FIN DES « AUTOBUS 10 MINUTES » : MOINS DE SERVICE DANS L’EST
La fin du service « réseau 10 min max » des autobus de la Société de transport de Montréal (STM) désenchante les militants du transport en commun qui anticipent des déplacements plus difficiles dans l’est de la métropole à la suite de cette décision.
Les membres de Trajectoire Québec et du Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal) étaient rassemblés à la Place des Arts hier matin pour célébrer une cérémonie funèbre à la mémoire du réseau lancé en 2010 par la STM.
« Réseau « 10 minutes maximum », je me souviens avec émotion de voyages mémorables sur tes lignes… », a ironisé Blaise Rémillard, responsable transport et urbanisme au CRE-Montréal. Ce dernier a poursuivi son éloge funèbre en énonçant le nom des 31 lignes d’autobus qui n’assureront plus un service en 10 minutes ou moins, de 6h à 21h en semaine.
En effet, la STM a annoncé un peu plus tôt ce mois-ci sur son site Internet qu’en raison de la baisse d’achalandage dans son réseau d’autobus, qui se situe aux alentours de 70 % du niveau d’avant la pandémie, elle devait réajuster son offre de service à la demande actuelle. Elle ne pourra donc plus garantir des intervalles de moins de 10 minutes sur ces lignes.
Selon les organismes défendeurs des transports collectifs, l’abandon du réseau « 10 min maximum » se traduit par une baisse de service de 11,2% sur ces 31 lignes par rapport à la promesse faite. De plus, les périodes hors pointes sont les plus touchées avec des baisses de 16,6% le jour et de 19,8% en soirée.
L’est compte sur ses autobus
Quelques minutes avant le début de la conférence, vers 7h45, une coupure de service est survenue sur la ligne verte du métro, entre les stations Pie-IX et Honoré-Beaugrand. Selon les intervenants, l’incident est venu démontrer comment les déplacements peuvent devenir difficiles pour les résidents de l’est qui se dirigent vers le centre-ville de Montréal, surtout lors d’événements météorologiques tels que la tempête de neige qui s’est abattue sur le Québec dans la nuit de mercredi à jeudi.
D’autant plus que ce sont 15 des 31 lignes d’autobus du service « 10 min max » qui desservent entièrement ou en partie l’est de la ville (voir la liste plus bas).
Il pourrait y avoir deux impacts pour les résidents de l’est à la suite de cette diminution de service, selon M. Rémillard. « Ils vont être obligés de prévoir leurs déplacements, même si on est encore dans une réduction qui touche les services de manière relativement superficielle. Les trajets sont plus espacés et on ne peut plus compter sur le 10 minutes. Alors, si on voit notre autobus passer, on est mieux de courir parce que le prochain va être dans un peu plus longtemps qu’avant », souligne-t-il.
Le second impact serait la possibilité de futures coupures dans le réseau d’autobus. « L’ARTM est devant un déficit de 500 M$; la STM, c’est 78 M$. Il faut vraiment y mettre fin, car ça pourrait se traduire par de grosses réductions de service sur certaines lignes », indique le porte-parole du CRE-Montréal.
Même son de cloche de la part de Sarah V. Doyon, directrice générale de Trajectoire Québec, qui rappelle que les gens de l’est « doivent compter sur un réseau de bus pour des trajets qui sont longs ».
« Ça fait longtemps qu’on le sait qu’il y a des besoins immenses dans l’est en matière de transport collectif. On espérait voir des projets structurants. On a eu une première proposition du REM de l’est, puis on a eu une nouvelle proposition, dont on sait encore peu de choses. Peu importe quel sera le projet structurant, on en a pour plusieurs années à attendre, donc entre-temps, il faut compter sur un réseau de bus qui est fort. Malheureusement, à l’heure actuelle, ce qu’on voit c’est qu’on réduit les services plutôt que de les augmenter », dénonce celle-ci.
« Je demeure quand même optimiste pour l’est. J’espère que les responsables du financement du transport collectif à l’hôtel de ville, à Québec et à Ottawa, vont réaliser qu’on ne peut pas reculer sur la qualité des transports dans l’est. Sinon, ce sera la congestion et cela aura des impacts écologiques, mais aussi économiques, pour le développement de l’est. Par exemple, développer le secteur industriel de la pointe de l’Île sans compter sur les transports collectifs, c’est difficile à imaginer dans un réseau routier qui est déjà saturé. » – Blaise Rémillard, responsable transport et urbanisme, CRE-Montréal
Les élus réagissent
Présents lors de la conférence, les conseillers de ville de l’opposition à MHM, Alba Zuniga Ramos et Julien Hénault-Ratelle, ont qualifié de « très dommage la décision de la STM » qui aura des impacts directs sur les citoyens de leurs districts. « Dans Louis-Riel, on peut compter sur quatre stations de métro, puis c’est l’autobus qui prend le relais. [ … ] De plus, alors qu’on vit une crise climatique et qu’on veut limiter les déplacements en auto solo [ … ] au lieu de se tourner vers la bonne direction, on prend un pas en arrière », souligne Mme Zuniga Ramos
« [ À Ensemble Montréal ] pendant la pandémie, on avait demandé de considérer la baisse de l’achalandage pour réduire les services à ce moment-là, pour éviter la situation actuelle, où l’on est en mode reprise et que les citoyens veulent revenir dans les transports collectifs, afin qu’on ne se retrouve pas dans une situation où on a une baisse du service », ajoute pour sa part M. Hénault-Ratelle.
Au cabinet de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, on indique être très attaché au service rapide de la STM, tout comme les Montréalais. « Les coupures de services, c’est la dernière chose qu’on souhaite et on envisage toutes les solutions pour rétablir le 10 minutes d’attente maximum le plus rapidement possible, indique-t-on dans un message transmis à EST MÉDIA Montréal. C’est visiblement une décision difficile de la STM qui témoigne du besoin urgent des sociétés de transport d’avoir du financement récurrent du gouvernement du Québec. Bien sûr, c’est une réalité qui touche la STM, mais aussi toutes les sociétés de transport au Québec. »
Dans son Plan Climat, l’administration Plante vise à réduire la place de l’auto solo de 25 % d’ici 2030, et le Plan métropolitain d’aménagement et de développement de la Communauté métropolitaine de Montréal prévoit hausser la part modale du transport en commun en période de pointe du matin à 35 %, d’ici 2031.
Liste des lignes d’autobus du réseau « 10 min max » qui desservent l’est
32 – Lacordaire
33 – Langelier
44 – Armand-Bombardier
45 – Papineau
48 – Perras
49 – Maurice-Duplessis
67 – Saint-Michel
69 – Gouin
97 – Avenue-Du-Mont-Royal
136 – Viau
139 – Pie-IX
141 – Jean-Talon Est
187 – René-Lévesque
193 – Jarry
197 – Rosemont