
Les élus de MHM et les organismes communautaires étaient rassemblés vendredi pour le dévoilement du Plan de développement social de l’Arrondissement (Emmanuel Delacour/EMM)
3 mai 2025DES OBJECTIFS AMBITIEUX POUR LE PLAN EN DÉVELOPPEMENT SOCIAL DE MHM
Après plus d’un an de consultations, de forums et de sondages, l’arrondissement de Mercier—Hochelaga-Maisonneuve (MHM) a publié vendredi son « Plan d’action intégré en développement social 2025-2030 », un outil qui mettra la table pour trouver des solutions aux plus importants enjeux sociaux sur son territoire.
À la suite des interactions avec le milieu communautaire menées depuis février 2024, MHM a identifié quatre axes sur lesquels travailler pour offrir un meilleur réseau d’aide aux personnes en situation de précarité et améliorer la cohabitation sociale. L’alimentation, l’habitation, le tissu communautaire, ainsi que la qualité et le milieu de vie sont dans la mire de l’Arrondissement pour atteindre ces objectifs.

Alia Hassan-Cournol, conseillère de la Ville à MHM (Courtoisie)
« Le tissu communautaire, il a toujours fait partie de l’ADN de MHM, particulièrement dans Hochelaga-Maisonneuve. Mais ça a complètement changé dans les dernières années et on a créé la division de développement social. À la suite de ça, le poste d’Élodie (Choqueux) a été créé. Je voulais qu’on se donne un plan pour avoir de grandes orientations pour les cinq prochaines années. Un plan, c’est « l’fun », mais des actions, c’est le plus important. Il faut donc voir le plan comme une trame qui va guider l’ensemble des actions de tout le monde », explique Alia Hassan-Cournol, conseillère de la Ville à MHM.
Pour sa part, Élodie Choqueux, cheffe de division au Développement social et aux événements publics à l’Arrondissement, rappelle que la dernière fois qu’un tel plan a été élaboré à MHM fut en 2012. « Ça fait beaucoup de temps, avec aussi une pandémie qui a accéléré des enjeux très importants (…) », résume Mme Choqueux.
Quatre axes pour élaborer des actions
Le « Plan » propose d’intervenir sur quatre axes et de fixer des résultats à moyen et long terme pour atteindre ses objectifs. Des pistes d’action et certaines interventions déjà réalisées ont été identifiées pour donner une idée de ce qui pourrait découler concrètement des efforts de l’Arrondissement. On ne sait toutefois pas encore quelles seront les initiatives prises par les organismes à la suite du dépôt du « Plan », « une sortie avec l’état de l’avancement » des mesures mises en place étant prévue plutôt cet automne, selon Mme Choqueux.
Néanmoins, on anticipe l’élaboration de programmes de financement de projets en sécurité alimentaire mieux adaptés ou encore des efforts menés pour trouver des sites d’agriculture urbaine.
En matière d’habitation, on vise entre autres à influencer les promoteurs dans leurs choix de contribution au Règlement pour une métropole mixte, qui dicte le nombre de logements sociaux et abordables créés dans chaque développement immobilier. En outre, on pourrait ajuster la réglementation afin de mieux accompagner les groupes dans le développement de projets d’hébergement pour les personnes « situation d’instabilité résidentielle ».
Pour aider les organismes et leur faire bénéficier d’une plus grande stabilité, il est envisagé par MHM de bonifier la procédure d’attribution des locaux temporaires et permanents et d’effectuer un recensement des espaces et locaux sous-utilisés.
Enfin, pour améliorer la qualité de vie dans l’arrondissement, on propose d’accroître la participation aux activités culturelles dans les quartiers, de bonifier les mesures d’apaisement de la circulation et de favoriser la coopération avec les intervenants en cohabitation sociale et en itinérance. L’an dernier, MHM a rejoint plus de 1300 personnes lors de démarches de consultations, et 40 % des personnes sondées ont fait part de tensions liées à des enjeux de voisinage, d’incivilités (particulièrement routières) et d’enjeux associés à la dépendance, à la santé mentale et à l’itinérance. La question du sentiment de sécurité dans les quartiers fait partie des résultats à long terme visés dans le « Plan ».
Des cibles ambitieuses à atteindre
Dans plusieurs cas, MHM place la barre haute dans l’atteinte de ses objectifs, notamment en alimentation, où le premier résultat visé à moyen terme est de « favoriser la mise en place d’un système alimentaire durable, local et résilient ». On espère ainsi améliorer l’accès à une « alimentation saine pour toute la population et en tout temps ».
« On est dans un mécanisme de gestion du changement. Donc, il faut qu’on s’appuie sur des ambitions grandes et simples. Oui (nos visées) sont ambitieuses, mais elles sont révélatrices », insiste la cheffe de division au Développement social.
Il faudra donc « penser en dehors de la boîte », concède Mme Hassan-Cournol, notamment en impliquant l’économie sociale et circulaire.
En habitation, si on veut à long terme augmenter les actions à l’égard de la salubrité et lutter contre l’éviction des locataires, tout en favorisant la création de logements pour les personnes les plus vulnérables, on s’est toutefois gardé de cibler spécifiquement l’enjeu de l’itinérance comme axe sur lequel se concentrer.
« Ç’a été délibéré qu’on n’ait pas une thématique sur l’itinérance, parce que l’itinérance, c’est un statut à un moment donné dans le parcours de vie de quelqu’un. Ce qui crée de l’itinérance le plus souvent, c’est que tu perds ton logement et que tu n’as plus assez d’argent pour t’en trouver un autre et tu te retrouves à la rue, ou que tu as dû faire des compromis sur comment te nourrir », illustre Mme Hassan-Cournol. L’enjeu étant multifactoriel, il fallait plutôt cerner toutes les facettes connexes liées à l’itinérance pour mieux s’y attaquer, soutient-elle.
Des données probantes
En tout et partout, 560 personnes au niveau des organismes communautaires, des institutions publiques (ex : CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal) et des administrations publiques ont été consultées depuis la dernière année.
Les données qui ont été colligées durant la préparation du « Plan » révèlent une importante transformation du territoire de MHM ainsi qu’une aggravation des enjeux liés à la pauvreté et aux inégalités.
C’est tout d’abord les changements démographiques au sein de l’arrondissement qui ont surpris Mme Hassan-Cournol. « Ce qu’on voit, c’est un nombre croissant de familles qui s’installent dans MHM (…). La seconde donnée intéressante, c’est où les gens habitent : il y a eu un décalage des populations vers l’est de l’arrondissement notamment pour des questions d’abordabilité de logement, et parce que Mercier-Est a développé une offre de service quand il y a eu la pandémie (…) », souligne l’élue.
La mixité sociale a aussi grandement évolué dans des quartiers qu’on pourrait croire homogènes. Entre les recensements de 2016 et de 2021, la population immigrante a crû de 11,6 % et celle des résidents non permanents de 213,7 %. Bien que ces personnes puissent rapidement accéder au statut de citoyen, ce changement démographique a un impact concret sur l’offre de service des organismes qui doivent s’adapter à la demande. Par exemple, on doit ainsi offrir plus d’accompagnement auprès des individus qui ne parlent ni le français ni l’anglais et qui sont à la recherche de ressources dans MHM.
Enfin, un autre fait « frappant » selon Mme Hassan-Cournol est que de nombreux secteurs sont touchés par d’importantes « poches de pauvreté » dans les limites de l’arrondissement. Une carte démontre que certaines zones peuvent comprendre entre 30 % à 42 % de personnes avec un faible revenu, notamment au sud de la rue Sainte-Catherine Est, dans Hochelaga-Maisonneuve, dans le quartier Longue-Pointe et entre le parc Thomas-Chapais et la rue Sherbrooke Est, dans le quartier Saint-Justin.

Une carte présentant les secteurs dans MHM où sont concentrées les personnes vivant avec un faible revenu. (Image tirée du Plan d’action intégré en développement social de MHM)
Selon Mme Choqueux, ces réalités ont affecté le tissu communautaire et font en sorte que de nombreux organismes peinent désormais à remplir leurs missions « de sensibilisation et de prévention » pour se concentrer sur les besoins de base.
« Comment les gens peuvent-ils prendre part à des activités de vélo visant à améliorer leur santé mentale et physique, alors qu’ils doivent trouver des solutions pour acheter leur épicerie et se loger », donne en exemple Mme Hassan-Cournol.