Une image de synthèse du PSE (Courtoisie ARTM)

PSE: LE TRAMWAY DE L’EST OFFICIELLEMENT LANCÉ

Le tant attendu Projet structurant de l’Est (PSE) est lancé. Le gouvernement du Québec a donné son aval à la dernière mouture mise de l’avant par l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), qui préconise la création d’un réseau de tramway. La classe politique et la société civile de l’est de la métropole ont réagi à l’annonce officielle mercredi.

Le parcours mis de l’avant par l’ARTM, qui envisage deux branches reliant Montréal-Nord ainsi que Repentigny (en passant par Pointe-aux-Trembles et Montréal-Est) au réseau du métro de Montréal, est au programme. Le coût total de cette proposition est de 18,6 milliards et inclut les coûts de construction de 6,7 milliards. Le tracé projeté compte 31 stations réparties sur un parcours de 38 km. Les études d’achalandage de l’ARTM évaluent le nombre de passagers quotidien à 97 000 passagers d’ici 2036.

Le tracé final du PSE proposé par l’ARTM (Courtoisie)

En attendant que Mobilité Infra Québec (MIQ) soit pleinement opérationnelle, l’ARTM sera chargée de lancer les premières étapes du projet, en mode collaboratif, en procédant, entre autres, à des appels d’offres et en travaillant avec des experts en finance, en droit et en ingénierie afin d’encadrer le projet. Dès cet automne, un appel d’intérêt permettra de recueillir les commentaires du marché à propos de la stratégie prévue. MIQ prendra ensuite le relais au début de 2026 en lançant un appel de qualification, puis un appel d’offres pour le responsable de la construction est au programme pour le printemps 2027.

Réactions dans l’Est

La mairesse de RDP–PAT, Caroline Bourgeois (Courtoisie RDP–PAT/MOCA)

À la Ville de Montréal, on est enthousiaste d’avoir enfin un plan d’action clair. « Jusqu’à présent, on était un peu dans le néant sur la suite des choses. (…) C’est une excellente nouvelle parce que désormais, on a un plan de match », a insisté Caroline Bourgeois, mairesse de Rivière-des-Prairies—Pointe-aux-Trembles et responsable du dossier de l’est au comité exécutif de la Ville de Montréal.

Celle-ci s’est aussi réjouie que le tracé choisi pour le tramway inclut une branche dans le quartier de Rivière-des-Prairies. « C’était pour moi un enjeu majeur en tant que mairesse, parce que ce secteur n’est pas assez bien desservi au niveau des transports », indique-t-elle.

À Montréal-Est on se dit heureux de voir que le territoire de la ville ne sera pas mis de côté. « L’arrivée d’une station de tramway à Montréal-Est est à elle seule une excellente nouvelle. J’accueille donc très favorablement l’annonce récente du gouvernement du Québec, qui va de l’avant avec la plus récente mouture du Projet structurant de l’Est », a partagé Anne St-Laurent, mairesse de Montréal-Est.

Anne St-Laurent, mairesse de Montréal-Est (Courtoisie)

Il s’agit donc d’une étape importante pour donner vie au projet de transport collectif nécessaire pour desservir cette municipalité indépendante de l’est de l’île et pour optimiser son « potentiel de redéveloppement ».

« Que ce soit en termes de mobilité durable ou d’attractivité, pour nos citoyens comme pour les futurs projets de développement en préparation, le projet de tramway sur rails, qui inclut une connexion à plusieurs stations du métro de Montréal, est synonyme d’amélioration », poursuit-elle.

Pour sa part, la Chambre de commerce de l’est de Montréal (CCEM) s’est réjouie de l’annonce, alors qu’elle demande depuis plusieurs mois que le gouvernement lance les premières démarches pour mettre en route le projet.

Jean-Denis Charest, PDG de la CCEM. (Courtoisie CCEM)

« C’est une bonne nouvelle. (…) Avec l’arrivée de Mobilité Infra Québec, le processus est un peu différent, mais essentiellement, ce qu’on fait là, c’est qu’on va de l’avant. On est également heureux qu’on n’attende pas que MIQ soit pleinement opérationnel pour avancer et que l’on confie le mandat à l’ARTM dès maintenant pour ne pas perdre de temps », souligne Jean-Denis Charest, président-directeur général de la CCEM.

Celui-ci salue aussi la décision du gouvernement d’aller de l’avant avec un modèle collaboratif, qui impliquera la participation du secteur privé. « C’était une des demandes de la Chambre. On voulait qu’on mette à profit l’expertise du secteur privé afin de maximiser la performance du projet », renchérit-il. M. Charest note que le chantier du remplacement de la toiture du Stade olympique présentement en cours démontre l’efficacité de ce modèle.

Pour la CCEM, il n’était plus possible d’attendre pour la mise en place d’un projet structurant en transport dans l’est, particulièrement dans un contexte économique incertain. Attendre après le lancement du tramway signifiait mettre sur la glace plusieurs autres chantiers sur le territoire, tel que celui de la réfection de la rue Notre-Dame.

Avancer le plus rapidement possible

Selon la députée de Pointe-aux-Trembles pour la Coalition avenir Québec, Chantal Rouleau, il a été judicieux de laisser l’ARTM prendre en main le montage des appels d’offres en attendant que MIQ soit sur pied, afin « d’avancer le plus rapidement possible ».

Chantal Rouleau, députée de Pointe-aux-Trembles (Courtoisie)

« On est aussi heureux d’y aller avec le modèle collaboratif. Avant, lorsqu’on faisait de tels projets, il y avait des appels d’offres, mais le gouvernement était responsable de gérer les dépassements de coûts lorsqu’il y en avait. En y allant en mode collaboratif, la responsabilité des échéanciers et des coûts est partagée avec les partenaires. C’est un modèle qui fonctionne bien et on l’a vu dans le passé », insiste Mme Rouleau.

L’élue croit que le projet mis sur la table est « une excellente nouvelle » qui permettra de désenclaver l’est montréalais et la région de Lanaudière dans les meilleurs délais. À savoir si le format du tramway et le tracé proposé desserviront adéquatement ces territoires, la députée croit qu’il ne faut pas être fermé aux suggestions qui pourraient être formulées en cours de route si elles améliorent réellement le projet.

Projet « Frankenstein »

De son côté, Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville, est plutôt pessimiste quant à l’approche adoptée par le gouvernement et qualifie même les plans mis de l’avant de « projet Frankenstein ».

Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville. (Photo: Emmanuel Delacour/EMM.)

Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville (Emmanuel Delacour/EMM)

« On dirait qu’on fait un projet pour faire un projet, pour cocher des cases pour les différents politiciens. Pour le gouvernement Legault, cela permet de dire qu’on a tenu une promesse de 2018 et qu’on va en donner aussi à Repentigny. Pour Valérie Plante, qui n’a jamais réussi à faire la ligne rose, elle pourra dire qu’elle aura pu au moins avoir quelque chose. On arrive avec une approche par projet qui n’est pas basée sur une planification et de véritables consultations et différents scénarios qui ont été analysés », se désole-t-il.

Ce dernier croit que la mouture finale présentée par l’ARTM en février 2024 ne desservira pas adéquatement l’est de Montréal, offrant peu d’avantages comparativement à un prolongement des lignes de métro. La seule exception : les résidents de Rivière-des-Prairies et de Montréal-Nord bénéficieront d’un nouveau système de transport qui viendra désenclaver leurs quartiers.

La plus grande faiblesse du tramway de l’est tel qu’il a été présenté cette semaine est sans doute les temps de déplacement qui ne sont pas satisfaisants, affirme M. Savard. « On l’a démontré avec l’étude de Marco Chitti, les temps de déplacement ne vont pas changer [avec cette option], sinon même augmenter, en raison des transferts [intermodaux]. »

« C’est un peu troublant de voir tout le monde foncer la tête baissée, alors qu’il reste encore beaucoup de questions en suspens », ajoute-t-il.

Le directeur général de Vivre en Ville aurait souhaité que les porteurs du projet puissent examiner d’autres options, préférablement hybrides, c’est-à-dire qui auraient compris des prolongements du réseau de métro en plus d’un système de tramway.