COMMERCES PRÈS DES CHANTIERS : À LA RECHERCHE DE SOLUTIONS
Le parti de l’opposition officielle, Ensemble Montréal, dénonçait récemment « une mauvaise gestion » de la Ville concernant les pertes financières subies par les commerces situés près des chantiers de construction dans la métropole. Montréal compte en effet, encore cette année, de nombreux ralentissements de la circulation dus à la présence de chantiers sur son territoire. Cette réalité aurait une incidence directe sur le chiffre d’affaires des commerces avoisinants.
L’administration Plante a créé en 2018 un programme d’aide aux entreprises négativement touchées par leur proximité avec les chantiers. Toutefois, l’opposition juge que cette aide doit être bonifiée. « La subvention maximale devrait ainsi passer de 40 000 $ à 45 000 $, en plus d’être indexée annuellement à l’indice des prix à la consommation afin de suivre la hausse du coût de la vie », peut-on lire dans un communiqué diffusé sur le site web d’Ensemble Montréal.
La motion réclame « une refonte des programmes d’aide financière et de subvention forfaitaire alloués aux commerçants victimes des chantiers », et affirme que « de nombreux membres de la communauté d’affaires sont pris aux dépourvus. »
Selon Aref Salem, chef de l’opposition officielle à l’Hôtel de Ville de Montréal, « 13 millions de dollars dédiés aux commerçants dormaient toujours dans les coffres de la Ville de Montréal en juillet dernier, alors que plusieurs d’entre eux peinent à joindre les deux bouts. C’est la preuve que le programme actuel ne fonctionne pas! », a-t-il avancé.
Des bonifications déjà en place, indique la Ville
« J’étais quand même un peu surprise de leur communiqué et de la motion qui a été déposée », commente Alia Hassan-Cournol, conseillère associée au développement économique, au commerce et au design, au comité exécutif de la Ville de Montréal. « On a changé le programme, qu’on appelait à l’époque Artères en chantier, il y a moins d’un an pour le bonifier à la suite des consultations avec les sociétés de développement commerciales », explique-t-elle.
Selon Mme Hassan-Cournol, la prise de position d’Ensemble Montréal va plus loin qu’un simple geste de compassion pour les commerçants. « La période électorale arrive sous peu. L’opposition commence à s’agiter », croit-t-elle.
Elle indique également que le programme d’aide aux entreprises a connu des bonifications depuis sa création : « C’est passé de 25 000 $ à 40 000 $. Donc, c’est déjà une majoration importante. Et en plus, on a ajouté l’aide forfaitaire de 5 000 $ ».
Le montant alloué aux entreprises ne serait d’ailleurs pas le seul aspect à avoir été bonifié, d’après Alia Hassan-Cournol. Les entreprises auraient maintenant accès plus rapidement au programme puisque « les délais d’admissibilité ont été modifiés [pour passer] de 18 mois à 6 mois ».
L’opposition juge quant à elle que cette période devrait être de trois mois car, selon elle, il ne suffit « que de quelques semaines de construction pour faire dégringoler les finances d’un commerce, voire le forcer à mettre la clef sous la porte ».
Les chantiers du boulevard Pie-IX et du pont-tunnel Louis-Hippolyte Lafontaine
Le Théâtre Denise-Pelletier se trouve à proximité d’importants travaux de construction en cours sur le boulevard Pie-IX, dans Hochelaga-Maisonneuve. « Les travaux nous affectent dans la mesure où notre clientèle est plus en périphérie, dans le Grand Montréal », indique Stéphanie Laurin, directrice générale de l’établissement. Étonnamment, les chantiers près du pont-tunnel Louis-Hyppolite Lafontaine ont eu une plus grande incidence sur la fréquentation de cette salle de spectacle. « Certaines écoles avaient même exprimé qu’elles ne viendraient pas, parce que le transport était trop compliqué avec le pont-tunnel », explique Mme Laurin. Toutefois, elle précise que si les constructions entraînent « plus de plaintes » de la part de la clientèle, elles ne se traduisent pas pour autant en pertes financières.
Pour sa part, Elizabeth Payne, directrice de la Place Versailles, située dans les environs du pont-tunnel, affirme que « l’impact des chantiers de construction à proximité est bien moindre que celui de la pandémie ». Rappelons que les travaux de réfection du pont-tunnel ont débuté dès juillet 2020. Selon Mme Payne, « le ministère des Transports et de la Mobilité durable prévoit la fin du projet en 2027. » S’ajouteront à celui-ci les importants travaux de réaménagement du centre commercial de l’est de Montréal, prévu pour 2026.
Faire connaître le programme d’aide
Comment les commerçants touchés peuvent-ils savoir s’ils ont droit à un dédommagement financier? Selon Mme Hassan-Cournol, « la ligne Affaires a été mise en place pendant la pandémie pour soutenir les commerces qui en arrachent. Les commerçants peuvent et doivent l’utiliser. »
D’autres ressources qui proposent diverses solutions aux entreprises touchées existent également, rappelle-t-elle : « Dans les arrondissements, il y a des conseillers au développement économique dont le mandat est de faire la tournée des commerces quand il y a des chantiers pour faire connaître le programme. »
Un des conseillers a d’ailleurs avisé le personnel du Théâtre Denise-Pelletier à ce sujet. « On a été contactés par les personnes responsables du programme », confirme la directrice du théâtre. « C’est davantage nécessaire pour les commerces qui ont observé une perte directe de revenus à la suite d’une baisse d’achalandage, ce qui n’est pas nécessairement le cas pour nous. »
Si l’opposition critique dans sa motion les méthodes de l’administration Plante, la Fédération canadienne des entreprises indépendantes (FCEI) croit quant à elle qu’elles sont efficaces en ce qui a trait aux dédommagements liés aux chantiers, explique Mme Hassan-Cournol. « La FCEI a fait le tour de tous les programmes existants au Canada pour soutenir les commerces quand il y a des chantiers majeurs, et c’est Montréal qui a été soulignée pour son innovation et la solidité de son programme. La FCEI, c’est pas n’importe qui! Et elle recommande aux municipalités canadiennes de s’inspirer de Montréal », dit en terminant l’élue.