L’épicerie La Collective (Courtoisie)

UNE PREMIÈRE ÉPICERIE À TARIF SOLIDAIRE DANS HOCHELAGA-MAISONNEUVE

Une nouvelle épicerie solidaire, nommée La Collective, a ouvert ses portes en janvier dernier dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Ce nouveau commerce propose une « tarification sociale raisonnée », un concept qui offre aux personnes en précarité financière une alternative accessible aux banques alimentaires et la possibilité d’acheter des aliments sains et de qualité dans un cadre accueillant.

« Une épicerie pour tous les budgets. » Tel est le slogan de la nouvelle épicerie de la rue Adam, installée dans le même bâtiment que La Cuisine Collective Hochelaga-Maisonneuve (CCHM).

Benoist De Peyrelongue, directeur général de La cuisine collective Hochelaga-Maisonneuve. (Photo: Courtoisie CCHM.)

Benoist De Peyrelongue, directeur général de La Cuisine Collective Hochelaga-Maisonneuve (Courtoisie)

Cette initiative, soutenue par l’organisme d’économie sociale et ses partenaires, a pour objectif de combattre la précarité alimentaire en proposant aux citoyens au budget serré une expérience d’achat « digne », en complément des services de dépannage déjà présents.

« Ça fait des années qu’on constate, et ça ne va pas en s’améliorant, que le coût de la vie est en train de provoquer un virage vers les banques alimentaires pour de plus en plus de personnes. Mais on n’arrivera pas à tenir la distance. L’épicerie solidaire est donc un intermédiaire qui permet de faire ses courses dans un processus d’achat adapté à notre situation. C’est aussi un outil qui permet progressivement de pouvoir sortir d’une banque alimentaire, ce qui peut être assez difficile », explique Benoist De Peyrelongue, directeur général de La CCHM. 

De tout, pour tous les portefeuilles

Les clients peuvent s’y procurer une gamme de produits variés à des prix abordables, incluant des plats cuisinés et des boîtes-repas. L’épicerie propose une section en vrac, une sélection d’aliments locaux provenant de grandes enseignes alimentaires et des légumes frais écologiques cultivés à même la ferme de La CCHM. « Les enseignes de grande distribution collaborent pour qu’on puisse offrir des tarifs hyper compétitifs, comme l’entrepôt d’alimentation Mayrand, qui œuvre de près avec nous pour qu’on y arrive », précise M. De Peyrelongue.

Les étalages de l’épicerie La Collective (Courtoisie)

Les prix des produits sur les tablettes de l’épicerie La Collective sont comparables à ceux de chaînes comme Super C ou Maxi. Le magasin n’offre cependant pas de spéciaux sur les aliments, sauf pour ceux à la limite d’être perdus. « La raison qui explique ce choix est que la tarification représente déjà un rabais qui est global sur l’ensemble du panier alimentaire du client », indique Benoist De Peyrelongue.

Les citoyens qui souhaitent soutenir l’épicerie peuvent également faire des dons de nourriture directement sur place.

L’épicerie sert de lieu d’approvisionnement accessible pour les plus démunis, mais aussi de plateforme pour la cantine scolaire avec son service de boîtes à lunch. « Nous allons lancer l’initiative à l’école primaire Baril, qui se trouve juste en face de la Cuisine Collective. Ces boîtes à lunch seront proposées à un prix très attractif, autour de 11 $, et incluront un plat, un fruit, du fromage et un yaourt. Et puis, si sur ce prix, les gens ont une tarification sociale, admettons à 50 % ou 70 %, ça commence à devenir intéressant pour un repas pour enfant », illustre le directeur général.

L’arrivée de l’épicerie permettra également, grâce à sa plateforme de vente en ligne, de mieux desservir la clientèle à mobilité réduite, tels que les aînés du quartier, par exemple.

Le modèle de la tarification sociale

Les différentes tranches de tarification sociale proposées par l’épicerie varient d’une situation à l’autre. Elles vont de 10% pour les étudiants des écoles, des cégeps et des universités et pour les employés du milieu communautaire, à 70% pour les personnes en grande précarité, entre autres celles qui fréquentent les banques alimentaires. Les tarifs sont notamment déterminés par l’entremise d’un système de référence suivi par des organismes sociaux.

« Par exemple, dès qu’un client tombe dans le 20 % de tarification sociale, on est dans un système de référencement. Les organismes du quartier, les écoles, les cégeps ainsi que les gens eux-mêmes vont orienter les personnes vers ce service. Les personnes qui ne dépendent pas d’un organisme, on va pouvoir aussi les intégrer parmi les membres de la Cuisine Collective pour pouvoir regarder quels sont leurs besoins », explique Benoist De Peyrelongue.

Les clients qui bénéficient d’une réduction de 70 %, 50 % ou 30 % n’auront pas éternellement ce rabais et devront avoir un « plan d’action mis en place avec un organisme pour les accompagner dans leur démarche pour s’en sortir », précise le directeur général. « Ça peut être quelqu’un qui utilise un rabais de 30 % de tarification sociale et qui est dans une situation précaire, pendant un temps incertain, parce qu’il a divorcé ou perdu son emploi. La personne peut donc avoir besoin d’être aidée momentanément, mais ne pas avoir envie d’aller dans une banque alimentaire », donne-t-il en exemple. 

Bien que le modèle économique de l’épicerie s’adresse plus particulièrement aux personnes à faibles revenus, l’objectif du projet était de créer un environnement agréable pour tous les individus, qu’ils soient en situation de précarité ou non. « Un lieu où l’on offre de l’aide avec une tarification sociale ne doit pas nécessairement être un endroit sombre, comme un sous-sol d’église, qui n’est pas très accueillant. On voulait mettre en place un environnement qui est sympa pour les clients », explique M. De Peyrelongue.

Plusieurs produits locaux sont offerts dans l’épicerie (Courtoisie)

Le moment d’être solidaire 

Le directeur général de La CCHM ajoute que l’incertitude générée par les décisions prises aux États-Unis concernant d’éventuelles menaces tarifaires est une raison supplémentaire pour s’unir et pour soutenir la communauté.

« Je crois que, sans que nous puissions y avoir pensé à l’avance, les insécurités amenées par les décisions au sud de la frontière nous amènent à se serrer les coudes. Et cela passe par une capacité d’agir ensemble au niveau local. Notre épicerie La Collective est un exemple parmi d’autres de la résilience nécessaire pour donner le droit à une saine alimentation pour tous avec une dignité préservée », souligne-t-il. 

Engagée dans la promotion de la production alimentaire de provenance locale, la CCHM a créé plusieurs espaces dédiés à la culture maraîchère, incluant des jardins et des serres. En 2023, l’OBNL a notamment produit pas moins de 13 tonnes de légumes, qui approvisionnent la majorité de ses activités.

D’autres épiceries prévues

La Collective est la première d’une série d’épiceries qui devraient s’installer prochainement dans l’est, espère le directeur général. L’objectif actuel de La CCHM est d’ouvrir un nouveau commerce tous les deux ans. Cependant, l’un des principaux défis reste de mettre la main sur des locaux « qui ne coûteront rien ».

Bien que le projet profite actuellement de fondations qui le soutiennent pour les deux premières années, Benoist De Peyrelongue n’écarte pas devoir bientôt frapper à plusieurs portes, « qu’elles soient gouvernementales ou institutionnelles, pour arriver à tenir la distance ». 

« Les grossistes font un effort considérable. Le municipal, le fédéral et le provincial, ils sont également présents et soutiennent le projet. Mais on est en train d’offrir quelque chose qui est nouveau, qui doit résonner encore plus, parce que ça vient jouer autour d’un droit fondamental, qui est l’accès à une saine alimentation pour tout le monde », conclut M. De Peyrelongue.


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