Le député de Bourget, Richard Campeau. (Photo : EMM).

RICHARD CAMPEAU : DE L’INGÉNIERIE À LA POLITIQUE

Alors que plusieurs analystes politiques donnaient un seul comté à la Coalition Avenir Québec à Montréal lors des élections du 1er octobre 2018, soit celui de Pointe-aux-Trembles (Chantal Rouleau), l’ingénieur chimiste et semi-retraité Richard Campeau en a surpris plus d’un en coiffant au fil d’arrivée le péquiste Maka Kotto, dont le parti régnait sur le comté depuis deux décennies, offrant ainsi un deuxième et précieux gain aux troupes de François Legault dans la métropole. Rappelons que la lutte a été serrée dans la circonscription avec une victoire de la CAQ par seulement 500 voix sur le PQ, et un peu moins du double face à la candidate de Québec Solidaire, Marlène Lessard.

Après une première année complète dans le rôle de député, EST MÉDIA Montréal s’est entretenu le 20 décembre dernier avec Richard Campeau, question de recueillir ses impressions sur sa nouvelle vie professionnelle et de discuter de son bilan de l’année 2019.

Plongé dans l’action

Au début de 2018, le résident du quartier Mercier et père de deux enfants ne s’imaginait pas avec une assurance à toute épreuve qu’il occuperait le siège de député de Bourget à l’Assemblée nationale une dizaine de mois plus tard. Lorsque nous l’avons rencontré en début de campagne électorale, sur une banquette du restaurant Mikes de la Place Versailles, le candidat commençait tout juste à réaliser que les chances étaient réelles qu’il soit élu, les sondages confirmant un à la suite de l’autre la montée spectaculaire de la CAQ, et ce même si la formation politique semblait avoir plus de difficultés à Montréal.

Le candidat était toutefois visiblement bien préparé, il connaissait bien les dossiers du comté et le programme de la CAQ, et cette victoire, eh bien il la souhaitait réellement. Le citoyen déjà très impliqué dans sa communauté était « prêt à en donner plus pour faire progresser le Québec, qui souffre énormément de l’inaction des derniers gouvernements dans plusieurs domaines essentiels à son développement », nous avait-il déclaré. La retraite allait donc attendre pour l’ingénieur en chimie qui a fait une brillante carrière dans l’industrie des pâtes et papiers.

Comment a-t-il vécu son intégration à la vie parlementaire? « Plutôt bien, car les nouveaux députés sont bien encadrés lors de leur arrivée à Québec par les employés du gouvernement. On nous donne rapidement tous les outils nécessaires à la fonction, on nous installe dans nos quartiers et on nous donne des formations sur le fonctionnement de la chambre et des commissions parlementaires, par exemple. Donc de ce côté, l’intégration à l’appareil gouvernemental se fait bien et se fait rapidement, du moins cela a été le cas pour moi », affirme Richard Campeau. Ce dernier s’est dit également emballé par l’organisation « impeccable » et l’encadrement des fonctionnaires québécois lors des missions à l’étranger auxquelles il a participé en 2019 en lien avec des dossiers environnementaux, soit à Calgary, au Connecticut et en Suède. « Les documents que je voulais, on me les trouvait, et les spécialistes que je souhaitais rencontrer, ça marchait très souvent aussi. La machine est extrêmement efficace et cela m’a permis également de constater à quel point finalement ces missions sont productives pour le gouvernement. Avant j’avais des doutes sur ce genre de délégations, mais plus maintenant », soutient le député.

Le nouveau venu en politique, même s’il ne reçoit pas l’attention médiatique d’un ministre, est toutefois plongé rapidement dans plusieurs dossiers chauds du gouvernement Legault, alors qu’il se voit offrir le poste d’adjoint parlementaire du ministre Benoit Charette pour le volet de la Lutte contre les changements climatiques, et devient membre de la Commission de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles, et membre de la Commission des transports et de l’environnement. Ajouté à cela, le député doit aussi engager son équipe d’attachés politiques et installer son bureau de comté, finalement sur la rue Sherbrooke en plein cœur de Mercier. « Ce fût une grosse année de travail, il faut l’avouer. Beaucoup de dossiers à assimiler, beaucoup de monde à rencontrer et beaucoup de projets à entamer, mais c’est aussi le travail le plus intéressant que j’ai jamais eu », soutient le député.

Le seul bémol dont il nous fait part quant à sa nouvelle expérience d’élu concerne la complexité des procédures administratives de la fonction publique, lui qui a évolué pratiquement toute sa carrière dans le secteur privé. « Les procédures à Québec, c’est long longtemps parfois, mais je comprends que dans le secteur public il faut faire preuve de transparence, et ça demande souvent plus de consultations, plus de temps. Ça, ça va, mais j’ai plus de difficulté avec la paperasserie. Et ça me dérange encore (rires) », dira M. Campeau, qui plus on le découvre, plus il nous étonne avec son franc parlé et un sens de l’humour bien aiguisé. D’ailleurs, il affirme que l’une des caractéristiques qu’il apprécie particulièrement de François Legault est qu’il laisse une grande liberté d’expression aux membres de son caucus. « Les gens pensent souvent que les discussions sont très dirigées par le premier ministre, mais au contraire, les discussions sont franches dans le caucus, les députés disent ce qu’ils ont à dire sans problème sur une foule de sujets, en autant que ça se fasse dans le respect. C’est un aspect qui me plaît énormément », explique-t-il.

Premier bilan

Sur la scène locale, dans le comté de Bourget, Richard Campeau avoue que le nombre et le type de dossiers dont son équipe a eu à traiter en 2019 l’ont quelque peu surpris. « Ce sont surtout des cas plus diversifiés que je pensais. Nous avons eu évidemment un grand nombre de demandes de toutes sortes au bureau de comté, et nous en avons réglé environ 80 l’an dernier. Il s’agissait souvent de cas de détresse humaine touchant par exemple la santé, l’immigration, la justice, les aînés, mais nous avons aussi eu plusieurs demandes d’assistance au niveau commercial et au niveau communautaire », affirme-t-il. Le député a aussi été témoin d’un phénomène particulier avec des demandes provenant de partout à Montréal. « Le fait que dans l’Est de Montréal nous sommes, Chantal et moi, les deux seuls députés de la CAQ à Montréal, on reçoit alors inévitablement des demandes de d’autres secteurs, en dehors de nos comtés, et cela augmente la charge de travail. Mais c’est sûr que si c’est un dossier très local dans NDG par exemple, eh bien on les invite à aller voir leur député respectif. Une chose est sûre par contre, c’est que ce sont plutôt nos employés dans le comté qui règlent la plupart de ces dossiers, pas nécessairement les députés eux-mêmes. De là l’importance d’avoir une bonne équipe sur le terrain », explique Richard Campeau.

Est-ce que sa vision du comté a changé depuis son élection? « Définitivement, oui. C’est un secteur plus complexe dans sa démographie que je croyais, et je pense que le secteur va aussi évoluer rapidement dans les prochaines années grâce notamment à l’arrivée de nouveaux immigrants qui s’accélère, et aux transformations qui seront apportées par les plans de revitalisation de l’Est de Montréal, notamment en ce qui concerne le transport et l’industrie », soutient-il.

Au niveau de ses interventions sur le territoire durant la dernière année, le député se dit particulièrement fier d’avoir initié la rencontre citoyenne avec les intervenants de la Ville de Montréal, de la Ville de Montréal-Est et de Québec concernant la qualité de l’air dans l’Est de Montréal le 28 août dernier. « C’est extrêmement important que les résidents du secteur soient au courant des vraies données sur la qualité de l’air car il se dit beaucoup de choses à ce sujet, mais on a pas nécessairement toujours l’heure juste. Les autorités doivent être entièrement transparentes et c’est d’ailleurs dans leur intérêt de l’être, car même s’il y a évidemment des choses à faire pour améliorer la qualité de l’air dans l’Est de Montréal, je suis aussi d’avis qu’il n’y a pas lieu de paniquer avec les données actuelles. Mais il faut y travailler c’est certain », avance M. Campeau.

Toujours sur le plan environnemental, le député espère que le dossier de la construction d’un viaduc enjambant la rue Notre-Dame à la hauteur de Viau (allant s’arrimer au boulevard de l’Assomption) aura finalement l’aval des autorités en 2020, suite à l’importante consultation publique qui s’est déroulée au printemps 2019, et à la présentation du projet qui s’ensuivit en décembre dernier. Rappelons que chaque jour, quelque 2 500 camions transitent par les installations du Port de Montréal, entraînant d’importants enjeux de circulation sur la rue Notre-Dame. Le projet vise à créer un lien direct entre le Port de Montréal et l’autoroute afin d’assurer un mouvement continu des conteneurs depuis les terminaux. « Ce n’est pas un projet parfait, mais je crois que l’administration portuaire a fait pas mal de concessions dans ce dossier et qu’il faut aller de l’avant pour aider à désengorger la rue Notre-Dame, il faut passer à l’action maintenant », clame le député de Bourget.

Quant au projet d’un mode de transport structurant longeant la rue Notre-Dame jusqu’au centre-ville, Richard Campeau affirme qu’il serait grandement surpris si l’étude de la CDPQ concluait à une rentabilité d’un REM, donc la prise en charge et l’exploitation de cette infrastructure par la CDPQ. « Je pense qu’il fallait faire cet exercice, mais je suis convaincu qu’une structure plus légère, comme le tramway, serait plus réaliste. D’ailleurs une bonne partie du tracé serait déjà en place avec la friche ferroviaire de 5 km dans la Pointe-de-l’Île et il y aurait pas mal moins d’expropriations à faire, notamment, mais on verra bien ce que dira la conclusion de l’étude », soutient-il.

Finalement, sur la scène nationale, le député de Bourget affirme que beaucoup de travail a été accompli en 2019, préparant plusieurs annonces qui devraient être faites cette année et qui lui tiennent particulièrement à cœur. « Beaucoup de projets vont être dévoilés en environnement, et cela va certainement en surprendre plus d’un, du moins ceux qui croient que la CAQ est peu active dans ce domaine. On va notamment parler d’une nouvelle réglementation pour la consigne des contenants de verre et de plastique, ainsi que d’une nouvelle campagne publicitaire de sensibilisation et de mobilisation environnementale », dit-il. Le député espère de plus que le projet d’abolition des commissions scolaires se concrétise cette année, et que des annonces soient faites d’ici peu pour accélérer le programme d’infrastructures pour l’hébergement des aînés, entre autres. « Il y a des projets de rénovation majeurs dans le comté qui devraient être annoncés pour l’hébergement des aînés, j’y tiens et ce sera certainement un de mes dossiers prioritaires en 2020 », conclut Richard Campeau.