Le Club de golf Métropolitain Anjou (Courtoisie CRE-Montréal/E. Langlois)

« ON A QUE DEUX JOURS POUR SAUVER LES MILIEUX NATURELS ET HUMIDES DU GOLF D’ANJOU ! »

Les voix de plusieurs organismes environnementaux de Montréal s’élèvent cette semaine afin d’inciter les gens à manifester leur désaccord avec le projet de transformation du golf d’Anjou en vaste développement commercial et industriel. C’est que la consultation publique (en ligne) pour cette modification majeure de zonage, qui aura un impact très important sur la trame verte de l’est de Montréal, se termine demain (20 mars). « La volonté de l’arrondissement d’Anjou de développer l’entièreté du golf d’Anjou pour du développement commercial ou industriel signifie l’élimination d’un espace vert qui ceinture le Parc-nature du Bois d’Anjou sur la moitié de son périmètre. La minéralisation prévisible de cet espace dévitalisera et isolera le parc de lieux complémentaires à son offre écologique, paysagère et fonctionnelle. De plus, il rendra impossible la réalisation d’un corridor vert entre le parc du Ruisseau Montigny tout au nord de l’Île et le Parc de la Promenade-Bellerive. Les citoyens et la Ville de Montréal doivent dire un non ferme à ce projet », a déclaré par voie de communiqué Raymond Moquin, président du Collectif en environnement Mercier-Est (CEM-E).

Bye bye golf, bonjour les entrepôts

Selon le CRE-Montréal, les changements aux règlements souhaités par l’arrondissement d’Anjou visent à permettre la construction d’un bâtiment industriel d’environ 1 million de pieds carrés (92 903 mètres carrés), soit un peu plus de 1,5 fois la superficie du Stade olympique de Montréal. La documentation de l’arrondissement précise que « cette grande superficie est requise afin de permettre la réalisation de gains d’efficacité opérationnelle et de permettre les opérations de robotique. Elle est également requise pour assurer une circulation sécuritaire des véhicules et aménager un stationnement de 500 à 1 200 places pour les employés et de 200 à 500 camions. » Les principales activités projetées sur ce site sont : « centre de distribution et d’exécution des commandes; réception, stockage, assemblage, expédition, distribution, préparation et vente de marchandises ou de produits; stationnement, entreposage et utilisation d’automobiles, de camions, de machines et de remorques, y compris le chargement et le déchargement à l’extérieur; transport de marchandise et de produits ».

« Autrement dit, Anjou veut accueillir un gigantesque centre de stockage et de distribution de marchandises, encerclé de vastes surfaces minéralisées pour accommoder le transport par camions, sur le dernier grand espace vert qui relève de l’arrondissement », a soutenu hier la direction du CRE-Montréal, également par voie de communiqué. « Il faut que les citoyen.nes se fassent entendre, on a que deux jours pour sauver les milieux naturels et humides du golf d’Anjou! », a par ailleurs déclaré François Plourde (Renard frak), citoyen militant pour la préservation des milieux naturels de l’est de Montréal.

Le CEM-E juge l’intention de l’administration du maire Luis Miranda de « déplorable » dans le contexte où l’est de l’île de Montréal « a un déficit important en espaces verts, surtout si on compare cette situation à celle qui prévaut dans l’ouest de l’île. » Alors que la Ville de Montréal a consacré une centaine de millions de dollars pour consolider le grand parc de l’ouest, l’organisme juge aussi inacceptable que les instances gouvernementales ne soient pas capables de dégager des sommes raisonnables afin de préserver entièrement le golf d’Anjou. « Cela pourrait inclure une compensation financière à l’arrondissement d’Anjou. La protection de cet espace vert, c’est une question d’équité pour les citoyens de l’est de Montréal. Il est probable que le maire de l’arrondissement d’Anjou, M. Luis Miranda, crie à l’ingérence, mais la question de la protection du golf d’Anjou ne concerne pas seulement l’arrondissement d’Anjou mais également la Ville de Montréal et tous les citoyens de l’est de l’île », souligne Nicolas Kaliaguine, responsable du comité Parcs et espaces verts du CEM-E.

Plusieurs grands terrains industriels sont actuellement en phase de décontamination dans l’est de Montréal et pourraient accueillir bientôt des projets d’envergure tels que proposés à Anjou (photo : EMM).

Le CEM-E souhaite que l’agglomération de Montréal et l’arrondissement d’Anjou travaillent de concert pour trouver un terrain d’entente afin de sauver cet espace vert. Le CEM-E estime également que la tentative de réaliser un changement de zonage de cette importance quant aux conséquences à long terme pour les citoyens, en profitant du contexte de la COVID-19 pour le faire sans réelle consultation publique, « est à la limite de l’indécence ».

La responsable des dossiers de l’est au sein du Comité exécutif de la Ville et mairesse de l’arrondissement de RDP-PAT, Caroline Bourgeois, avait déclaré à EST MÉDIA Montréal le 26 novembre dernier qu’elle ne s’opposait pas aux trois projets de construction du propriétaire du terrain (golf d’Anjou), la famille Di Lillo, pour la bonne raison que ces projets sont légitimes selon le règlement municipal, mais elle se disait inquiète de voir un arrondissement faire cavalier seul dans un développement d’envergure du genre, alors que les acteurs de l’est se mobilisent depuis plusieurs années déjà afin de développer l’est de Montréal sous certaines bases communes, entre arrondissements. « On décontamine des millions de pieds carrés en zones industrielles en ce moment afin de rendre disponibles des terrains qui, on l’espère, vont amener des entreprises par exemple plus vertes, technologiques, qui vont offrir de belles perspectives d’emplois dans l’est de Montréal. D’un autre côté, tout l’est s’entend pour dire qu’il faut aussi améliorer et créer des zones vertes sur le territoire. Alors lorsqu’on entend que des entrepôts viennent s’installer et prendre des centaines de milliers de pieds carrés en zone stratégique, dont une bonne partie pour du stationnement, même si je n’ai rien contre Costco, je ne suis pas certaine que l’on va dans la bonne direction », avait alors déclaré Caroline Bourgeois.

Un espace vert précieux

À l’heure actuelle, en plus de contribuer à la gestion des eaux pluviales, d’offrir à une faune diversifiée des milieux ouverts et de constituer un vaste îlot de fraîcheur, le golf d’Anjou joue un rôle de zone tampon du côté sud du parc-nature du Bois-d’Anjou, lequel renferme de fragiles milieux humides, explique dans son communiqué le CRE-Montréal. « Il présente également, ainsi que nous l’avons souvent démontré, un grand potentiel de conversion en parc et de mise en valeur au cœur de la trame verte à consolider dans l’Est, en soutien au développement du Secteur industriel de la Pointe-de-l’Île (SIPI) », indique l’organisme.

Il y a plusieurs raisons qui inciteraient le CRE-Montreal à s’insurger devant les récentes demandes de l’arrondissement d’Anjou. « Nous pouvons notamment souligner ici la disponibilité d’autres grands terrains ailleurs dans l’est à la faveur des programmes de soutien à la décontamination, la non-concordance avec la vision de trame verte pour le SIPI et le manque de vision en temps de COVID-19 – pandémie qui révèle la nécessité de se doter de parcs dans tous les quartiers et pas seulement à la pointe de l’île de Montréal », clame la direction de l’organisme.

Le CEM-E et le CRE-Montréal encouragent donc les citoyens de l’est de l’île de Montréal à consulter le site internet de l’arrondissement pour comprendre l’ampleur de la situation et à participer en grand nombre à la consultation écrite de l’arrondissement d’Anjou, qui se termine le 20 mars 2021. « Il faut envoyer les commentaires à l’adresse courriel : greffe_anjou@montreal.ca. Il est important de préciser dans le titre – Consultation écrite au sujet du Règlement modifiant le Plan d’urbanisme de la Ville de Montréal (04-047) – Signez le courriel avec votre nom, votre adresse, votre numéro de téléphone et votre adresse courriel », explique M. Moquin du CEM-E.