se trouve plutôt entre 5 % et 6 % de locaux vacants », explique Patrick Legault, directeur général de la SDC.

Patrick Legault, directeur général de la SDC Hochelaga-Maisonneuve (Courtoisie SDC Hochelaga-Maisonneuve)

Sur le site de la SDC, une page fait la promotion de locaux disponibles, affichant parfois le montant du loyer mensuel. Selon le directeur général, le coût moyen du pied carré sur Sainte-Catherine est en moyenne de 19-23$.

Cependant, ce ne sont pas tous les propriétaires d’immeubles commerciaux qui collaborent avec la SDC, révèle M. Legault. Certains n’affichent même pas la disponibilité de leurs espaces sur le marché. « Il y a des locaux qui ne sont pas vraiment en location. On contacte les propriétaires, mais ils ne nous répondent jamais. Pour eux, c’est plus un investissement à long terme », constate le directeur général.

Ce dernier se dit donc plutôt favorable à une réglementation « plus claire et contraignante » pour les propriétaires qui laissent vacants leurs locaux. Une forme de taxation à la vacance pourrait faire avancer les choses rue Sainte-Catherine Est, envisage-t-il. « Il y a des enjeux importants par rapport aux locaux vacants. Tout d’abord, en matière de sécurité : les espaces laissés vides et parfois à l’abandon peuvent présenter des dangers structurels. Aussi, de façon plus générale, au point de vue du développement commercial, les locaux vides minent la vitalité d’une artère. Ce sont de véritables cancers pour celles-ci », se désole M. Legault.

Un débat qui dure depuis longtemps

Ce n’est pas d’hier que le problème des locaux vacants pousse les décideurs montréalais à envisager des mesures plus contraignantes pour forcer les propriétaires d’espaces commerciaux à mettre ceux-ci sur le marché.

Lancés en 2019, les travaux de la Commission sur le développement économique et urbain et l’habitation à ce propos ont mené au dépôt d’un rapport dans lequel la possibilité d’implanter une taxe à la vacance ou une redevance réglementaire a été examinée. À la suite de la publication des recommandations de la Commission, l’administration Plante avait écarté l’idée de surtaxer les propriétaires commerciaux, préférant mieux encadrer les baux commerciaux. Une telle mesure demanderait toutefois la création d’un registre des baux par le gouvernement de Québec, concept qui n’a pas encore fait son chemin à l’Assemblée nationale.

(Emmanuel Delacour/EMM)

Or, la Ville de Rimouski a déjà adopté une telle réglementation pour les locaux de son centre-ville. Les édifices commerciaux inexploités sur plus de 60 % de leur superficie pendant 1 an doivent désormais payer une taxe de 100 $ le mètre carré pour les 500 premiers mètres carrés.

Questionné sur la possibilité d’imposer une telle taxe dans la métropole, les relations média de la Ville de Montréal n’avaient pas répondu à EST MÉDIA Montréal au moment de publier ces lignes.

Par ailleurs, la Commission proposait aussi de transférer aux propriétaires immobiliers la responsabilité de cotisation obligatoire aux SDC lorsqu’un local commercial est vacant et, dans le cas échéant, de demander au gouvernement du Québec de faire les modifications législatives nécessaires à ce propos. Mais cette option semble aussi avoir glissé entre les doigts de l’administration Plante. En effet, selon une demande d’accès à l’information formulée en 2022 et obtenue par l’Opposition officielle à la Ville de Montréal, qu’EST MÉDIA a pu consulter, une analyse du Service du développement économique, et du Bureau des relations gouvernementales et municipales, révèle que ce serait « techniquement impossible » pour le Service des finances de la Ville. Les logiciels permettant l’imposition des membres des SDC étant « désuets », ceux-ci n’offrent pas la possibilité d’ajouter les propriétaires comme membres cotisants. « Aucun nouveau système de perception n’est prévu avant 2026. Des coûts de développement de système seraient à prévoir », indique le document, sans préciser le montant à envisager.