(Emmanuel Delacour/EMM)

UN PLAN POUR CONTRER LA PRÉCARITÉ ALIMENTAIRE DANS MHM

Comment améliorer l’accès à une alimentation durable, locale et abordable à Montréal? Dans l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve (MHM), on mise sur la création d’une communauté nourricière afin d’y parvenir, alors que la précarité alimentaire est de plus en plus criante.

Depuis le mois d’avril, des consultations publiques ont été lancées pour mettre en place un Plan de développement d’une communauté nourricière (PDCN) dans cet arrondissement de l’est où vivent plus de 140 000 citoyens. Un PDCN est un exercice de planification qui vise à développer un système alimentaire local et à le mettre en valeur. Le gouvernement du Québec a mis à la disposition des administrations municipales un guide pour l’élaboration de tels systèmes et le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) subventionne à la hauteur de 50 000 $ les démarches de MHM en ce sens.

Esther Tremblay et Flavia Ioana Muresan, conseillères en planification à MHM. (Courtoisie MHM)

Pour atteindre un modèle de production et de consommation alimentaires plus résilient et durable, il faut tout d’abord se pencher sur chacun des liens qui se trouvent dans cette chaîne. C’est donc avant tout un effort rassembleur que l’arrondissement préconise. « L’objectif des consultations du PDCN est de rassembler les différents acteurs qui travaillent dans le système alimentaire au sein de l’arrondissement. Ça va de la production jusqu’à la consommation, en passant par la distribution et la gestion des matières résiduelles », explique Esther Tremblay, conseillère en planification en développement durable à MHM.

Tout au long de 2024 et jusqu’au printemps 2025, moment de l’adoption du plan, MHM organisera donc des consultations et des ateliers avec les citoyens, mais aussi avec les organismes, les entreprises et les institutions impliqués dans la chaîne alimentaire. « Pour que le plan soit mobilisable et collé sur la réalité des organismes et des acteurs sur le terrain, c’était important de s’appuyer sur une démarche de consultation tout au long de l’élaboration du plan », souligne Flavia Ioana Muresan, aussi conseillère en planification à MHM.

Précarité alimentaire

L’initiative réjouit les organismes interrogés par EST MÉDIA Montréal, qui soulignent que les besoins sont importants en matière d’alimentation saine et abordable dans MHM.

« C’est criant. On a de plus en plus de gens qui sont dans une précarité alimentaire avancée. Il y a une augmentation de cette population vulnérable. Parce que même avec un revenu, face à l’inflation et des loyers avec des augmentations galopantes, ces gens ne sont plus capables de joindre les deux bouts », souligne Thierry Bachelier, directeur général (DG) du Réseau Alimentaire de l’Est de Montréal (RAEM). Ce dernier note aussi que des organismes, qui auparavant n’avaient pas de mission alimentaire, versent désormais dans une aide en ce sens, tellement la demande est forte. « On a des groupes d’aide aux devoirs qui s’improvisent comme banque alimentaire, tellement la situation est dramatique à certains endroits. »

Le constat est le même au Chic Resto Pop, situé dans Hochelaga-Maisonneuve. L’organisme qui offre des repas abordables à toute sa clientèle a vu son achalandage croître de 61 %, depuis les 2 dernières années. « Avant, on avait une clientèle surtout composée d’aînés, de personnes seules et vulnérables. Désormais, on voit de tout : des familles, des personnes qui ont un emploi et qui se tournent vers nos repas à 4,50 $ pour y arriver, parfois plusieurs fois par semaine », affirme Marc-André Simard, DG du Chic Resto Pop.

La mise en place d’un PDCN est tantôt « ambitieuse », selon M. Bachelier, tantôt « emballante » selon M. Simard. Les deux organismes sont activement impliqués dans la démarche, qui pourrait porter ses fruits une fois à terme. Le DG du Chic Resto Pop entrevoit, par exemple, la création de plus d’espaces d’agriculture urbaine sur le territoire et un meilleur soutien à la sécurité alimentaire, tandis que M. Bachelier souhaite qu’on « éveille » les citoyens à l’importance d’une saine alimentation.

Pour Thierry Sénécal, chef de section à la transition écologique et résilience à l’arrondissement de MHM, une communauté nourricière pourrait en effet améliorer la littératie alimentaire des résidents, par l’entremise d’ateliers de cuisine, par exemple.

Quoi qu’il en soit, il faudra adapter le plan aux divers secteurs de MHM, un territoire qui, avec ses 25,4 km2, rassemble des réalités diverses. « On a des déserts alimentaires, où l’accès à de la nourriture fraîche et saine est faible, mais on a aussi ce qu’on appelle des « marécages alimentaires », soit des zones où il y a un plus grand accès à de la nourriture, mais de piètre qualité, comme de la restauration rapide et de la malbouffe », illustre M. Sénécal.