La cuisine du Chic Resto Pop en action (Courtoisie Chic Resto Pop)

LES DEMANDES ALIMENTAIRES CONTINUENT D’AUGMENTER AUPRÈS DES ORGANISMES

La hausse des prix à la consommation a des répercussions marquées sur les organismes alimentaires de l’est de la métropole. À l’approche des Fêtes, l’augmentation des demandes de paniers alimentaires et l’allongement des listes d’attente en témoignent.

Marc-André Simard, directeur général du Chic Resto Pop, un organisme d’Hochelaga-Maisonneuve, est témoin direct du phénomène : « Cela fait un an, voire 18 mois, qu’on constate une augmentation importante de la demande. Dans notre dernier rapport annuel, on a fait état d’une augmentation d’environ 51%. » 

Marc-André Simard, directeur général du Chic Resto Pop (EMM/Sophie Gauthier)

Pour M.Simard, cette hausse s’explique notamment par « une augmentation assez drastique du coût de la denrée, mais aussi du coût de la vie en général. Les gens sont forcés de se trouver des mécanismes alternatifs pour répondre à leurs besoins de base. Les restaurants communautaires en font partie ».

Le directeur général a rapidement dû adapter ses pratiques, compte tenu de la situation et des variations des ressources financières. « Quand je suis arrivé en poste en 2022, mon budget pour les denrées alimentaires était de 190 000 $. Pour 2024-2025, j’ai un budget d’environ 400 000 $ », précise-t-il. 

Thierry Bachelier, directeur général du Réseau alimentaire de l’Est de Montréal, observe des bouleversements semblables au sein de son organisme, entre autres au niveau de l’approvisionnement. « Les produits étant plus chers, le choix est donc plus restreint parce qu’on a le même volume d’argent ou à peu près. Et les prix étant élevés, on devient plus sélectifs. Nutritivement parlant, on essaie toujours d’être dans le coup, mais parfois c’est pas évident d’offrir un bon rapport qualité-prix. » 

Thierry Bachelier, directeur général du Réseau alimentaire de l’Est de Montréal (Photo tirée de LinkedIn)

Selon Béatrice Nadeau, coordonnatrice du Service d’aide communautaire Anjou, l’augmentation du nombre de bénéficiaires s’est manifestée dès la pandémie. « Le nombre de gens qu’on dessert pour la banque alimentaire a plus que doublé et on a dû commencer une liste d’attente. Ce qu’on n’avait jamais fait », indique-t-elle.  

Nouveaux profil de bénéficiaires

Non seulement le nombre de bénéficiaires est en forte augmentation, mais un nouveau profil de clientèle fait désormais appel aux différents services alimentaires. « Quand je suis arrivé en poste en octobre 2022, je ne voyais pas le même monde. Aujourd’hui, on est vraiment plus dans les familles. Aussitôt qu’il y a une journée pédagogique, la salle [du restaurant] est pleine d’enfants », remarque M. Simard

En plus des familles, certains travailleurs n’arrivant plus à joindre les deux bouts recourent désormais aux banques alimentaires, précise M. Bachelier. « Des gens qui ont une rémunération mais qui, à cause de l’inflation et des loyers qui ont augmenté, n’ont pas forcément assez d’argent pour boucler les fins de mois. Il y en a un paquet dans l’est de Montréal », indique-il.  

D’après la coordonnatrice du Service d’aide communautaire Anjou, cette situation est également observée au sein de son organisme. « On voit maintenant de plus en plus de familles, avec les 2 parents qui ont un emploi, mais qui n’arrivent quant même pas. C’est quelque chose qu’on n’observait pas avant. »

Non seulement le visage de la pauvreté change, mais celle-ci touche même les employés d’organismes qui tentent d’aider leur prochain. « Il y a des gens dans mon équipe qui ont besoin d’aide alimentaire, se désole le directeur général du Chic Resto Pop. J’en reviens pas! Ça fait 2 ans qu’on fait des augmentations salariales de l’ordre de 10% pour l’ensemble du personnel. J’essaie que [la situation] touche le moins possible mes équipes. »

Thierry Bachelier estime également que dans le monde communautaire « les gens ne sont pas rémunérés à la hauteur des efforts qu’ils font ».  « Il y a un roulement de personnel relativement important parce que les gens ont besoin d’argent pour vivre », ajoute-il.

Indispensables bénévoles 

Heureusement, malgré les difficultés financières actuelles qui touchent de nombreuses personnes, les bénévoles répondent toujours présents. « C’est ce qui sauve bon nombre d’organismes communautaires. Le bénévole, c’est la personne miracle », croit M. Bachelier

Un restaurant communautaire comme le Chic Resto Pop peinerait à fonctionner sans eux, confie Marc-André Simard. « C’est plus d’une centaine de bénévoles qui sont mobilisés chaque semaine. On a des gens qui sont ici tous les jours, même sur les deux services, sur le service du midi, le service du soir. »

Béatrice Nadeau partage le même avis et louange le dévouement de son équipe : « Dans l’organisme au total, on a une centaine de bénévoles et on ne pourrait rien faire s’ils n’étaient pas là. Juste à la banque alimentaire, ils sont peut-être 25 qui sont au rendez-vous semaine après semaine. Ils sont fantastiques! »

Le 19 décembre prochain, le Chic Resto Pop convie ses bénéficiaires à son populaire souper de Noël annuel. Comme le rapporte Marc-André Simard, «il y a des gens dont c’est le seul repas de Noël. Des personnes seules à la maison, souvent des personnes âgées. Pour nous, c’est une manière de briser l’isolement ».