MONTRÉAL-NORD : HISTOIRE DE LA PAROISSE SAINT-VITAL
Monseigneur Georges Gauthier du diocèse de Montréal fonde, en 1923, la desserte Saint-Marguerite-Marie pour les paroissiens habitant entre le boulevard Pie-IX et la montée Saint-Michel. Le 4 novembre 1926, cette desserte devient la deuxième paroisse de Montréal-Nord (la première étant Sainte-Gertrude) et porte le nom de Saint-Vital. Dans la brochure du 50e anniversaire de fondation, on peut y lire : St-Vital était militaire et père des saints martyrs Gervais et Protais. Il vint à Ravenne au moment où Ursicus, médecin chrétien, allait apostasier; il le fortifia par ses paroles; mais saisi lui-même par le juge furieux, il fut brûlé vif. Sa fête se célèbre le 4 novembre.
L’abbé Charles Pilon
L’abbé Charles Pilon (1881-1947) est nommé curé fondateur de cette paroisse et entre en fonction le 26 novembre 1926. Dans la chapelle installée dans la salle de récréation de l’école Viel (par la suite nommée Nicolas Viel), il célèbre une première messe le 29 novembre et avant la fin de l’année il bénit le premier mariage de cette nouvelle paroisse ainsi que le premier baptême. Il y célèbre également les offices religieux du temps des Fêtes et de la nouvelle année. « Les pionniers qui l’ont connu nous parlaient de lui avec admiration devant ses qualités remarquables de fondateur, doué d’une remarquable éloquence de prédicateur. Il parlait toujours sans aucune note en main; il arrivait souvent qu’il aille prêcher à l’extérieur sur l’invitation d’autres paroisses, et même au pénitencier de St-Vincent-de-Paul ainsi qu’à la prison de Bordeaux » (extrait de la brochure du 50e anniversaire). Il décède à l’Hôtel-Dieu de Montréal à l’âge de 65 ans.
L’église Saint-Vital
C’est en décembre 1926 que des architectes sont choisis pour préparer les plans de la future église et du presbytère. En avril 1927 on conclut des ententes financières, des contrats sont accordés et on entreprend la construction de l’église et du presbytère. Entretemps on planifie l’achat des bancs, des confessionnaux, de la chaire et diverses boiseries qu’on choisit en bois noble : le chêne rouge. Sans oublier le chemin de croix, la table de communion, les luminaires, les détails de la décoration et tous les accessoires indispensables aux cérémonies pastorales. On organise une tombola dans le but d’amasser des fonds principalement pour l’acquisition des bancs car ils ont coûté cher, ils sont confortables, il faut rester aux cérémonies jusqu’à la fin, disait le curé Pilon. Une autre tombola « spéciale » est organisée par les ligueurs du Sacré-Cœur, l’objectif étant d’acheter un orgue pour remplacer, à l’église, l’harmonium des débuts. L’harmonium accompagne la chorale de 22 choristes qui avait été fondée en novembre 1926. Les travaux de construction se terminent en novembre 1927 et durant la journée du dimanche 27 novembre, quatre messes sont célébrées pour souligner l’ouverture de la toute nouvelle église Saint-Vital. Le 15 septembre 1929, Mgr Georges Gauthier procède à la « bénédiction solennelle » de l’église.
Le 4 mai 1948, deux nouvelles cloches viennent s’ajouter au carillon l’Adoré. D’un poids de 1051 livres, la première porte le nom de Marie, tandis que la deuxième se nomme Anne et pèse 400 livres. Elles sont bénies par son Éminence le Cardinal Paul-Émile Léger selon le rituel romain. Pour sonner le carillon, il faut accéder au jubé où attend un câble relevé de quelques nœuds pour permettre une bonne prise, afin de faire basculer les cloches qui émettent respectivement le Do, le La et le Ré. Le clocher est maintenant bien garni pour appeler les paroissiens aux offices, leur rappeler l’heure ou annoncer un décès.
Déménagement du presbytère Saint-Vital
La population s’accroit et l’église a besoin de plus d’espace. En 1961 et 1962, un projet d’agrandissement de 200 places dans l’église et la construction d’un nouveau presbytère se concrétise. Des esquisses et des plans sont proposés et approuvés. Le bâtiment du presbytère est vendu au prix symbolique de 1 $ et le nouveau propriétaire le déménage en 1962. Le Patrimoine culturel du Gouvernement du Québec le déclare site historique. Ce bâtiment sera éventuellement transformé en hôpital pour convalescents. Les prêtres y habitent jusqu’à ce que le nouveau presbytère soit prêt à les recevoir. Les travaux débutent en octobre 1962 et se terminent en septembre 1963. Mgr Paul-Émile Léger bénit la nouvelle aile le 11 juin 1964.
En 1964 la paroisse reçoit les reliques de Saint-Vital, ainsi que celles de Saint-Zénon et de ses compagnons martyrs. Des reliques authentiques offertes par la chancellerie de Montréal. Elles sont consacrées par Mgr Paul Grégoire et insérées dans le sépulcre de la table du maître-autel. Au début de l’année 1972, une assemblée des paroissiens est convoquée au sujet du nettoyage de l’église et de l’aménagement du chœur. On refait une beauté au lieu saint; tout l’intérieur est peint de nouveau et le chœur complètement transformé.
Depuis l’ouverture le 27 novembre 1927, l’ajout de Marie et Anne au carillon et des précieuses reliques en 1948, les rénovations et le nouveau presbytère en 1962, différents curés se sont succédés jusqu’au 24 juin 2012 où une dernière messe est célébrée. L’église Saint-Vital est vendue à la communauté culturelle, la mission catholique Notre-Dame d’Haïti.
Communauté de la paroisse Saint-Vital
Montréal-Nord se développe rapidement, car il offre des terrains à « de très bonnes conditions et à la portée de toutes les bourses. Les règlements de construction sont très accommodants ». La population s’accroit conjointement avec, bien sûr, les besoins. La fondation de cette nouvelle paroisse fortifie les liens entre voisins qui aspirent à une communauté rassembleuse et vivante et dès le début la vie paroissiale est très active.
La salle de récréation de l’école Viel sert de chapelle et de lieu d’activités communautaires. En 1926, une chorale est fondée, 22 choristes y participent. Ils sont présents lors des grand-messes, mariages, funérailles et surtout lors des fêtes religieuses. Régulièrement et conjointement avec la chorale de Sainte Gertrude, des concerts tels l’oratorio Les sept paroles du Christ sont présentés. Les directeurs de la chorale organisent annuellement des voyages à partir de 1928. Le Cercle dramatique invite également la population à leurs soirées culturelles. Le divertissement populaire y a aussi sa place selon une affiche de juin 1936 du « spectacle extraordinaire du prestidigitateur et illusionniste le plus célèbre au Canada, le prof. Paul Gervais. Admission : Adule $0.25 Enfants $0.15 ».
Des groupes se forment tels les J.O.C. et les Scouts. Les activités sportives sont déjà très populaires grâce aux patinoires extérieures en hiver et aux terrains de balle en été. Hockey, ballon-balai, patinage de fantaisie, baseball, balle molle sont très appréciés des jeunes, mais aussi des adultes. À l’intérieur on planifie des séances d’exercice physique, gymnastique, art dramatique et différentes activités culturelles. Les danses folkloriques inter paroissiales du samedi soir sont également très à la mode.
En 1961 le comité des loisirs prévoit une rallonge à l’église pour abriter 200 places supplémentaires et des salles communautaires. Des travaux exécutés en 1961 et 1962 répondent alors à ces besoins grandissants d’une population en pleine croissance. Qui dit population dit famille, qui dit famille dit enfants. Bébés, mais aussi enfants d’âge scolaire. L’école Viel, à ce moment, est la seule école de la paroisse.
École Nicolas Viel
Sur le territoire de Montréal-Nord, il y a deux écoles primaires au début de la décennie 1920. Tout d’abord l’école Viel plus tard renommée Nicolas Viel, et l’école Germain Valade qui deviendra l’école Saint-Vital.
L’histoire de l’école Nicolas Viel remonte à l’année 1917. C’est en 1920 que l’on construit l’école Viel dans la paroisse de la Visitation du Sault-au-Récollet avant la démarcation de la paroisse Saint-Vital. Son ouverture officielle a eu lieu au mois de janvier 1921 et monsieur J.-Ernest Lamy en a été le premier principal. C’est en 1937 qu’elle est désignée officiellement sous le nom de Nicolas Viel. Selon la publication Nos écoles laïques […] l’école est située près du barrage […] où furent précipités dans le rapide le Père Nicolas Viel et son fidèle Ahuntsic. Natif des environs de Coutances, Normandie, le père Viel était un prédicateur très zélé de la parole de Dieu. […] la Réalle les conduisit à Québec (28 juin 1623) […] le 25 juin (1624) dans le canot de trois Indiens, il fut, avec (Ahuntsic) victime de leur barbarie : tous deux périrent assassinés par les conducteurs du canot et jetés dans le rapide du Sault-au-Récollet. On les considère comme les deux premiers martyrs du Canada.[…] (extraits de Nos écoles laïques).
Au cours des années, une chorale s’est formée. On chante à l’école, mais aussi à l’église. On participe à des concours de chansons canadiennes organisées par la Société Saint-Jean-Baptiste où on moissonne les tout premiers lauriers, ainsi qu’à plusieurs autres concours au parc Lafontaine. Par ailleurs, les voyages ont un rôle formateur et élargissent les horizons. Dans les années 1930, des professeurs ont ainsi piloté les élèves vers les sites enchanteurs des Laurentides, une première pour plusieurs de ces élèves.
L’instruction religieuse prend une place importante dans les écoles. Apprendre Le petit catéchisme est obligatoire. Plus tard, des cérémonies à l’occasion de plusieurs fêtes religieuses et les retraites fermées annuelles pour les élèves de 8e et 9e années font partie du programme scolaire.
Les années 1940 voient une éclosion d’activités artistiques : travaux manuels, dessins, rédactions, chants, leçons diverses, démonstrations artistiques… La salle de récréation sert aussi de salle de spectacles. On y invite des artistes de haute renommée tels Gratien Gélinas, Hector Charland, ainsi que madame Jean-Louis Audet (de son vrai nom Yvonne Ducket) et les élèves de son école de phonétique et d’art dramatique pour des représentations très courues.
Lors du deuxième Congrès de la langue française au Canada (du 27 juin au 1er juillet 1937) un diplôme d’honneur fut décerné à l’école, en témoignage d’appréciation pour « les efforts fournis en faveur de notre idiome maternel. » Le thème de ce second Congrès est « L’esprit français au Canada, dans notre langue, dans nos lois, dans nos mœurs. » En juillet 1946, la Société du Bon Parler français délègue Louis Tanguay, professeur à l’école Nicolas Viel, à faire partie de la mission pour visiter ses avant-postes canadiens-français dispersés dans les prairies de l’Ouest canadien et des États-Unis, jusqu’au Pacifique. C’est un honneur!
Début des années 1980 des demandes de permis de modification et de construction sont accordés. Les travaux de transformation de l’ex-école Nicolas Viel sont commencés. Ce chantier de plus de 2 millions $ modifie le quadrilatère de façon importante. Le projet Les Habitations Nicolas Viel devient le premier de cette envergure de type coopératif d’habitation à Montréal-Nord.
École Saint-Vital
Une deuxième école sera construite à Montréal-Nord en 1917 à l’extrémité nord du boulevard Pie-IX. On la nomme Germain-Valade en l’honneur de deux commissaires d’école. Vers la mi-octobre 1918, l’école ouvre ses portes et, à peine ouverte, elle doit être fermée à cause de l’épidémie de grippe espagnole qui sévit à l’automne. Assumant déjà plusieurs fonctions au sein de la commission scolaire du Bas-du-Sault, Théodule Ouellette est nommé directeur de cette nouvelle école. En 1925, date de l’érection de la paroisse Sainte-Gertrude, l’école fut rattachée à cette paroisse. Plus tard, à la suite d’un incendie à l’église, les paroissiens vinrent à l’école dont la salle fut convertie en chapelle pour un certain temps. En 1929 la commission scolaire change le nom de l’école Germain-Valade pour celui de Saint-Vital.
Les deux ponts, Viau et Lachapelle, devenant insuffisants pour les besoins des automobilistes, en 1927 un projet d’érection d’un troisième pont est élaboré. Il se nommera le pont Caron et sera vis-à-vis le boulevard Pie-IX. Ce pont sera construit dix ans plus tard en 1937 et prendra le nom de Pie-IX. Un article de journal écrira : La construction du pont Pie-IX en 1937 marque un grand pas dans l’amélioration de nos communications. Il sera complété en 1939.
L’éducation religieuse est omniprésente. Les élèves doivent apprendre Le Petit Catéchisme et les prières du matin sont de rigueur. Chaque année, les religieuses de la congrégation des Petites Sœurs de la Sainte-Enfance (le nom officiel des Sœurs missionnaires de l’Immaculée-Conception) visitent les écoles. Toutes belles dans leur costume blanc orné d’un ceinturon bleu marial et d’un voile noir empesé, elles viennent nous « faire adopter » leurs petits chinois. Elles remettent une photographie de l’un d’entre eux au coût de 25 ¢ la carte. On se souvient aussi qu’à l’époque on fait la distribution de « demiards de lait, blanc ou au chocolat » aux enfants moins fortunés.
Dans les années 1950, les écoles existantes ne suffisent plus à la demande des nouveaux arrivants à Montréal-Nord. La commission scolaire construit entre autres l’école primaire Jeanne-Lajoie en 1954 et en 1960 l’école secondaire Pie-IX.
James Richard Cross (1921-2021)
James Richard Cross nait en Irlande en 1921. Il décède le 6 janvier 2021 à l’âge de 99 ans de la COVID 19 à Seaford au Royaume-Uni. Au moment de son enlèvement, il est diplomate britannique, attaché commercial dans différentes villes canadiennes.
Le 5 octobre 1970 au matin, des membres de la cellule Libération du FLQ, se présentent au domicile de James Richard Cross sur la rue Redpath-Crescent à Montréal à bord d’une voiture taxi volée. Un des membres sonne à la porte en prétextant la livraison d’un colis. Une domestique ouvre la porte pour voir une arme pointée dans sa direction. Les comparses montent au premier étage et trouvent Cross dans la salle de bains. Sa femme est toujours au lit.
Il est menotté et couché à l’arrière de la voiture taxi sous une couverture. Dans un garage loué dans Côte-des-Neiges, on change Cross de voiture et on se rend au 10945, rue des Récollets dans la paroisse Saint-Vital à Montréal-Nord. En échange de sa libération, ses ravisseurs exigent diverses demandes. Seulement une est acceptée et le manifeste est lu sur les ondes de Radio-Canada.
James Richard Cross est séquestré pendant 59 jours, toujours rue des Récollets. Il est libéré le 3 décembre en échange d’un sauf-conduit vers Cuba pour ses ravisseurs. James Richard Cross est le premier homme politique enlevé en Amérique du Nord.
Monica Proietti (1940-1967)
Monica Proietti, alias Monica la Mitraille aussi connue sous le surnom de Machine-Gun Molly. On lui prête également le nom de Monique Smith (Anthony Smith, mari et père de deux de ses enfants) ou Monique Tessier (Viateur Tessier, amant et père du troisième). Au moment du décès de Monica, les deux hommes purgent des peines d’emprisonnement. Monica voit le jour le 25 février 1940 à Montréal dans une famille italienne. Plusieurs membres de sa famille, incluant sa grand-mère, sont impliqués dans le crime d’une manière ou d’une autre. En août 1967 la photo de Monica parait à la une des journaux. Elle est alors soupçonnée d’avoir braqué 20 Caisses populaires Desjardins à la pointe d’une mitraillette.
Le 19 septembre 1967, un peu avant 11 h 15, c’est en compagnie de deux complices que Monica entre, déguisée d’une perruque, dans la Caisse Populaire de Saint-Vital, située au 11117, boulevard Saint-Vital à Montréal-Nord. Rapidement les trois voleurs s’emparent de 3 000 $ avant de sortir en vitesse pour s’engouffrer dans une voiture de marque Chrysler. L’alerte est apparemment très rapide, car en moins de 30 secondes deux auto-patrouilles arrivent sur les lieux. Monica appuie sur le champignon et une poursuite s’engage aussitôt. Les rues Martial, London, Fleury et des Récollets sont témoins de cette poursuite effrénée.
Les policiers tirent des coups de feu sur la voiture qui roule vers le boulevard Pie-IX direction sud. Les fuyards traversent presque toute la ville de Saint-Michel où la poursuite s’arrête de façon brutale quand l’auto que conduit Monica heurte violemment un autobus. Les deux complices prennent la fuite à pied. Le véhicule est encerclé et c’est à travers le pare-brise que Monica aurait braqué un pistolet sur ses poursuivants. Un policier pointe alors son arme pour mettre fin à la scène et tire sur elle, l’atteignant d’une balle à la tête et de deux autres à la poitrine. Fin brutale et tragique qui a inspiré une comédie musicale, plusieurs livres et un film sans compter les nombreux articles de journaux.