Le directeur de l’aménagement du territoire et du développement économique de Montréal-Est Nicolas Diazsko (à gauche) et le professeur Michel-Max Raynaud (à droite), entourés de plusieurs étudiants au baccalauréat et à la maîtrise en urbanisme de l’UdeM (EMM/Sophie Gauthier)

DES ÉTUDIANTS REPENSENT L’URBANISME DE MONTRÉAL-EST

Montréal-Est se transforme en laboratoire d’idées pour les étudiants en urbanisme de l’Université de Montréal (UdeM) qui imaginent des projets visant à revitaliser cette ville industrielle au fort potentiel. En effet, ce vendredi 26 avril, le centre récréatif Édouard-Rivet a accueilli l’événement « Imaginer la ville de demain ». En collaboration avec la Ville de Montréal-Est, les étudiants de la Faculté d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’UdeM ont présenté leur vision du territoire pour la communauté des Montréalestois.  

En début de session, un mandat fictif a été attribué aux 11 équipes au baccalauréat en urbanisme et aux 3 équipes à la maîtrise de gestion de projets d’aménagement. Les étudiants avaient 4 mois pour produire un projet d’aménagement urbain, sur un horizon de 25 ans, basé sur une problématique réelle du territoire (terrains pollués, zone industrielle, terrain situé en bordure du fleuve…). 

Proposé depuis 10 ans aux étudiants de l’UdeM, cet atelier les expose aux réalités du terrain : « Chaque année, nous recherchons une situation concrète avec l’accord d’une ville ou d’un arrondissement. C’est l’opportunité d’un développement urbain qui est prévu, en cours ou amorcé », explique Michel-Max Raynaud, professeur en montage et gestion de projets et vice-doyen de la Faculté d’aménagement de l’UdeM. Les étudiants des années précédentes ont déjà travaillé sur Montréal-Nord, Rosemont–La-Petite-Patrie ou encore Mercier–Hochelaga-Maisonneuve. 

Montréal-Est 2050

Cette année, Montréal-Est a piqué la curiosité de Martin Gagnon, chargé de cours à l’UdeM qui dirige l’atelier de projet urbain, lorsqu’il a vu passer Montréal-Est 2050 : « Notre formation à l’UdeM se concentre majoritairement sur un urbanisme très résidentiel. Montréal-Est nous permet de nous intéresser à un milieu industriel et de comprendre ses besoins », souligne-t-il. 

Lors de l’évènement, un kiosque de la Ville de Montréal-Est était présent pour justement présenter Montréal-Est 2050. Ce guide vise à assurer une meilleure qualité de vie aux citoyens en mettant l’accent sur le potentiel de développement de 23 millions de pieds carrés de friches industrielles, ce qui équivaut à 400 terrains de football. Actuellement, le secteur résidentiel représente 10 % du territoire de Montréal-Est tandis que 90 % est industriel. Le projet Montréal-Est 2050 souhaite développer un nombre important de friches industrielles qui sont actuellement vacantes ou sous-utilisées par des compagnies industrielles qui n’exploitent plus ces terrains, mais qui en sont encore propriétaires. La Ville a récemment adopté un plan particulier d’urbanisme pour le secteur de l’avenue Broadway : « On vise des développements mixtes avec des bâtiments résidentiels, dont certains sont des unités sociales, abordables et qui ont des commerces au rez-de-chaussée par exemple », explique Valérie Fauvel-Benoît, conseillère en urbanisme à la Ville de Montréal-Est.

Perspective de l’avenue Broadway, direction sud (Courtoisie Stantec/Montréal-Est)

Redévelopper un secteur 

Transition écologique, réduction de la consommation, gestion des eaux pluviales, zone industrielle innovante… Au cours de leur analyse urbaine, chaque groupe d’étudiants a proposé sa formulation de propositions d’interventions pour le territoire de Montréal-Est.

L’un des groupes a eu pour mandat d’aménager des habitats évolutifs pour la ville : « On a décidé d’appliquer la notion d’évolutivité à l’échelle du quartier. On a réalisé qu’il manquait de nouveaux condos et qu’il n’existait aucune option pour la population vieillissante et vulnérable. On a donc créé des habitations qui permettent aux gens d’évoluer dans le quartier sans être obligés de se déplacer à l’extérieur », explique Imane, étudiante au baccalauréat en urbanisme. Son équipe a façonné les plans de 216 logements qui respectent les normes d’accessibilité universelle. Les rez-de-chaussée sont par exemple destinés aux personnes à mobilité réduite. Chaque bâtiment compte trois étages afin de correspondre au cadre bâti environnant. Les étudiants ont également souhaité valoriser l’aspect communautaire en créant au milieu de leur îlot une place publique, pouvant accueillir un jardin et représenter un espace de rencontres pour les résidents.

Un autre mandat consistait à réorganiser la rue Sherbrooke pour l’arrivée du Projet structurant de l’est (PSE) qui vise à améliorer la mobilité de la population dans l’est et le nord-est de la région métropolitaine de Montréal, selon l’ARTM : « Il a fallu qu’on propose un réaménagement qui permette d’insérer le tramway. On a dû également réaménager les autres rues structurantes pour déployer un réseau actif avec des pistes cyclables et des trottoirs », explique Geneviève, étudiante au baccalauréat en urbanisme.

L’équipe de Geneviève (à droite) et leur projet de fin de session en urbanisme (EMM/Sophie Gauthier)

Travailler sur le terrain de Montréal-Est a représenté un certain défi pour les étudiants : « C’est un territoire avec énormément d’espaces vacants. Imaginer les terrains, l’achalandage ou encore le nombre de résidents représentait un enjeu important dans notre démarche », explique Victoria, étudiante au baccalauréat en urbanisme. 

Une seconde difficulté pour les étudiants a été l’inaccessibilité de certains terrains : « Beaucoup de sites étaient clôturés car ils appartiennent à Esso dans le cas de notre exercice. Et puis cette année, il fallait qu’on délivre notre projet à la Ville et non plus seulement juste à la faculté. Ça rajoute une pression supplémentaire », fait remarquer un étudiant au baccalauréat en urbanisme. 

Une zone sous-équipée 

Les étudiants avaient tous un but : que leur projet permette de transformer Montréal-Est en une destination privilégiée pour ses résidents. 

L’une des trois équipes à la maîtrise en montage et gestion de projets d’aménagement a commencé par dresser un constat du territoire : « Il existe un manque d’équipements important concernant les lieux de vie, les espaces culturels et commerciaux car cette ville est dominée par sa zone industrielle », explique Emmaus, étudiant à la maîtrise. Le site sur lequel son équipe a travaillé est enclavé, entouré par une zone industrielle : « Il y a une odeur de carburant omniprésente et il est placé à 20 minutes de la station Honoré-Beaugrand », raconte Emmaus. Pour pallier ces problématiques, l’équipe d’étudiants propose de réaménager la rue Notre-Dame afin que la circulation fonctionne mieux, de connecter le site avec tout l’est de Montréal grâce au futur tramway de la rue Sherbrooke ou encore de profiter de la navette fluviale pour stimuler l’aspect récréo-touristique du site. 

L’une des équipes présentes et son projet (EMM/Sophie Gauthier)

Mais le but du projet n’est pas de supprimer le caractère industriel de Montréal-Est : « On veut conserver justement ce patrimoine industriel. Un musée pourrait justement faire honneur à son histoire » confie Emmaus.

Bien que les projets des étudiants restent au stade de propositions, ils représentent parfois des pistes de réflexions pour les villes ou les arrondissements concernés : « Ces nouvelles perspectives peuvent être des idées de départ avant de devenir des projets concrets », conclut le chargé de cours Martin Gagnon.