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INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE : LA CDC RDP PREND ACTION

L’insécurité alimentaire frappe actuellement de plein fouet un nombre grandissant de ménages dans la métropole et ailleurs dans la province. Dans le quartier montréalais de Rivière-des-Prairies (RDP), certaines initiatives permettent de pallier cette difficulté en matière d’approvisionnement alimentaire d’urgence, mais les actions entreprises ne sont pas suffisantes pour répondre plus sérieusement à l’insécurité vécue par les résidents. Des organismes du secteur travaillent sur le dépannage alimentaire ainsi que la sécurité alimentaire. De plus, un mini-pôle logistique alimentaire porté par la Corporation de développement communautaire de Rivière-des-Prairies (CDC RDP) verra le jour prochainement dans le secteur afin de proposer aux citoyens une offre d’aliments sains, locaux et, surtout, abordables.

D’après les résultats d’une enquête canadienne sur le revenu menée en 2021 par Statistique Canada, l’insécurité alimentaire, qu’elle soit marginale, modérée ou grave, toucherait aujourd’hui près de 1 250 000 personnes dans la province. Les conséquences de la pandémie et l’inflation qui sévit actuellement sont évidemment en cause, et les ménages à faible ou même à moyen revenu peinent à remplir leur panier d’épicerie d’aliments, dont les prix ne cessent de grimper. Le budget gouvernemental accordé à l’organisme Moisson Montréal, initialement prévu à 10 M$, est finalement passé à 18 M$, alors qu’un sondage Léger publié au début du mois a révélé que près de 1 Québécois sur 3 (32 %) a expérimenté une situation d’insécurité alimentaire au moins une fois en 2023. 

Katy Lessard (Courtoisie)

Selon une définition commune partagée par le Réseau alimentaire de l’Est de Montréal (RAEM) et la CDC RDP, l’insécurité alimentaire peut être décrite comme « un accès inadéquat ou incertain aux aliments en raison de ressources financières limitées ». 

« L’insécurité alimentaire peut prendre plusieurs formes et touche toutes sortes de personnes, précise Katy Lessard, coordonnatrice de la concertation à la Table de développement social de RDP (TDS RDP). Par exemple, pendant une période définie, certains membres d’un ménage peuvent se priver d’un repas. Ça peut aussi être une personne qui fait son marché et qui effectue des choix en fonction des prix, des soldes, et non plus en fonction de ses besoins. Quand on parle de vulnérabilité alimentaire, on ajoute les notions de revenu, d’accessibilité, d’abordabilité ou de proximité des points de service. »

Pallier la précarité alimentaire sous toutes ses formes

Dans le quartier de RDP, comme partout ailleurs, la situation citoyenne concernant l’alimentation est préoccupante. Un sondage lancé récemment par la CDC RDP, en collaboration avec la firme MCE Conseils, avait pour objectif de mieux comprendre les habitudes et les défis alimentaires des résidents du secteur et leurs lieux d’approvisionnement. « L’enquête est en cours actuellement et sera déployée pour quelques semaines encore. On veut avoir un portrait juste du système alimentaire à RDP, pas seulement des citoyens vulnérables, mais de l’ensemble des résidents, pour mettre en place des actions efficaces », précise Katy Lessard.

Initiative alimentaire au Centre des femmes de RDP (Photo tirée de la page Facebook du Centre des femmes de RDP)

Présentement, les initiatives dont peuvent profiter les citoyens du quartier sont davantage tournées vers le dépannage alimentaire. Mais il ne faut pas oublier qu’il demeure plus important que jamais de participer à l’implantation d’une sécurité alimentaire plus pérenne, ajoute la coordonnatrice. « Avec le dépannage alimentaire, on est plus dans la réponse à un besoin immédiat, comme offrir des denrées gratuitement. En mode sécurité alimentaire, il s’agit plutôt de lutter de façon plus active contre l’insécurité alimentaire sur le long terme. À RDP, par exemple, le Centre des femmes de RDP offre un point de chute de paniers solidaires. Donc, les femmes vont acheter, à moindre coût et à chaque deux semaines, des denrées, comme des fruits et des légumes frais, de la part des marchés solidaires de Montréal. » D’autres actions gravitent autour de cette distribution de paniers, comme la proposition de recettes pour éviter le gaspillage. « Il s’agit donc d’une démarche citoyenne plus large, axée sur l’éducation en sécurité alimentaire, qui va plus loin que d’aller seulement chercher de la nourriture avec rien d’autre en contrepartie », explique Mme Lessard. 

La Table de développement social de RDP a répertorié les différentes actions disponibles en alimentation menées par divers organismes des environs « qui répondent plus particulièrement aux besoins urgents de leurs propres participants et de leurs membres ». Cependant, à Rivière-des-Prairies, il n’y a pas d’organisme dont la mission prioritaire est de lutter contre l’insécurité alimentaire, précise la coordonnatrice.

« C’est quelque chose qui fait partie de nos réflexions actuelles, qui vont se poursuivre en 2024. On est en train de réfléchir en concertation, parce qu’on est en processus de planification stratégique pour déterminer sur quoi on va travailler durant les cinq prochaines années. Je pense que le volet alimentaire est un enjeu qui, sans surprise, sera encore priorisé lors de nos rencontres avec notre communauté, parce que les demandes en matière d’alimentation explosent actuellement. »

Un pôle alimentaire pour bonifier l’offre

La CDC RDP soutient actuellement le développement d’un tout nouveau projet porteur, celui d’un mini-pôle alimentaire appelé Pôle alimentaire de la rivière (PAR), gouvernée de façon partagée par des organismes du milieu. « Le projet est encore embryonnaire, mais on a reçu du financement pour commencer à élaborer sa structure et faire l’achat de deux conteneurs qui feront office de points de service dans le pôle. » Les deux espaces qui y seront aménagés comprendront un stockage réfrigéré et un marché solidaire qui proposera des aliments accessibles à tous. « C’est une très bonne nouvelle pour les résidents de RDP. Le pôle permettra d’offrir des services complémentaires en alimentation à ce qui se fait déjà dans le quartier », indique Mme Lessard. Cette dernière a bon espoir que le pôle ouvrira ses portes au cours de la saison estivale 2024. « On a présentement un agent de développement en sécurité alimentaire qui a pour mandat premier de mettre en place ce projet. »

Bien qu’enthousiasmée par les projets à venir, Katy Lessard demeure tout de même lucide. Même après plusieurs années de lutte et un combat qui continue, l’insécurité alimentaire ne sera pas miraculeusement enrayée dans RDP, notamment parce qu’il s’agit d’un enjeu profond et complexe. « Mais ça ne veut pas dire qu’on ne va pas avoir un impact important pour la réduire dans le quartier! », conclut-elle avec optimisme.


Cette série spéciale est financée par la Corporation de développement communautaire de Rivière-des-Prairies.