FOIRE COMMERCIALE : UNE PAUSE FESTIVE POUR DYNAMISER LA PROMENADE MASSON
Restaurants, boucherie ou encore centre de yoga, une dizaine des restaurants et commerces de la Promenade Masson ont dû mettre la clé sous la porte depuis janvier 2024. Jusqu’au 16 juin, la foire commerciale de l’artère permettra d’offrir une parenthèse festive et conviviale aux clients, en plus de dynamiser ses commerces et restaurants.
Le concept de vente trottoir permet aux commerces de déployer leurs étals de marchandises à l’extérieur et de proposer des aubaines aux passants, tandis que les restaurants en profitent pour ouvrir des terrasses temporaires. « Cette foire commerciale aide d’abord à augmenter la notoriété de l’artère et sa visibilité. Elle permet aussi aux commerçants d’offrir des rabais à leurs clients. Enfin, et surtout, elle encourage le rassemblement de la communauté dans un moment festif et familial, qui permet de développer un sentiment d’appartenance au quartier », explique Kheir Djaghri, directeur général de la SDC Promenade Masson.
La foire commerciale arrive au bon moment. Kheir Djaghri admet ouvertement que les commerces et restaurants de la Promenade Masson vivent actuellement une situation difficile : « Sur 2 000 bars qui ont fermé dernièrement à l’échelle du Québec, 2 ont fermé sur la Promenade Masson. Une boucherie et un centre de yoga viennent également de mettre la clé sous la porte…». Les restaurants Quai No 4 et le Gaston ont également dû rendre leur tablier entre février et mai dernier.
Une avalanche d’épreuves
« L’une des raisons principales est le remboursement du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes », explique Kheir Djaghri. Le gouvernement avait offert aux restaurateurs une aide financière de 60 000 $ pendant la pandémie. Si ces derniers remboursaient 40 000 $ avant le 18 janvier 2024, ils n’avaient pas à remettre les 20 000 $ restants. Cependant, s’ils n’y arrivaient pas, les restaurateurs perdaient la subvention et devaient payer des intérêts sur le prêt complet. Plusieurs d’entre eux ont depuis pris la décision de fermer leur établissement et se retrouvent désormais endettés.
De façon plus générale, la situation économique actuelle représente un handicap pour les commerces et restaurants. « Ils vivent une période de turbulences aujourd’hui : l’augmentation des approvisionnements, l’augmentation des salaires des employés, l’augmentation des taxes municipales… Leur marge bénéficiaire est devenue très faible », souligne le directeur général de la SDC locale.
L’inflation a également modifié les habitudes de la clientèle. « Désormais, les gens vont se loger avant d’acheter un livre, des vêtements ou de boire une bière. Dans notre cas, on a la chance d’avoir une clientèle régulière, bien que j’ai pu observer une baisse d’affluence en janvier, février et mars 2024 », renseigne Mike, acheteur-libraire de la librairie Médiaspaul, autrefois Librairie Paulines, qui se trouve sur la Promenade Masson.
Beaucoup de restaurateurs et commerçants veulent recourir aux réseaux sociaux pour se faire connaître et attirer la clientèle. « Il faut vraiment investir davantage dans le marketing et les réseaux sociaux. Ça aiderait vraiment les commerces de la rue Masson », insiste Fabio, propriétaire du traiteur et restaurant italien Bossa.
Une piétonnisation à double tranchant
La foire commerciale de Masson permet de piétonniser la rue pendant quelques jours. D’autres artères, telles que la rue Saint-Denis, l’avenue Mont-Royal ou encore la Promenade Ontario, font partie des 11 rues de Montréal qui se transforment en espaces piétonniers durant toute la période estivale 2024. L’absence de la Promenade Masson de cette liste a suscité des interrogations.
L’une des raisons principales est la méfiance de la moitié des 150 commerces et restaurants qui composent la SDC Promenade Masson. « 50 % de mes membres sont défavorables à une rue piétonne », confie Kheir Djaghri. Ce dernier a demandé à la Ville de lui fournir des indicateurs économiques et techniques qui lui permettront de convaincre la moitié des commerçants récalcitrants. « En priorité, on voudrait connaître les retombées économiques d’une rue piétonne sur les commerçants et le quartier. À ce jour, il existe des données sur les retombées positives sur les bars, restaurants et cafés, mais aucune concernant les commerces. Je les attends », déclare-t-il.
Dans le cas d’une potentielle future piétonnisation, l’une des autres inquiétudes des commerçants concerne la livraison. « On a beaucoup de gens qui viennent chercher leur commande en voiture. La piétonnisation pourrait donc représenter une problématique car ils ne pourraient plus se garer juste en face de notre boutique », souligne Tom, fleuriste chez Le Jardin de Mathilde.
Des travaux qui inquiètent
Débutant en 2026 pour une durée de 3 ans, le vaste chantier de rénovation des infrastructures souterraines (aqueduc, égout, électricité, télécommunications) ainsi que de la rue Masson et des voies de circulation avoisinantes inquiète les commerçants. « Beaucoup de travaux de ce type, à l’instar de la Plaza St-Hubert ou de la rue Saint-Denis, n’ont pas laissé de bons souvenirs. Les commerçants de la rue Masson sont inquiets et risquent vraiment de ne pas reconduire leur bail », explique Kheir Djaghri.
Bien que la Ville s’engage à délivrer des compensations financières aux commerçants qui prouveront une perte de bénéfices pendant cette période, beaucoup de commerçants n’ont pas envie de subir ces travaux et envisagent effectivement de quitter l’artère commerciale. Les commerces resteront ouverts pendant la période des travaux, mais le stationnement sera temporairement suspendu et des planches permettront d’accéder aux commerces.
La Ville est actuellement en train d’élaborer les plans et devis. Une réunion est prévue à l’automne prochain afin de partager davantage d’informations sur le projet.