
Le CHSLD François-Séguenot (Image tirée du site Internet du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal)
18 janvier 2025CHSLD FRANÇOIS-SÉGUENOT À PAT : UNE NOUVELLE UNITÉ « RÉVOLUTIONNAIRE »POUR LES PERSONNES ATTEINTES DE TROUBLES NEUROCOGNITIFS
Selon l’Institut national de santé publique du Québec, le nombre de personnes atteintes de troubles neurocognitifs aurait triplé entre 2000 et 2019. C’est entre autres pour cette raison qu’un centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) de Pointe-aux-Trembles (PAT) a créé une unité spécialement conçue pour ses résidents aux besoins particuliers, une première dans le secteur. Visite de cette unité, baptisée « Harmonie », au CHSLD François-Séguenot.
Situé tout au bout de l’île de Montréal, le CHSLD François-Séguenot compte 77 résidents. « On est bien présents et on répond aux besoins de la population du secteur depuis de nombreuses années », explique Laurence Lelièvre, nouvellement coordonnatrice de site au CHSLD François-Séguenot. Sa clientèle est diversifiée, rassemblant des personnes vivant avec différentes conditions, notamment des troubles neurocognitifs.
Que sont les troubles neurocognitifs?
Les troubles neurocognitifs concernent les problématiques reliées à une dégénérescence ou une altération de la fonction mentale. On note alors, chez les personnes atteintes, un déclin de la performance de certaines fonctions cognitives comme la mémoire, l’attention, l’exécution, le langage ou les aptitudes sociales. « Et ils perdent parfois leur capacité à assurer leur propre sécurité », ajoute Mme Lelièvre. « Ce sont des troubles sur un continuum. Il y a plusieurs affections et plusieurs symptômes présents selon chaque pathologie. »
Ces troubles ont bien entendu certaines conséquences. Le résident peut, par exemple, développer une agressivité physique ou verbale, résister aux soins, se retrouver avec une perte de mémoire courte ou longue et se mettre à errer. « C’est difficile aussi pour les proches et les gens qui interviennent auprès de ces résidents », souligne Michelène Timothée Joseph, anciennement coordonnatrice de site au CHSLD François-Séguenot, qui a chapeauté la construction de l’unité « Harmonie ».
« Par contre, avec la bonne approche, une formation adéquate des intervenants et des outils mis en place comme on l’a fait avec cette unité, vraiment en demande, on peut y arriver », poursuit-elle.

Un coin paisible de l’unité « Harmonie » (Courtoisie)
Une approche « révolutionnaire »
Débutant avec la formation des employés, l’approche adoptée par le CHSLD François-Séguenot vise d’abord à mettre en place une équipe de professionnels aptes et prêts à naviguer avec des enjeux comportementaux et à garantir une qualité de soins optimale. De plus, l’unité à créer se devait d’être centrée sur la personne soignée, en s’adaptant à ses besoins. « C’est une approche qui existait, mais on l’a adaptée au mieux », précise Mme Timothée Joseph.
« Et ce qui est révolutionnaire, c’est qu’on ne met pas la personne dans une boîte. On a des critères d’inclusion et d’exclusion, mais on adopte un regard plus souple. On analyse plus en profondeur les dossiers pour mieux choisir les résidents qui peuvent avoir accès à l’unité », explique quant à elle Mme Lelièvre.
En somme, dans une telle unité, les résidents avec des troubles neurocognitifs sont regroupés dans un même lieu et côtoient une équipe psychogériatrique formée de techniciens en éducation spécialisée, de travailleurs sociaux ou encore d’infirmières. « Il y a des soins personnalisés, on intervient auprès de la personne selon ses besoins et elle n’est pas dans un milieu qui n’est pas adapté à elle », résume Michelène Timothée Joseph.

La salle de cinéma (Courtoisie)
Bâtir l’unité de rêve
Quatre ans ont été nécessaires, depuis la planification jusqu’à l’entrée des résidents, pour la concrétisation du projet, dont la construction a dû se faire en période pandémique, en présence des 77 résidents, et ce, sans bris de services. Inaugurée en décembre dernier, l’unité «Harmonie » a déjà accueilli ses usagers.
Depuis quelques semaines, ces derniers peuvent évoluer dans un tout nouveau milieu propice au maintien de leur autonomie. On y trouve une salle sensorielle; une salle commune où ils peuvent se rassembler et qui comprend une cuisinette; une salle de cinéma; un grand balcon avec vue sur la cour; une salle de repos pour les résidents qui ont besoin de calme; et un espace boutique dans lequel ils peuvent manipuler des objets et toucher différentes textures.
Les usagers ont aussi accès à un système de son et à un appareil Obie, qui leur permet d’accéder à des jeux ou de faire des projections au mur, sur le sol ou sur une table. Les salles de bain préchauffées favorisent quant à elles leur confort. « On avait comme thème « Expo 67 » et « Pignon sur rue ». L’usager peut trouver de tout sur l’unité, il n’a pas besoin de sortir à l’extérieur. Il a accès à des stimulations et des loisirs », illustre Mme Timothée Joseph. De plus, l’espace est fermé et un code est nécessaire pour y entrer et en sortir. « C’est sécurisé et il y a un système de surveillance caméra, les résidents peuvent donc y faire de l’errance partout », indique-t-elle.

L’espace boutique (Courtoisie)
Un service en demande
En septembre dernier, le CHSLD François-Séguenot comptait 60 personnes avec atteintes neurocognitives en attente d’une place dans son unité spécialisée. Malheureusement, le temps d’attente moyen est de 4,1 ans. Ce calcul correspond à la durée d’un séjour habituel au sein de ce service, se terminant à la suite d’un décès ou encore lorsqu’un déplacement survient, soit vers la maison, car le résident a pris du mieux, ou vers la population régulière du CHSLD à cause d’un déclin de sa condition. « Étant donné que dans la population [québécoise], le nombre de personnes atteintes a triplé et que notre bassin de lits ne peut pas tripler, lui, ça occasionne un taux de roulement très lent », explique Laurence Lelièvre. « Ça cause beaucoup de détresse chez la clientèle et chez les proches aidants », se désole la coordonatrice de site.
Depuis l’ouverture de la nouvelle unité, non seulement les résidents aux besoins particuliers sont comblés, mais leurs proches et les employés aussi, assure Michelène Timothée Joseph.« Il est important pour nous de faire rayonner le travail de nos équipes, de rassurer la population sur ces services auxquels elle a maintenant accès et de consolider la confiance des usagers et de leurs familles. »