Église Très-Saint-Nom-de-Jésus (photo EMM).

Le patrimoine religieux de MHM en péril

Lettre d’opinion – 25 février 2021 – Atelier d’histoire MHM

L’Atelier d’histoire Mercier-Hochelaga-Maisonneuve se préoccupe du sort de certaines églises patrimoniales sur le territoire de l’arrondissement. Nous vivons actuellement une crise sans précédent en matière de protection de notre patrimoine. Les rares interventions de l’État québécois se font en situation de crise alors que la Loi sur les biens culturels devrait imposer des balises claires ainsi qu’un programme permanent de subventions à la rénovation. Plusieurs municipalités, en particulier celles moins peuplées, se déresponsabilisent devant l’offensive des promoteurs immobiliers qui imposent des projets défigurant le paysage urbain avec promesses d’enrichissement en taxes foncières. La protection du patrimoine et la densification sont des concepts souvent incompatibles, d’autant plus que les municipalités ne connaissent à peu près pas le nombre et l’importance de leurs bâtiments patrimoniaux.

Un secteur de notre patrimoine est particulièrement touché, le patrimoine religieux catholique. On y découvre une action gouvernementale timide et désorganisée qui par les résultats que l’on observe depuis quelques années, contribue à la disparition de ce patrimoine exceptionnel qui a pourtant structuré la société québécoise jusqu’à tout récemment dans son histoire. Les sommes versées par le Conseil du patrimoine religieux ne visent pas la pérennité des lieux de culte. En 25 ans, seulement 514 millions de dollars ont été investis alors qu’il en faudrait davantage annuellement. L’argent est parsemé sans plan global et les paroisses évoluent dans un climat de concurrence pour l’obtention des subventions. Bien entendu, toutes les églises ne peuvent être sauvées puisqu’elles sont trop nombreuses. Ces derniers temps, il appert que l’Archidiocèse de Montréal est devant une catastrophe annoncée quant à la viabilité et la condition physique de ses églises âgées. Il doit faire des choix, car le nombre d’églises par quartier ne correspond plus à la réalité de la pratique. Dans Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, trois églises sont dans un état de dégradation avancé: Très-Saint-Nom-de-Jésus, Saint-Clément de Viauville et Notre-Dame-des-Victoires. Certaines d’entre elles n’arrivent même plus à payer les coûts fixes, ce qui les condamne à la fermeture. Les autres églises patrimoniales de l’arrondissement comme Très-Saint Rédempteur, Nativité d’Hochelaga, Saint-Jean-Baptiste de Lasalle et Sainte-Louise-de-Marillac n’ont pas un avenir reluisant non plus.

Après la fermeture des paroisses Très-Saint-Nom-de-Jésus et Saint-Clément de Viauville en 2009, l’Atelier d’histoire Mercier-Hochelaga-Maisonneuve est intervenu au sein d’un comité de sauvegarde mis sur pied par la députée d’Hochelaga-Maisonneuve, Carole Poirier, dont le but était de protéger l’orgue exceptionnel de l’église Très Saint-Nom-de-Jésus et de rouvrir cette paroisse avec un projet culturel. À cette époque, l’Archidiocèse, dirigé par monseigneur Jean-Claude Turcotte, envisageait le déménagement de l’orgue dans une église torontoise. Le comité de sauvegarde, qui a obtenu une couverture médiatique pancanadienne, a finalement eu gain de cause. L’église Très-Saint-Nom-de-Jésus est rouverte depuis 2014. Mais aujourd’hui, la menace d’une nouvelle fermeture n’est pas dissipée, faute de moyens. Un constat s’impose; l’Archidiocèse est dépassé par la gestion de ses églises et leur conversion à des fins privées est trop risquée. L’État doit donc être le gardien de la mémoire collective et des bâtiments significatifs dans l’histoire québécoise. Un plan d’intervention doit être mis en place avec la collaboration des acteurs locaux.

Réjean Charbonneau
Pour le conseil d’administration