Photo: Wikipedia/Blanchardb.

FERMETURE DU TUNNEL LOUIS-HIPPOLYTE-LA FONTAINE : PEU DE DÉMISSIONS DANS LES MILIEUX DE SANTÉ

La fermeture du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine en octobre dernier n’aura pas causé l’exode des travailleurs de la santé au CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal comme on l’avait redouté.

En effet, avant la fin de l’année 2022, c’est seulement 5 % du personnel en provenance de la Rive-Sud qui aurait quitté les rangs des deux hôpitaux, deux instituts, 15 CHSLD et 8 CLSC dirigés par le CIUSSS. Sur l’ensemble de ses 17 500 travailleurs, 1395 proviennent de la Rive-Sud, soit un peu moins de 8 % du total des employés, selon les informations fournies par Anick Hurtubise, directrice adjointe à la santé organisationnelle et à la formation au CIUSSS.

« Il y en a plusieurs qui nous avaient annoncé leur départ à l’avance. Plusieurs n’ont même pas eu le temps d’essayer les mesures alternatives de transport avant qu’elles ne soient déployées. [La fermeture du tunnel] a été très médiatisée et finalement, peut-être que cette hypervigilance a fait en sorte que les gens ont cherché rapidement d’autres moyens pour se déplacer », indique Mme Hurtubise.

Cette dernière ajoute qu’à l’heure actuelle le trajet entre les établissements de santé du CIUSSS et la Rive-Sud est « quand même viable », contrairement aux délais qui avaient été anticipés.

Effectivement, un peu plus tôt cette semaine, Radio-Canada rapportait des chiffres du ministère des Transports selon lesquels le nombre de passages quotidiens dans le pont-tunnel est passé de 85 000 en septembre à 58 000 en novembre, soit une baisse d’achalandage de 32 %. Ces données semblent démontrer que les voyageurs ont changé leurs habitudes de transport pour s’adapter à la nouvelle réalité, puisque la diminution d’achalandage est encore présente à ce jour.

Si la fermeture des voies du tunnel a sans doute joué un rôle dans la rétention du personnel, il ne s’agit-là que d’un facteur parmi tant d’autres dans le contexte de la pénurie de main-d’œuvre que connaît le secteur de la santé, insiste Mme Hurtubise. « Plus de la moitié de nos travailleurs habitent sur notre territoire », rappelle-t-elle. Il s’agit d’un enjeu trop complexe pour rattacher le manque de main-d’œuvre uniquement aux difficultés de transport.

Cependant, cette dernière croit que les mesures mises en place pour encourager l’utilisation des transports alternatifs plutôt que l’auto solo auront valu la peine, même si elles n’ont permis que de retenir « 10 ou 15 employés de plus », alors que les centres de santé peinent à garnir leurs rangs.

En mode solution : navettes et applications mobiles

Bien avant que la fermeture du tunnel ne soit mise en place, le CIUSSS a préparé un plan d’action pour assurer que ses employés puissent se rendre à leur lieu de travail sans encombre.

La première solution fut de faire appel à Netlift, un système de taxi géré par une application qui se décrit comme « une plateforme de covoiturage « domicile-travail » destinée aux entreprises ».

« C’est une application qu’on télécharge et quand on cherche une course, il y a un taxi qui vient nous chercher pour nous amener à notre destination. Nous avons signé une entente avec eux, pour qu’au « jour 1 » de la fermeture du pont-tunnel, les gens puissent utiliser le système de navette offert par le ministère des Transports, pour ensuite se rendre au métro Radisson, et finalement prendre un transport vers leur établissement de santé », explique Mme Hurtubise.

La navette dont il est question est la ligne 462 du Réseau de transport de Longueuil, surnommée la « Navette Santé ». Cette dernière amène gratuitement les voyageurs à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont et l’Hôpital Santa-Cabrini et au métro Radisson depuis les stationnements incitatifs gratuits de Mortagne et de Touraine, à Boucherville, et ce, pour toute la durée des travaux au tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine. Selon le CIUSSS, cette alternative est « bien utilisée », car une cinquantaine de gens par jour l’empruntent pendant les semaines les plus achalandées.

À cette offre est venue s’ajouter en janvier la ligne 811 de la Société de transport de Montréal (STM), qui effectue un trajet desservant les stations de métro Radisson, Cadillac, Langelier et l’Assomption, sur la ligne verte, avant de continuer sa route vers les neuf établissements de soins de santé ciblés qui incluent notamment l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont, l’Institut de Cardiologie de Montréal, l’Hôpital Santa Cabrini, le Centre de réadaptation Marie Enfant et plusieurs CHSLD. « Contrairement à la ligne 462, ce sont surtout des Montréalais qui l’utilisent, d’après la directrice adjointe. On nous parle (à la STM) de 180 clients par jour depuis la mise en service de cette ligne. » Toutefois, elle n’est pas empruntée exclusivement par les travailleurs de la santé; il est donc impossible de différencier les utilisateurs dans les données fournies.

Par ailleurs, Mme Hurtubise affirme que le CIUSSS n’a pas financé la mise sur pied de la ligne 811. Selon un communiqué émis par le ministère des Transports en décembre 2022, c’est la STM qui a été mandatée par la ministre Geneviève Guilbault pour mettre en place cette nouvelle desserte.

Enfin, pour diminuer l’impact du temps de transport sur les employés, les gestionnaires du CIUSSS ont été encouragés à promouvoir le télétravail auprès des travailleurs pour lesquels cette alternative est possible. « C’est plus facile à appliquer pour les personnes dans les domaines administratifs, mais on a rendu cela possible, même si ce n’est que partiellement, pour d’autres corps de métier. Par exemple, les travailleurs sociaux dont le vendredi est dédié à du travail au bureau, peuvent faire leurs tâches à la maison », souligne Mme Hurtubise.