Le député Alexandre Leduc, instigateur du 1er Rendez-vous sur l’itinérance dans Hochelaga-Maisonneuve (photo courtoisie Québec solidaire).

HOCHELAGA-MAISONNEUVE EN MODE SOLUTION FACE À L’ITINÉRANCE

Le 11 mars prochain, aura lieu le Rendez-vous sur l’itinérance dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Le député de Québec solidaire Alexandre Leduc est l’instigateur de cet événement. Rassemblant organismes, instances publiques et politiciens autour d’une même table, le rendez-vous a pour but d’amorcer la discussion sur la question complexe de l’itinérance sur le territoire.

L’idée a commencé à germer dans la tête du député provincial Alexandre Leduc lors de la fermeture hautement médiatisée du campement Notre-Dame à la fin de l’année 2020. À la suite de l’exode des travailleurs du centre-ville et de la fermeture temporaire des refuges, tous deux causés par la pandémie de COVID-19, des dizaines de personnes avaient élu domicile le long de la rue Notre-Dame. Les habitations de fortune montées par ces citoyens sans autres recours divisaient les habitants du quartier. Et il y a quelques mois, le campement Steinberg s’étendant dans le boisé du même nom a aussi suscité l’émoi lors de sa fermeture. « Dans Hochelaga-Maisonneuve, il y a toujours eu un phénomène d’itinérance. Ce n’est pas complètement nouveau. Ce qui l’est peut-être, c’est sa vigueur, son ampleur », soutient Alexandre Leduc. « Deux crises importantes dans les dernières années ont amplifié le phénomène dans le quartier : la crise sanitaire bien sûr, mais surtout la crise du logement. »

Historiquement, c’est plutôt au centre-ville qu’évoluaient les personnes en situation d’itinérance. De là les raisons pour lesquelles Ville-Marie et le Centre-Sud sont plus outillés pour faire face à de tels enjeux. S’y trouvent les grands refuges comme la Mission Old Brewery ou la Maison du Père, et c’est le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud qui a le mandat de gérer la question de l’itinérance et qui distribue les sommes. « On ne souhaite pas mettre tout ça aux poubelles et recommencer une autre structure, ça ne serait pas productif. Mais Hochelaga-Maisonneuve vit sa propre dynamique d’itinérance, et on veut sortir d’une logique où, souvent, on nous proposait des solutions concentrées sur le centre-ville », explique Alexandre Leduc.

Adresser l’enjeu

Quartier populaire qui tend à se gentrifier de plus en plus, Hochelaga-Maisonneuve est une pépinière de groupes communautaires adressant des enjeux tels que le logement, l’enfance, l’alimentation, la consommation de drogues, le travail du sexe. « Ils sont structurés depuis des années autour de la table de quartier, tout le monde fait un super travail. Mais sur l’itinérance, on part de peu. Certains groupes ont déjà une pratique, comme le CAP St-Barnabé, Dopamine ou les Auberges du cœur. Ils sont super présents et efficaces, mais il n’y a pas de dynamique de concertation particulièrement développée », précise le député de Québec solidaire. C’est autour de la table de quartier que doit s’articuler une telle concertation. Actuellement en reconstruction, la table de quartier d’Hochelaga-Maisonneuve a été témoin de beaucoup de mouvement dans les dernières années. « On veut rassembler toutes les forces vives du quartier qui travaillent sur la question de l’itinérance et se faire un plan d’action. Des solutions, on en connait déjà plusieurs. Mais comment on les met ensemble, comment on les collectivise, comment elles deviennent une réponse organisée d’un quartier face au phénomène? », ajoute Alexandre Leduc. « Et ce n’est certainement dans les prérogatives d’un député d’organiser et de gérer une concertation de ce genre. Ça serait piler sur les principes de l’action communautaire autonome. Il y a déjà eu des discussions avec la table de quartier. C’est vraiment elle qui va assurer ce leadership », tient-il à mentionner. Le Rendez-vous sur l’itinérance souhaite donc en quelque sorte donner un élan à la future table de concertation, une instance qui en est à se structurer.

Après la rue Notre-Dame en 2020, le campement temporaire s’est installé dans le boisé Steinberg l’été dernier (photo courtoisie).

La rencontre préparatoire a déjà eu lieu, une autre réunion est prévue dans quelques jours et les invitations à la ministre responsable de la région de Montréal et de la Métropole, Chantal Rouleau, et au ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, ont été lancées. La liste des invités n’est pas tout à fait complétée, mais le rendez-vous se concentrera sur les groupes du quartier comme CAP St-Barnabé, CARE, Dopanime, L’Anonyme, les Auberges du cœur, La Marie Debout; les institutions gouvernementales, comme le CIUSSS de l’Est et le CIUSSS du Centre-Sud; ainsi que les organismes intéressés par la question de l’itinérance qui voudront bien mettre la main à la pâte.

Transformer le temporaire en permanent

Comme la nécessité est la mère de l’invention, l’arrivée massive dans Hochelaga-Maisonneuve de personnes itinérantes a provoqué la mise sur pied, par la Ville de Montréal et des organismes communautaires notamment, de solutions d’hébergement. Le député de Québec solidaire cite en exemple CARE et les locaux du YMCA de la rue Hochelaga, qui a malheureusement fermé ses portes en 2020. « Paradoxalement, cet espace libéré nous a vraiment sauvé collectivement pendant la pandémie. C’est devenu un site incontournable du quartier en matière d’itinérance. » En effet, ayant débuté ses activités dans un sous-sol d’église avec une poignée d’employés et quelques lits, CARE a vu ses effectifs grandir considérablement dans le quartier et l’organisme peut accueillir aujourd’hui plusieurs dizaines d’individus en situation d’itinérance chaque soir dans l’ancien YMCA. Il s’agit toutefois d’une situation temporaire, la Ville, pour l’instant collaboratrice et patiente, devra rénover les lieux éventuellement.

Pour Alexandre Leduc, c’est clair : il faut un refuge permanent dans Hochelaga-Maisonneuve. Et en découlent forcément bien des questions : Comment le construira-t-on? Quel genre de services offrira-t-il? Sera-t-il mené par un seul groupe, une coalition de groupes? Nous faut-il un seul refuge ou plusieurs petits? Les réponses à ces interrogations s’esquisseront lors du rendez-vous sur l’itinérance du 11 mars 2022. « Le plan qui en ressortira sera sûrement intéressant parce qu’il visera en quelque sorte à donner des devoirs aux élus du quartier, quel que soit leur palier. Des devoirs qui, on espère, dureront dans le temps. Peu importe quelle sera la couleur du gouvernement aux prochaines élections, ces devoirs, ce plan d’action, cette liste serait déjà en place, serait déjà le fruit d’une forte concertation, et la nouvelle personne en fonction héritera de ces mandats. Il en va de même pour le fédéral et le municipal », lance Alexandre Leduc, qui compte bien se représenter aux prochaines élections, espérant continuer son travail auprès des citoyens d’Hochelaga-Maisonneuve pour quatre autres années.

Justement, ces citoyens auront-ils voix au chapitre? « Je pense que dans un deuxième temps, il y aura l’occasion certainement d’aller solliciter les citoyens du quartier sur la question de l’itinérance », croit le député de Québec solidaire. « J’ai vraiment été impressionné par la solidarité des gens du quartier par rapport aux deux campements. Ce n’était pas évident pour tout le monde, en particulier les voisins immédiats. Mais au-delà des défis du vivre ensemble que ça représentait, il y a eu une impressionnante générosité en ressources et en temps. Je sens les gens d’Hochelaga-Maisonneuve prêts à s’impliquer et à relever le défi. » Être témoin de l’extrême pauvreté est sans doute confrontant pour tout le monde, mais la solution est-elle vraiment la répression? C’est une des questions auxquelles tenteront de répondre les acteurs du milieu en mars prochain.