
L’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (Emmanuel Delacour/EMM)
28 mars 2025CHANTIER DE HMR REPOUSSÉ : MÉCONTENTEMENT GÉNÉRALISÉ DANS L’EST
Le ministre de la Santé a suscité de vives réactions dans l’est cette semaine en annonçant que le projet de reconstruction de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR) ne serait finalement pas lancé cet été.
La nouvelle est tombée comme un pavé dans la mare. Le chantier de rénovation de HMR est à nouveau inscrit à l’étape de planification au Plan québécois des infrastructures 2025-2035, publié en même temps que la mise à jour économique de Québec, mercredi.
Pourtant, l’important chantier devait être lancé à la moitié de 2025, selon une entrevue accordée précédemment par le président-directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, Jean-François Fortin-Verreault, à EST MÉDIA Montréal. Une information également validée par un article de Radio-Canada.
Questionné à ce propos par le député de Rosemont et porte-parole en matière de santé pour Québec solidaire (QS), Vincent Marissal, le ministre de la Santé, Christian Dubé, n’a pas été en mesure de confirmer la date prévue du début des travaux. « Quand on va avoir une date claire, avec des montants clairs, on va vous revenir », a affirmé le ministre en commission parlementaire, mercredi. Ce dernier a qualifié les annonces précédemment faites de « précipitées » et a affirmé que le gouvernement ne dispose ni des « bons chiffres » ni des « bonnes analyses » pour aller de l’avant.
Le 11 septembre 2023, le ministre Dubé avait pourtant officiellement annoncé le lancement du projet de la rénovation de HMR en présence des élus de Montréal et de la circonscription de Rosemont. Celui-ci avait alors estimé « qu’on aura des « pépines » dans la cour d’ici 2024 ».
Consternation
Appelé à réagir en entrevue, le député solidaire de Rosemont n’a pas mâché ses mots vis-à-vis de ce revirement de situation. « Je suis consterné! Cette histoire-là est en train de tourner à l’eau de vaisselle. On est en train de nous refaire le coup de la ligne bleue », a-t-il lâché.

Le député de Rosemont, Vincent Marissal, porte-parole de QS en matière de santé (Courtoisie)
« Monsieur Dubé l’a annoncé déjà deux fois. Non seulement il admet qu’il est allé trop vite, donc pour la planification, mais en plus, il n’est même pas capable de s’avancer avec une date! », exprime M. Marissal.
L’élu craint que le projet ne démarre pas avant la fin du présent mandat du gouvernement, soit d’ici octobre 2026. Pourtant, le projet est prêt, à son avis. « Évidemment, dans un projet d’une telle ampleur, il y aura toujours des ajustements en cours de route, mais on sait où le mettre, on sait combien d’étages, on sait quelles sont les étapes », soutient-il. Le député rosemontois voit dans ce report du chantier « un “faux” prétexte » et des motifs « probablement électoralistes ». « Il ne manque plus que la signature du Conseil des ministres pour que le projet soit lancé. »
« Ce gouvernement, visiblement, ne veut pas dépenser 5 ou 6 milliards de dollars dans l’est de Montréal », a dénoncé M. Marissal.
Pour sa part, le député de la circonscription voisine Camille-Laurin et chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, a soulevé le fait que «(l)’absence de progression du projet de rénovation et de modernisation de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont était déjà inquiétante, là c’est rendu qu’on recule carrément ».

Paul St-Pierre Plamondon (Courtoisie)
« C’est une décision qui est POLITIQUE. Parce que dans le budget, on fait référence à bien d’autres projets dans d’autres régions, qui, eux, apparaissent dans la phase de réalisation », a martelé M. St-Pierre Plamondon sur son compte du réseau social X.
« Les citoyens de l’est de Montréal sont abandonnés, encore une fois », a-t-il ajouté.
Le chef du PQ soutient que le gouvernement doit tenir son engagement et attribuer les sommes nécessaires afin de lancer la phase des travaux préliminaires dès cet été. « Rappelons que l’urgence de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont est l’une des plus achalandées au pays. Des milliers de citoyens de ma circonscription et de l’est de Montréal s’y font soigner chaque année et la région connait déjà un sous-financement historique. »
« Le ministre devrait laisser tomber son obsession pour la nouvelle structure Santé Québec et se concentrer sur les projets urgents comme l’HMR qui attend depuis trop longtemps et dont les travaux sont plus que nécessaires. Les citoyens de l’est ne sont pas des citoyens de seconde zone », a conclu M. St-Pierre Plamondon.

Christian Dubé, ministre de la Santé (Emmanuel Delacour/EMM)
Appelé à réagir, le cabinet du ministre de la Santé nous a référé à une publication sur son compte Bluesky. Dans celle-ci, M. Dubé a affirmé que « le projet de construction du nouvel Hôpital Maisonneuve-Rosemont se poursuit. C’est un incontournable pour notre gouvernement. Pour l’année en cours, nous investissons 40 M $ pour la mise en œuvre du projet ».
Son gouvernement devrait annoncer les dates des prochains jalons dès que celles-ci seront officialisées, a-t-il assuré. « L’arrivée de Santé Québec permet d’avoir une vue d’ensemble et une meilleure gestion des projets à travers l’ensemble du Québec. HMR fait toujours partie de nos infrastructures majeures en santé, nous faisons les choses dans l’ordre », conclut-il dans sa publication.
Contacté par EST MÉDIA Montréal, le cabinet de la mairesse de Montréal a refusé de commenter la nouvelle.
Colère dans l’est
Au niveau de la société civile, les acteurs de l’est ont aussi fait part de leur grande déception. Christian Yaccarini, président et chef de la direction de la Société de développement Angus (SDA) a affirmé avoir été « sidéré », puis « en colère » suite à l’annonce de cette décision du gouvernement. « Je ne comprends pas le raisonnement, sinon qu’il est politique, mais il n’est pas clinique », a-t-il fait part dans un message.

Christian Yaccarini, président de la SDA (Courtoisie)
Ce dernier s’attendait à ce qu’une enveloppe de 400 M $ soit au programme pour démarrer le projet. « Il y a des infrastructures qu’il faut faire pour pouvoir accueillir le nouvel hôpital, dont le nouveau stationnement. Là-dessus, tout est prêt, les plans sont prêts, ainsi que le plan d’infrastructure », a-t-il soutenu.
« Je ne comprends pas. C’est un hôpital qui s’autodétruit. J’ai vraiment de la difficulté à comprendre qu’on le laisse aller. Chaque année qu’on perd, c’est minimum 300 M $ de surcoûts. Puis, on demande à l’hôpital : il faut que tu trouves des économies, parce qu’il coûte plus cher que prévu. Mais, il ne coûte pas plus cher que prévu, c’est juste l’inflation qui fait son œuvre. »
Le président de la SDA met en garde le gouvernement qui tarderait trop à démarrer le chantier. Selon M. Yaccarini, la situation risquerait de « devenir dangereuse » pour cet hôpital fortement vétuste, dont certains murs sont maintenus en place avec du grillage métallique et dont les systèmes électriques, de tuyauterie et de ventilation sont en fin de vie.
« Ce n’est pas une chimère, cette histoire-là! Qu’on ait fait passer les hôpitaux de Saint-Jérôme et Chicoutimi avant HMR, je ne veux rien enlever à ces projets-là, mais en termes d’urgence clinique, HMR devait passer avant », s’est-il insurgé.

Jean-Denis Charest, PDG de la CCEM (Courtoisie)
Une sonnette d’alarme similaire a été lancée par la Chambre de commerce de l’Est de Montréal (CCEM). Son président-directeur général, Jean-Denis Charest, y voit une « très, très mauvaise nouvelle » pour l’est.
« On invite le gouvernement à trouver une solution [pour lancer le chantier], parce que chaque mois de retard coûte plus de 15 à 20 millions de dollars en inflation! (…) C’est une infrastructure stratégique pour l’est de Montréal qu’on doit mettre à niveau. Il y a des coûts en termes d’inflation, mais aussi en ce qui concerne la réputation de l’est », a expliqué M. Charest.
Ce dernier conçoit mal comment l’hôpital, qui est déjà aux prises avec des difficultés de rétention de personnel, pourra convaincre les professionnels de la santé de poursuivre leurs activités dans cet établissement, et encore moins comment on pourra y recruter une relève.
M. Charest rappelle que HMR possède 17 % des lits hospitaliers de Montréal, mais qu’il doit desservir 26 % de sa population. Le projet, qui devrait dépasser les 4 milliards $ d’investissements publics, prévoit un nouveau centre hospitalier universitaire de 720 lits en chambre individuelle, alors que le présent bâtiment compte au total 450 lits.