Crédit photo : Christine Bourgier

LA DAUPHINELLE : SORTIR LES FEMMES DE LA VIOLENCE CONJUGALE

La Dauphinelle est un foyer d’hébergement dans l’est de Montréal pour les femmes victimes de violence conjugale et leurs enfants depuis 1982. L’an dernier seulement, l’organisme a accueilli pas moins de 124 femmes et 186 enfants en situation d’urgence, un record pour l’organisme. Un service crucial qui fait vraiment une différence auprès des femmes à l’est du boulevard Saint-Laurent.

Un soutien en quatre paliers

Pour aider les femmes victimes de violence physique et psychologique, La Dauphinelle offre des services sous quatre volets différents. Le premier volet, et le plus connu, est le service d’hébergement d’urgence. Le centre détient 24 places et les femmes peuvent y rester jusqu’à 28 semaines avec leurs enfants. De plus, l’organisme propose un service d’hébergement de longue durée pour les femmes subissant de la violence conjugale post-séparation. Le troisième volet de service proposé par l’organisme est de l’accompagnement après l’hébergement au centre. Quand les femmes quittent le centre, elles obtiennent de l’accompagnement afin de finaliser l’ensemble des démarches juridiques ou autres, en lien avec leurs situations. Puis, l’organisme s’active à faire de la prévention et de la sensibilisation auprès de la communauté.

L’organisme accueille des femmes de l’est de Montréal, mais aussi, de partout au Québec. Car souvent, les femmes qui quittent leur conjoint violent souhaitent s’évader dans un centre très loin de leur domicile, afin d’éviter des problèmes. Des femmes d’aussi loin que la Colombie-Britannique atterrissent avec leurs bagages à La Dauphinelle afin de trouver du secours.

COVID-19, confinement et… silence

Depuis le début de la pandémie, le centre est resté ouvert pour accueillir les femmes victimes d’abus physiques et psychologiques. Les employés du centre La Dauphinelle prennent bien sûr l’enjeu de la pandémie au sérieux. Tout est désinfecté au quart de tour.

Selon la directrice générale de l’organisme, Sabrina Lemeltier, le premier confinement a bien illustré les côtés sombres de la violence conjugale. Les responsables de l’établissement ont pu constater la situation dès le mois de mars. « Les demandes de services se font souvent par téléphone. Le téléphone sonne beaucoup, beaucoup, beaucoup à La Dauphinelle. Dès qu’on a été en confinement, le téléphone a complètement arrêté de sonner. On a tout de suite compris que les femmes ne pouvaient plus nous contacter pour avoir de l’écoute, des références ou des conseils pour partir de la maison, car elles étaient confinées avec leurs conjoints, qui pouvaient toujours garder un œil sur elles. Elles étaient séquestrées. C’était épeurant », explique-t-elle.

Pendant le premier confinement, les femmes qui ont été hébergées à La Dauphinelle sont sorties de leur demeure grâce à l’intervention de la police. Et les appels au 911 étaient principalement faits par des proches ou des voisins. Par la suite, le téléphone s’est remis à sonner, mais très tranquillement. C’est à la suite d’interventions dans les médias pour expliquer à la population que les maisons étaient sécuritaires grâce à des protocoles que le téléphone s’est remis à sonner. Aujourd’hui, la maison d’hébergement est pratiquement occupée à pleine capacité.

La société et la violence conjugale

Est-ce que la violence conjugale est un enjeu majeur dans l’est de Montréal? La réponse de la directrice générale est définitive. « La violence conjugale n’a pas de profils sociaux et elle n’est pas détectable d’une façon sociodémographique. Elle est vraiment partout. Et c’est pour ça qu’il y a plus de 100 maisons partout au Québec. »

La première chose à faire, pour les femmes qui en sont victimes, selon la directrice générale, c’est d’en parler et de ne surtout pas avoir honte. « Il ne faut plus que ça soit une honte qui pèse sur les épaules des femmes, mais bien une honte qui pèse sur les épaules des hommes qui commettent ces violences. » La directrice rappelle que 80% des victimes de violence conjugale au Québec sont des femmes. De plus, en compagnie de nos proches, c’est important d’être capable de lire entre les lignes et de ne pas se fier aux apparences, spécialement à cette époque numérique. On n’a qu’à penser au cas récent de l’influenceuse Élizabeth Rioux. « On l’a jugé sur son métier, au lieu de discuter des traits cachés de la violence conjugale. C’est grave ce qui s’est passé dans le cas de cette jeune influenceuse. Il y a des femmes et des enfants qui meurent chaque année de violence conjugale. Il faut qu’on saisisse cette réalité. Il faut dire aux femmes clairement qu’elles n’ont pas à avoir honte, qu’elles n’ont pas à avoir peur d’être jugées. Il faut mettre ce poids sur les épaules des agresseurs », affirme Sabrina Lemeltier.

Les femmes qui en ressentent le besoin peuvent appeler SOS VIOLENCE CONJUGALE au 1 800 363-9010, un service disponible 24 heures du 24. Ou encore le service Contact-Elles de La Dauphinelle (téléphone et texto) : 438 522 9264.