COMMENT ADAPTER SON ENTREPRISE À LA NOUVELLE RÉALITÉ DE L’EMPLOI

 

Depuis quelques années, la pénurie de main-d’œuvre au Québec a forcé les petites, moyennes et grandes entreprises à faire preuve de créativité pour recruter du nouveau personnel. Pour les petits organismes et les PME, le recrutement peut représenter un réel défi. Comment en venir à bout ? Deux spécialistes en ressources humaines nous donnent leurs conseils.

La réalité du marché

L’est de Montréal est un endroit distinct de l’île où une bonne proportion de la main-d’œuvre recherchée est constituée de travailleurs aux caractéristiques classiques de « cols bleus », plutôt que de « cols blancs ». Malgré tout, selon Carole Lafon, conseillère aux entreprises et en acquisition de talents chez PME MTL Centre-Est, un organisme qui finance et accompagne les entreprises et organismes de l’est, notamment dans leur processus de recrutement, c’est loin d’être la seule main-d’œuvre recherchée en 2022. « Malgré la domination manufacturière, commence-t-elle, dans les dernières années, les industries se sont vraiment diversifiées. On avait auparavant cette idée préconçue que les employés étaient moins qualifiés dans l’est. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. On voit une majorité de diplômés. » De plus, encore aujourd’hui, il reste difficile de pourvoir des postes spécifiques reliés à des métiers spécialisés (électricien, plombier, etc.) et en administration (comptable, réceptionniste, etc.). Finalement, toujours selon Carole Lafon, la population vieillissante fait aussi en sorte que 80% des emplois à combler d’ici quelques années seront des remplacements de personnes parties à leur retraite.

Flexibilité, flexibilité, flexibilité

Depuis quelques années déjà, la priorité d’une majorité de Canadiens semble être la conciliation travail-famille. « Ce qui compte le plus, maintenant, c’est la flexibilité, explique Carole Lafon. Il est donc possible d’aller chercher d’autres leviers pour attirer la main-d’œuvre qualifiée. »

Selon Maude Rodrigue, présidente de la firme de stratèges en ressources humaines MezAfairs, le problème n’est pas le manque de candidatures reçues, mais bien, de garder ces candidatures au sein de l’organisation, car le marché est rendu extrêmement compétitif. « De plus en plus en 2022, il faut s’adapter à la réalité des personnes. Si on n’est pas flexible ou peu ouvert à des solutions, et qu’on souhaite absolument garder l’horaire de travail typique de 9 h à 17 h, cela va être plus difficile d’aller chercher de la main-d’œuvre. »

Toujours selon la présidente de MezAfairs, la flexibilité ne concerne pas seulement l’horaire de travail. Cela peut inclure aussi, par exemple, les congés sans solde. « Ce n’est pas toujours évident de les mettre de l’avant pour les employeurs, avoue Maude Rodrigue, car les gens ne sont pas payés lors de ces congés. Cependant, un employé qui prend des congés lors de problèmes familiaux ou de journées pédagogiques, mais qui, lorsqu’il est au travail, donne un excellent rendement, ça ne coûte rien à l’entreprise. Et c’est peut-être une solution pour le garder. »

Maude Rodrigue, présidente de la firme de stratèges en ressources humaines MezAfairs (photo courtoisie).

Un affichage de poste sexy

Un affichage conventionnel de poste n’est plus suffisant. Il faut maintenant travailler la mission de l’entreprise et la description des tâches pour rendre le poste intéressant. « Quels sont les avantages ? La rémunération ? La mission de l’entreprise ? La localisation ? Il faut réfléchir aux éléments les plus vendeurs pour le poste » explique Maude Rodrigue.

Carole Lafon, de PME MTL, croit également que même les petites entreprises doivent aujourd’hui développer leur marque employeur. « La marque employeur, c’est ce qui définit ce qu’on fait, pourquoi on le fait, comment on le fait, comment on traite nos employés, etc. C’est quelque chose qui peut se faire sans aucun budget. C’est important de prendre le temps de développer sa marque employeur, parce que cette marque-là va rester. On va associer le nom de l’entreprise à cette marque employeur. »

Carole Lafon, conseillère aux entreprises et en acquisition de talents chez PME MTL Centre-Est (photo courtoisie).

Dans le même ordre d’idées, selon Mme Rodrigue, il ne faut pas tenir pour acquis que les gens connaissent la mission de l’entreprise ou de l’organisme, même si la marque est connue de la communauté. Une belle description claire et détaillée de la raison d’être de l’entreprise pourrait permettre d’aller chercher davantage de candidats.

C’est aussi important de considérer le médium où on affiche le poste. Il faut réfléchir à l’endroit où se trouve notre candidat idéal. Sur les réseaux sociaux ? Sur un site de petites annonces ? Dans les médias traditionnels ? Chaque médium a son public distinct et c’est important d’en tirer profit. « Aussi, ajoute Maude Rodrigue, on peut mettre un visuel qui parle, qui est accrocheur, pour augmenter le nombre de clics. Facebook et LinkedIn sont aussi de bons médias sociaux pour trouver de la main-d’œuvre dans pas mal tous les champs d’activités. »

Patience, svp !

Selon Maude Rodrigue de MezAfairs, si on ne trouve pas la perle rare tout de suite, il ne faut pas se décourager. « De prendre la mauvaise personne, ça coûte souvent beaucoup plus cher que d’attendre un trois semaines de plus pour finalement trouver le bon candidat. »

À l’opposé, d’avoir en tête le candidat « parfait » peut devenir un réel obstacle. L’ouverture d’esprit est aussi un bon atout pour trouver un employé. Carole Lafon de PME MTL est d’avis qu’il est important de réfléchir avant tout au profil de personnes que l’entreprise souhaite embaucher, leurs formations, leurs compétences, leurs expériences, tout en considérant la disponibilité actuelle du marché.

De plus, de laisser la chance à des personnes immigrantes et à de jeunes diplômés est aussi une façon de pourvoir aux besoins de l’entreprise plus rapidement. Investir en ces derniers, en assumant des formations complémentaires par exemple et en les encadrant davantage, peut être un excellent moyen d’éviter d’afficher des postes à répétition, et de pérenniser son équipe.