La Ville de Montréal subventionne maintenant jusqu’à 90 % des coûts de décontamination dans certains secteurs de l’est. Photo courtoisie Ville de Montréal.

TRANSITION VERTE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE : LA VILLE ACCENTUE L’AIDE AUX ENTREPRISES

Si les notions de transition écologique, d’innovations vertes, ou encore de développement durable sont aujourd’hui bien ancrées dans les mœurs entrepreneuriales, il n’en demeure pas moins qu’elles sont aussi synonymes de coûts élevés pour beaucoup d’organisations, qu’elles soient de nature privée ou publique. Afin d’inciter les entreprises et organismes à investir dans cette « transition », qui peut prendre diverses formes sur le territoire, la Ville de Montréal met l’épaule à la roue en bonifiant constamment depuis quelques années ses programmes d’aide financière en matière de développement durable, dans un sens large. Tour d’horizon de ces principaux programmes gérés par le Service du développement économique de la Ville de Montréal.

De l’aide qui génère des retombées importantes

Depuis près d’une quinzaine d’années, la Ville de Montréal a subventionné sur son territoire plus de 350 projets en lien avec la transition écologique des entreprises, injectant une somme qui s’élève à plus de 370 M $. Gros montant direz-vous, mais selon le Service du développement économique de la Ville, ces subventions généreront à terme des investissements privés qui pourraient avoisiner les… 2,5 G $.

Ces subventions proviennent de six programmes qui s’inscrivent dans le volet transition écologique de la vision stratégique Montréal 2030. Cinq de ces programmes sont toujours actifs et visent à soutenir des projets variés tels que la réhabilitation de terrains contaminés, la construction, l’agrandissement ou la rénovation de bâtiments occupés par des activités économiques ciblées, l’aménagement durable, le transport actif ou collectif, le verdissement, la réduction de la consommation énergétique et l’adoption de pratiques d’économie circulaire.

Projets d’aménagement, de mobilité et de pratiques durables

Un des plus récents programmes de la Ville pour accélérer la transition écologique est le programme Aménagement, mobilité et pratiques durables. Dans sa deuxième année d’activité, ce programme est certainement le plus polyvalent pour les entreprises et les organismes, offrant une possibilité d’aide financière dans un large éventail de projets en développement durable. « Ce programme fonctionne par appel à projets. Ils sont évalués selon des critères précis et sont choisis en fonction d’un système de pointage. Les projets qui obtiennent les plus hauts pointages, en lien avec leur impact environnemental projeté, sont ceux qui sont retenus. L’aide financière pour ces projets peut atteindre 50 % des coûts de réalisation », explique Alain Martel, chef de division au Service du développement économique de la Ville de Montréal.

Photo courtoisie Ville de Montréal.

On parle de polyvalence ici parce les projets peuvent tout aussi bien toucher le transport de marchandises, la gestion de l’eau, le verdissement, la réduction des îlots de chaleur, la gestion des matières résiduelles que la réduction de la consommation d’énergie, par exemple. Disposant d’une enveloppe de 8 M $, les subventions peuvent atteindre 1,125 M $ maximum. Les entreprises d’économie sociale et les entreprises de 10 employés et moins peuvent voir leur aide bonifiée de 10 % pour atteindre 60 % du coût de leur projet. « Il faut souligner que ce programme, quoiqu’il soit très polyvalent, ne s’applique pas partout, mais vise plutôt des zones stratégiques de développement pour la Ville. Dans l’est de Montréal, deux des grands territoires qualifiés sont le Secteur industriel de la Pointe-de-l’Île (SIPI) et Assomption Sud Longue-Pointe, plus d’autres zones plus petites. Sur 21 secteurs identifiés dans toute l’agglomération de Montréal, 10 sont dans l’est de l’île. Donc les entreprises et organismes qui désirent faire appel à ce programme, et il peut s’agir de projets collaboratifs inter-entreprises, doivent être situés dans ces zones », spécifie M. Martel. La deuxième période d’appel à projets pour ce programme est présentement en cours et se terminera le 30 septembre 2022. Pour les intéressés, vous trouverez plus de détails ici.

Décontamination des sols

Enjeu majeur de la revitalisation des secteurs industriels de l’est de Montréal, la décontamination des sols s’avère un véritable défi à relever pour l’administration municipale et Québec, alors que la superficie à traiter dépasserait les 40 000 000 pi2 sur le territoire selon certaines études. Les terrains d’ESSO à eux-seuls, mis officiellement en vente le mois dernier, représentent pas moins de 13 000 000 pi2.

Le secteur privé tardant à emboîter le pas, l’aide gouvernementale ne cesse de se bonifier depuis quelques années pour les propriétaires de terrains afin qu’ils accélèrent la cadence. À un point tel que dans le SIPI et Assomption Sud l’aide accordée par la Ville de Montréal peut atteindre aujourd’hui 90 % des coûts reliés à la décontamination, incluant les frais d’analyse et de caractérisation des sols, en amont des travaux. Un programme extrêmement généreux rendu possible grâce à une mise de fonds de 100 M $ de Québec destiné exclusivement à la décontamination, le réaménagement, la revalorisation ou la mise à niveau de terrains dans l’est de Montréal, une promesse électorale de la ministre responsable de la Métropole, Chantal Rouleau.

Une partie du 100 M $ permet actuellement à la Ville et à Québec de décontaminer quelques-uns de leurs terrains dans les deux zones industrielles ciblées, en vue de les rendre disponibles pour d’éventuels développements stratégiques. Une autre partie est disponible pour aider les propriétaires privés. « Il faut spécifier qu’il n’y a pas de plafond de subvention dans ce programme, donc un propriétaire qui possède un vaste terrain à décontaminer peut ouvrir la machine pour l’ensemble de ses pieds carrés. Le taux de subvention est fixé à 90 % des coûts. C’est énorme comme aide financière », affirme Alain Martel. À noter que les terrains contaminés qui ont été vendus après le 31 décembre 2017 par les pétrolières et les entreprises qui sont responsables de leur contamination ne sont pas éligibles à ce programme.

Malgré ce véritable « cadeau » aux propriétaires terriens, ce programme mis en place il y a environ deux ans ne semble toutefois pas avoir eu beaucoup d’écho jusqu’à maintenant auprès des principaux intéressés. Un problème surtout de communication selon la Ville de Montréal, qui a mis les bouchées doubles récemment pour s’assurer que les gens d’affaires des deux grandes zones industrielles soient au courant de l’existence de ce programme et de ses modalités. « On se rend compte que la décontamination des sols est un sujet complexe et qui fait peur à beaucoup de propriétaires de terrains. Ils pensent que c’est très compliqué tout ça, donc on travaille actuellement à faire en sorte qu’ils soient mieux accompagnés dans ce processus. Aussi, des firmes d’experts spécialisées peuvent prendre en main      le dossier au nom des propriétaires si ces derniers les mandatent pour ce faire », soutient M. Martel.

Alors que beaucoup de propriétaires semblent miser sur la méthode « passer au suivant » en matière de décontamination (les nouveaux projets de construction ou d’exploitation doivent s’assurer que les sols soient adéquatement décontaminés pour leur usage), le programme de subvention spécifique au SIPI et Assomption Sud changera fort probablement la donne. La plus value d’offrir un terrain décontaminé au prochain acheteur devrait largement dépasser le 10 % d’investissement minimum de la part des actuels propriétaires. « Le gain devrait être considérable pour eux à la revente, d’autant plus qu’ils pourront aussi certainement vendre plus rapidement », ajoute le chef de division au Service du développement économique de la Ville de Montréal.

Partie du Secteur industriel de la Pointe-de-l’Île (SIPI). Photo courtoisie Ville de Montréal.

Les propriétaires de terrains dans le SIPI et Assomption Sud qui désirent déposer un projet dans le cadre de ce programme ont jusqu’au 31 décembre 2023 pour le faire. Les travaux de réhabilitation devront être réalisés dans un délai maximum de 60 mois à compter de leur date d’admissibilité. Un délai supplémentaire de 24 mois pourra être accordé à certaines conditions dans le cas d’une décontamination in situ, indique la page web de la Ville dédiée à ce programme.

Pour tous les autres terrains contaminés à Montréal, en dehors du SIPI et d’Assomption Sud, il existe un autre programme de la Ville de Montréal, appuyé financièrement par Québec, qui peut défrayer jusqu’à 75 % des frais de décontamination, selon les méthodes de réhabilitation utilisées et selon les projets. Il n’y a aucun plafond également pour cette aide financière, dans la majorité des cas. Les détails de ce programme sont disponibles ici.

Bâtiment industriel : transiter vers le développement durable

Le programme Bâtiments industriels durables, dont l’ancêtre est le fameux programme PRAM-Industrie, est issu  de la stratégie de développement économique 2018-2022 « Accélérer Montréal ».

Il s’agit d’un programme incitatif « offrant une subvention correspondant à l’augmentation de la taxe foncière générale consécutive à la réalisation de travaux de construction, d’agrandissement, de rénovation ou de démolition-reconstruction qui respectent certaines conditions de développement durable. » Cette subvention est offerte aux propriétaires de bâtiments occupés par des activités économiques spécifiques dans l’agglomération de Montréal, dont l’enveloppe budgétaire dédiée est évaluée à 59,7 M $ sur 13 ans.

« Pendant trois ans, la Ville subventionne 100 % de l’augmentation de la taxe foncière générée par les travaux, 80 % la quatrième année et 60 % l’année suivante. Si les bâtiments obtiennent une certification carbone zéro, la subvention est majorée à 100 % pour la 4e et la 5e année. Le montant maximum accordé peut atteindre 1 M $ par exercice financier », affirme Alain Martel.

Toutes les activités manufacturières en général sont visées par ce programme mais d’autres secteurs économiques identifiés à haut potentiel par la Ville peuvent aussi en bénéficier. On cite par exemple le secteur aérospatial, l’industrie du jeu vidéo et du cinéma, les technologies de l’information, les firmes de génie et d’architectes, les sièges sociaux et régionaux, etc.

Rappelons que le programme PRAM-Industrie a généré de 2007 à 2018 pas moins de 1,5 G $ en investissements immobiliers sur l’Île de Montréal, alors que la Ville y a injecté sous forme de subventions quelque 160 M $. « C’est ce qu’on peut appeler un bon rapport investissement-rendement pour Montréal », conclut M. Martel. Toute l’information sur ce programme, présentement ouvert, est ici.


Le dossier spécial « Transition et innovations vertes 2022 » a été rendu possible grâce à la collaboration de :