Martine Francke joue le personnage de Camille Arsenault dans STAT, diffusé sur Radio-Canada (Courtoisie ICI Radio Canada)

UN CAFÉ AVEC… L’ACTRICE MARTINE FRANCKE

Qu’elle interprète une infirmière au passé mystérieux dans STAT ou une mère stricte mais aimante dans Le monde de Gabrielle Roy, Martine Francke est un visage familier du petit et du grand écran québécois. Née à Montréal-Nord, elle a grandi dans un environnement propice à l’épanouissement de ses talents artistiques.

EST MÉDIA Montréal (EMM) : Vous souvenez-vous du premier film ou de la première série qui vous a marquée? 

MARTINE FRANCKE (MF) : Je me souviens de La vache et le prisonnier avec Fernandel, sorti en 1959, que j’avais vu à la télé lors d’un après-midi d’été. Dans ce film, la vache Marguerite décède et marque ainsi la première fois que je fus affectée par une oeuvre cinématographique. Je ne comprenais pas pourquoi je pleurais puisque j’avais bien conscience qu’il s’agissait d’une fiction.

EMM : Était-ce chez vous, à Montréal-Nord? 

MF : Oui, on résidait dans un duplex sur l’avenue Claude-Legault. On était cinq enfants. J’y ai vécu jusqu’à l’âge de 20 ans. Je suis ensuite partie étudier à l’école de théâtre de Sainte-Thérèse avant d’entrer finalement à l’École nationale de théâtre du Canada, à Montréal. Pour l’anecdote, je résidais dans la rue qui portait le nom de mon premier amoureux : l’acteur Claude Legault! Nous sommes sortis ensemble de nos 16 à nos 18 ans. Il a été un amour important dans ma vie. 

EMM : Avez-vous des souvenirs liés au cinéma à Montréal-Nord?

MF : Il y avait un centre de jeunesse dans le parc Saint-Laurent où j’avais pris des cours, non pas de cinéma mais de photographie. On y avait également organisé des soirées de poésie. Les animateurs de ce centre m’ont beaucoup aidée à développer tout mon plaisir de l’art. Dès que j’arrivais avec une idée, ils étaient toujours partants et très ouverts. J’ai appris énormément de choses, comme développer des photos grâce à la chambre noire du centre. Et toutes ces activités étaient gratuites! Avec Claude Legault, avec qui j’étais à l’époque, on avait même écrit un roman-photo dans ce centre. 

EMM : Montréal-Nord a-t-il eu un impact sur votre carrière artistique? 

MF : Complètement! Montréal-Nord m’a permis de devenir qui je suis aujourd’hui. L’école secondaire Henri-Bourassa, où l’on acceptait également toutes mes propositions, a aussi joué un rôle important. J’avais même créé un album de musique. J’ai également fait du ballet à l’école de danse Les Coryphées, qui n’existe plus aujourd’hui, jusqu’à l’âge de 18 ans. C’était une troupe semi-amatrice avec laquelle on avait pu se produire jusqu’en Haïti. Toutes ces expériences m’ont propulsée vers ma voie artistique. 

EMM : Films et séries télévisées réunis, vous avez participé à une trentaine de programmes. Existe-t-il un type de personnage que vous préférez interpréter? 

MF : Je ne m’attache pas à un seul type de personnage. J’aime la variété des rôles que j’interprète, chacun me permettant d’explorer de nouvelles facettes de moi-même et de mon métier. Dans 5e rang, j’interprète une femme très snobe. Dans le court-métrage Je finirai en prison, je joue une femme qui devient folle après avoir renversé une personne sur la route. Dans Le monde de Gabrielle Roy, mon personnage est une mère féministe, un peu dure, mais pleine de tendresse envers sa fille. Ou encore dans la quotidienne de Radio-Canada STAT, j’interprète une gestionnaire des infirmières qui a commis des erreurs dans le passé, mais on ne connaît pas encore lesquelles… Je jubile de pouvoir m’amuser tout en apprenant à travers cette diversité de rôles.

Martine Francke sur le plateau de tournage de la série 5e rang (Courtoisie)

EMM : Avez-vous une méthode particulière pour rentrer dans la peau d’un personnage? 

MF : Je lis beaucoup le scénario et je pose énormément de questions au réalisateur. Je m’amuse parfois à adopter la démarche du personnage dans la rue, je me renseigne sur son époque, je me questionne sur ses goûts… Parfois, je puise dans mes expériences de vie personnelles. Dans Je finirai en prison, je me suis servie de toute la rage causée par ma rupture amoureuse à cette époque pour rentrer dans le personnage. Je portais littéralement la tristesse et le sentiment de décrépitude du personnage. 

EMM : Ce rôle a-t-il eu un effet thérapeutique sur votre état émotionnel personnel lié à votre rupture amoureuse? 

MF : C’est certain. Grâce à ce film, j’ai pu exprimer tout ce que je n’osais pas dire. Il fallait que toute ma colère et ma frustration sortent. Le réalisateur me disait de crier : « Va chier! », et ça me faisait tellement de bien!

Martine Francke tient le rôle principal dans le court métrage Je finirai en prison (art et essai/Hany Ouichou)

EMM : Quelle est l’émotion la plus difficile que vous ayez eu à interpréter et pourquoi? 

MF : Je pense à la méchanceté. Des fois, c’est parce qu’on n’en comprend pas la source. Cet état peut être causé par une souffrance antérieure, et la méchanceté est une façon de se protéger. 

EMM : Vous jouez dans Le monde de Gabrielle Roy depuis 2021. En tant qu’actrice, quel est l’avantage et le défi de jouer dans une série qui dure plusieurs saisons?

MF : Le grand défi avec le personnage de la mère de Gabrielle est qu’il vieillit à travers les saisons. Elle est de plus en plus fatiguée et malade. Mais c’est justement intéressant de faire évoluer un personnage.

EMM : Avez-vous un rêve artistique en particulier?

MF : Je rêve de tourner une série sur différents continents pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, avec des acteurs de différentes nationalités. 

EMM  : Quels sont vos prochains projets? 

MF : Je vais jouer dans une pièce de théâtre Une vie de femme à ESPACE GO à partir du mois de janvier. Cette pièce est pleine de tableaux différents qui seront à la fois absurdes, touchants, drôles… Le point fort du théâtre est qu’on a le temps d’explorer notre personnage grâce aux multiples répétitions. J’ai hâte de commencer! Je serai également présente sur le petit écran dans la quotidienne STAT, dont nous tournons actuellement la troisième saison.