RECONSTRUCTION DE L’HÔPITAL MAISONNEUVE-ROSEMONT : LENTEMENT MAIS SÛREMENT
Reconstruire et agrandir significativement un hôpital de l’ampleur de Maisonneuve-Rosemont demande, on s’en doute, une planification multi-étapes très complexe. Et construire sur le site même du centre hospitalier rend les choses encore plus compliquées. Jean-François Fortin-Verreault, président-directeur général (PDG) du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, fait le point sur ce grand projet.
Rencontré à la fin octobre dans ses quartiers situés au pavillon Rachel-Tourigny, juste derrière le cruciforme, Jean-François Fortin-Verreault était visiblement prêt à donner l’heure juste sur la sensible question de la reconstruction de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR), entrevue prévue dans le cadre de notre présent dossier Est en développement. Rappelons que le méga projet, qui devrait dépasser les 4 milliards d’investissements publics, prévoit un nouveau centre hospitalier universitaire de 720 lits en chambre individuelle, alors que le présent bâtiment compte au total 450 lits. S’il reste encore au gouvernement québécois des ficelles à attacher quant au budget final, le PDG du CIUSSS demeure convaincu que le projet annoncé sera bel et bien construit tel que prévu et ce « dans un échéancier normal pour ce genre de chantier majeur. » Et Jean-François Fortin-Verreault n’est pas un néophyte en la matière, car rappelons que c’est lui qui a mené l’important chantier de transformation du nouveau CHUM.
Étape par étape
Comme mentionné plus haut, construire un nouvel hôpital sur un site déjà occupé comme celui de HMR n’est pas une mince affaire. Le nouveau bâtiment, qui remplacera le vieux cruciforme, viendra gruger une bonne partie du stationnement actuel déjà fort achalandé. Pour dégager le terrain, il faut donc construire avant tout un nouveau stationnement étagé. Les plans et devis de construction étant maintenant réalisés, le CIUSSS est sur le point de lancer les appels d’offres pour trouver les firmes qui réaliseront le projet. « On prévoit que la construction du stationnement débutera au printemps 2025, avec 1,5 an à 2 ans de travaux », indique le PDG. Dans la planification de l’ensemble du projet, ce stationnement demeure réservé aux employés de l’institution, alors que les visiteurs et les patients auront accès à quelque 1 100 cases de stationnement qui seront situées sous le prochain hôpital.
Mais qu’en est-il de l’avancement du projet de construction du nouvel hôpital, le bâtiment principal? « On a réussi à consolider toute la programmation clinique et à finaliser le plan général d’occupation du site avec l’ensemble du bâtiment. Nous avons un design préliminaire du futur bâtiment, et maintenant, on entre vraiment dans la conception finale du modèle général du futur hôpital, avec des modélisations qui vont se raffiner au fur et à mesure (échelles de 1/200, 1/100, 1/50, etc.) », explique M. Fortin-Verreault. Ainsi, la direction du CIUSSS finalise en ce moment l’arrimage des infrastructures avec sa vision de ce que sera l’offre de services clinique dans les prochaines décennies sur le territoire, mais aussi avec la prévision de ce que seront les environnements physiques et technologiques de demain, du moins autant que faire se peut. « Il faut anticiper 10, 20 et même 30 ans en avant lorsqu’on planifie un nouvel hôpital comme Maisonneuve-Rosemont, c’est vraiment beaucoup d’études, beaucoup de spécialistes impliqués. Pensez seulement à ce que sera l’intelligence artificielle et les objets connectés… Mais ça, c’est presque complété aujourd’hui. Nous en sommes vraiment à l’étape de modélisation des nouvelles infrastructures », ajoute le gestionnaire. Il rappelle par ailleurs qu’un tel projet demande des travaux importants et une planification exhaustive de la part de fournisseurs publics comme la Ville de Montréal (égouts, aqueduc, etc.), ou Hydro-Québec (puissance nécessaire, nouveaux équipements, etc.). « C’est un aspect important dans le calendrier de réalisation, mais les gens ne pensent pas nécessairement qu’il faut aussi faire ça quand on parle du nouvel hôpital », spécifie-t-il.
Alors, la question qui tue : quand peut-on espérer l’ouverture du nouvel hôpital, concrètement? « Je ne m’avancerai pas sur un échéancier à cette étape-ci. Il y a trop d’éléments qui sont encore en conception et en discussion. Ce que je peux dire, c’est qu’habituellement, quand tous les plans sont terminés, quand les appels d’offres pour la construction sont partis, un projet de cette envergure-là prend cinq ans à construire », affirme Jean-François Fortin-Verreault.
Rappelons que les récents ajouts des dernières années, l’urgence, le centre ambulatoire, le centre de dialyse, etc., seront évidemment tous intégrés au nouveau complexe hospitalier. La reconstruction d’HMR touche presque exclusivement le bâtiment en forme de cruciforme.
Santa Cabrini
Il y a aussi de grands projets à l’Hôpital Santa Cabrini, ceux-ci en étant à la phase construction en ce moment. Il s’agit principalement de l’ajout d’un bloc opératoire moderne avec son unité de retraitement des dispositifs médicaux. Ce nouveau bloc, dont l’ouverture est prévue dans un peu plus d’un an, accueillera des salles adaptées notamment pour l’orthopédie, la chirurgie digestive et la chirurgie bariatrique. À noter que cette infrastructure ainsi que la construction en cours de deux maisons des aînés dans l’est de Montréal seraient parmi les seuls projets au Québec, sinon les seuls depuis les chantiers planifiés au début de la pandémie, à respecter à la fois les budgets établis ainsi que les échéanciers, selon la direction du CIUSSS.
Pour son PDG, l’occasion est bonne de rappeler l’importance des fondations dans ces projets, une aide qui passe souvent inaperçue aux yeux du public. « Santa Cabrini a une fondation exceptionnelle qui est animée par la communauté italienne de Montréal. Sur un budget total de 150 M$ pour le nouveau bloc opératoire, 10 M$ proviennent de la fondation. C’est un engagement extraordinaire », dit-il.
Pas de Zone d’innovation en santé dans l’est, mais…
Avec comme point central l’une des grandes spécialités d’HMR, la thérapie cellulaire, le CIUSSS comptait bien avec quelques partenaires du privé arriver à décrocher le statut de Zone d’innovation, une création du gouvernement Legault, et surtout obtenir les dizaines, voire les centaines de millions d’investissements qui finissent généralement par s’y greffer. Malheureusement, Pierre Fitzgibbon a confirmé que ce projet ne se ferait pas, et ce, quelques jours avant la tenue du Sommet de l’Est en novembre dernier. Si la déception était grande, Québec s’était toutefois engagé à soutenir certaines innovations dans un contexte hors zone d’innovation.
Aujourd’hui, le PDG du CIUSSS avoue se sentir plutôt fier d’annoncer que le développement du projet en thérapie cellulaire se poursuit. « Actuellement, nous avons obtenu l’autorisation de Santé Canada de produire commercialement des produits de thérapie cellulaire. Ça nous permet du même souffle d’obtenir notre licence européenne d’exportation et, dès l’an prochain, nous commencerons l’exportation à l’international à partir de notre centre d’excellence. On le fera avec deux entreprises associées au projet, soit Excellthera, fondée par un hémato-onconlogue d’ici, Guy Sauvageau, et C3i, un centre d’immunothérapie du cancer, créé par les docteurs Denis-Claude Roy et Lambert Busque, tous deux d’HMR », avance Jean-François Fortin-Verreault.
Maisons des aînés et autres infrastructures
Deux maisons des aînés sont en construction actuellement dans l’est de Montréal. Il s’agit en fait de la reconstruction complète de deux centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) vétustes, dont Jeanne-Le Ber situé derrière l’Institut universitaire de santé mentale de Montréal, et d’un autre bâtiment qui viendra remplacer le CHSLD Nicolet. Ce dernier, situé actuellement dans Hochelaga, sera bientôt relocalisé au coin des rues Dickson et Sherbrooke. « Avec les deux maisons des aînés et le nouveau bloc opératoire de Santa Cabrini, on parle d’un budget d’infrastructures qui approche les 700 M$. C’est majeur comme investissement gouvernemental », affirme M. Fortin-Verreault.
Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal compte sur son territoire une cinquantaine de points de services et donc tout autant d’infrastructures à maintenir. Selon son PDG, la dernière année en a été une record en termes d’investissements internes dans le réseau avec plus de 100 M$ de projets de diverses envergures, allant de portes et fenêtres à remplacer à l’aménagement d’une salle de médecine nucléaire à l’HMR.