
(Image tirée de la page Facebook de l’arrondissement de Ville-Marie)
30 octobre 2025Ville-Marie : entre enjeux de sécurité, de cohabitation et de vie nocturne
L’arrondissement de Ville-Marie figure comme un secteur névralgique de Montréal où les enjeux sont aussi diversifiés que nombreux. Pour y voir plus clair dans les propositions des trois principaux partis, EST MÉDIA Montréal s’est entretenu avec trois candidats au poste de conseiller municipal : Christopher McCray se présente pour Projet Montréal dans Sainte-Marie, Daniel Vaudrin arbore les couleurs d’Ensemble Montréal aussi dans Saint-Marie et Sergio Da Silva, quant à lui, représente Transition Montréal dans Saint-Jacques.

Christopher McCray, candidat au poste de conseiller municipal dans le district Sainte-Marie pour Projet Montréal (Courtoisie)
Christopher McCray, climatologue chez Ouranos, souligne d’entrée de jeu l’importance de décentraliser les services offerts aux personnes en situation d’itinérance. « On doit vraiment multiplier ces services à travers la ville pour réduire un peu la pression sur le centre-ville, sur le Village, sur les secteurs du centre-sud où il y a beaucoup de ces ressources-là », dit-il.
Dans le même ordre d’idées, Daniel Vaudrin, spécialiste en marketing numérique, dénonce le réflexe systématique d’envoyer les personnes sans-abris vers le centre-ville : « Ça fait 50 ans que presque tout le Québec, quand une personne devient en situation d’itinérance, on l’envoie au centre-ville », observe-t-il. Le candidat d’Ensemble Montréal poursuit en soulignant l’importance d’avoir des services de proximité pour répondre à cet enjeu afin de ne pas déraciner la personne de son milieu : « Par exemple, si quelqu’un devient itinérant à la Pointe-de-l ’Île, il faut qu’il ait accès à des services là-bas. La raison, c’est que dans ce secteur-là, la personne a déjà un cercle social, elle a son dépanneur favori, son parc favori, elle connait des gens dans le quartier », explique ce dernier.
Quant à Sergio Da Silva, propriétaire du bar-spectacles Turbo Haüs, il met de l’avant la proposition de son parti de déclarer l’état d’urgence pour l’itinérance. Cette initiative vise à permettre la réquisition de bâtiments vacants ou d’hôtels pour y loger les personnes sans domicile fixe. « Il y a plein de bâtiments abandonnés, pourquoi les laisser vides? », s’interroge le candidat de Transition Montréal. Il poursuit : « Il y a des propriétaires qui gardent leurs locaux vides pour attendre qu’une grosse chaine américaine vienne s’y installer et paye un bail ‘’how much money?’’. Pendant ce temps, ils n’investissent pas dans les personnes qui sont dans le quartier », déplore-t-il.
Sécurité, présence policière et équipes d’intervention
L’enjeu de la sécurité publique, en particulier celle du Village, semble être parmi les principales préoccupations des résidents, selon l’Association citoyenne du Village de Montréal (ACVMtl), qui sonde annuellement ses concitoyens à ce sujet. Les résultats de ce coup de sonde pour l’année 2025 révèle que 48 % des répondants jugent que la situation s’est détériorée depuis 2024, tandis que 31 % considèrent le Village comme « pas sécuritaire du tout ».
Christopher McCray souligne l’augmentation de la présence policière sur le terrain grâce au regroupement des postes de police 21 et 22 : « C’est une quarantaine de policiers de plus qui sont disponibles, qui sont présents sur le terrain en faisant cette fusion-là », fait-il remarquer. Le candidat de Projet Montréal mentionne également la contribution de l’Équipe mobile de médiation et d’intervention sociale (EMMIS), un apport qui permet d’« un peu libérer les policiers de certaines tâches qui sont davantage liées à la cohabitation et la gestion des conflits », indique M. McCray.

Daniel Vaudrin, candidat au poste de conseiller municipal dans le district Sainte-Marie pour Ensemble Montréal (Courtoisie)
Pour Daniel Vaudrin, la solution passe tout d’abord par le déploiement sur le terrain d’équipes mixtes : « Au niveau de la sécurité, il y a plusieurs stratégies qu’on veut utiliser. La première à faire, c’est de doubler le nombre d’équipes mixtes, qui sont formées de policiers et d’intervenants sociaux. » Il poursuit : « L’avantage, c’est qu’elles (les équipes mixtes) font des interventions directement sur le terrain à la place de faire des interventions d’urgence. Ça donne une meilleure interaction entre la police et les personnes qui sont dans la rue, pour être capable de vraiment faire des meilleures interventions. »
Du côté de Transition Montréal, on propose la mise en place d’un service civil de réponse aux crises composé d’intervenants en santé et services sociaux disponible 24 h/24, une proposition motivée par le fait qu’une grande partie des appels logés au 911 sont en lien avec des problématiques non criminelles. « La plupart des fois, ce n’est pas une situation dangereuse. On a besoin de personnes qui peuvent travailler avec les personnes dans la rue, les personnes avec des problèmes de santé mentale », dit M. Da Silva. Il ajoute : « On veut faire des choses pour aider la police dans des situations où on n’a pas besoin d’elle. C’est plus facile de parler, de faire un appel à ce genre d’équipe que de demander à la police d’intervenir. Avec la police, tu ne sais jamais ce qui va arriver ».
Vie nocturne et vivre ensemble

Sergio Da Silva, candidat au poste de conseiller municipal dans le district Saint-Jacques pour Transition Montréal (Courtoisie)
La gestion – et la protection – de la vie nocturne est sans aucun doute l’enjeu qui tient le haut du pavé pour Sergio Da Silva : « La vie nocturne, c’est comme le cœur qui bat de la ville de Montréal! Il faut qu’on la défende! », s’exclame le candidat de Transition Montréal. « Il faut voir la vie nocturne comme une partie prenante de la vie montréalaise, et non comme une nuisance », insiste-t-il. Étant lui-même propriétaire d’une salle de spectacles, il critique les récentes initiatives de la Ville, notamment concernant l’insonorisation des petites salles de spectacles indépendantes : « Honnêtement, le ‘’soundproofing’’ (l’insonorisation) pour les petits spectacles, ça ne marche pas », déplore ce dernier.
Par ailleurs, Transition Montréal propose de nommer un maire ou une mairesse de la vie nocturne : « C’est une personne qui aura une ligne (de communication) directe avec le maire ou la mairesse de la Ville. S’il y a des enjeux avec la vie nocturne, s’il y a des choses qui ne marchent pas, le maire ou mairesse de la vie nocturne peut parler avec le maire ou mairesse de la Ville directement », explique M. Da Silva. De plus, Transition Montréal souhaite instaurer des zones culturelles protégées, où un certain niveau de bruit serait accepté.
Du côté des deux autres partis, le mot d’ordre pour gérer la vie nocturne, ou plutôt les plaintes liées au bruit, semble être « médiation ». En effet, Projet Montréal propose de moderniser le règlement sur le bruit en privilégiant la médiation. Cette refonte prévoit des médiateurs indépendants et des inspecteurs dédiés afin de retirer aux policiers la gestion des plaintes pour le bruit. De plus, cette nouvelle approche s’étendrait à tous les acteurs de la vie nocturne (bars, événements communautaires, salles de spectacles). De plus, le parti propose de désigner des établissements et des secteurs où il serait possible de veiller jusqu’au petit matin.
Du côté d’Ensemble Montréal, on propose de gérer les plaintes pour bruit excessif concernant une salle de spectacles par une unité administrative spécialisée afin d’éviter l’intervention des policiers. De plus, pour les plaintes visant l’ensemble des acteurs de la vie nocturne, le parti veut instaurer un processus de médiation avant d’imposer des sanctions. « On va avoir un comité pour faire le pont entre les bars, les restaurants et les gens de Ville-Marie », précise Daniel Vaudrin.
Entre les préoccupations liées à la sécurité, à la cohabitation sociale et à la vie nocturne, pour ne nommer que celles-là, Ville-Marie fait face à des enjeux bien différents de ceux des autres arrondissements. À travers les élections, les Ville-Mariens auront l’occasion de se prononcer sur la direction qu’ils souhaitent donner à l’avenir de leur arrondissement.



