Chantal Rouleau (photo : EMM)

CHANTAL ROULEAU MAINTIENT SES PRIORITÉS : TRANSPORT, RUE NOTRE-DAME ET DÉCONTAMINATION

Presque deux mois après l’élection du premier gouvernement caquiste de l’histoire, l’Est de Montréal semble se mobiliser plus que jamais pour entamer de grands chantiers. À preuve, lors de la conférence du PDG de la Société de développement Angus, Christian Yaccarini, organisée par la Chambre de commerce de l’Est de Montréal le 22 novembre dernier, dont le thème était justement « Cap sur l’Est de Montréal », quelque 350 personnes y étaient dont une grande partie des acteurs politiques et socio-économiques de la région. Chantal Rouleau, nouvelle députée de Pointe-aux-Trembles, ministre responsable de la Métropole et ministre déléguée aux Transports, ainsi que son collègue Pierre Fitzgibbon, ministre responsable de l’Économie et de l’Innovation, trônaient fièrement à la table d’honneur. « Ça prouve qu’il y a un intérêt très marqué pour le gouvernement de travailler et de mettre des énergies pour la relance de l’Est de Montréal. D’ailleurs lorsque M. Legault avait rencontré rapidement la mairesse de Montréal après l’élection, réunion dont je faisais partie, je peux vous affirmer que le développement de l’Est était au cœur des enjeux », a déclaré Mme Rouleau, que nous avons rencontrée dans son bureau de comté le 23 novembre dernier.

Trois grands projets

L’ancienne mairesse de RDP-PAT a réitéré de façon non équivoque sa volonté de doter l’Est de Montréal d’une nouvelle infrastructure majeure de transport collectif, qui sera vraisemblablement sur rails. En campagne électorale, elle avait fortement soutenu le projet de tramway urbain qui aurait desservi la Pointe-de-l’Île jusqu’au centre-ville en utilisant principalement le parcours de l’ancienne voie du CN qui longe une bonne longueur la rue Notre-Dame.  Si le projet est toujours dans sa mire, elle ne ferme toutefois pas la porte à d’autres structures qui pourraient s’avérer plus efficaces, comme par exemple le prolongement du Réseau express métropolitain (REM) dans l’Est, idée avancée par M. Yaccarini lors de sa conférence et qui avait fait bien rire la salle en déclarant que s’il le faut on pourrait même le peindre en rose. « Je ne sais pas encore qu’elle technologie sera utilisée en bout de ligne mais ce sera certainement celle qui assurera la meilleure mobilité possible au meilleur rapport qualité-prix. Il faut que ce projet majeur et structurant pour l’Est réponde aux besoins à moyen et long termes pour la région, pas seulement à court terme, et ce ne sera certainement pas des autobus », affirme-t-elle. La ministre est d’avis que malgré les analyses et les études de faisabilité qui s’annoncent inévitablement, le projet devra se faire rapidement : « L’Est est dans une urgence d’action, on en est là. On ne se demande plus si on va faire ou non quelque chose, on en est à décider quelle infrastructure on va mettre en place, et les budgets seront au rendez-vous. »

L’amélioration significative du réseau de transport collectif est selon Mme Rouleau l’action fondamentale à réaliser pour améliorer le sort de l’Est montréalais. Si on veut que les entreprises s’intéressent à la région, il faut que la main-d’œuvre puisse accéder au lieu de travail plus facilement dit-elle. « L’impact du transport collectif est énorme pour le développement économique, surtout pour un territoire urbain comme l’Est de Montréal. Quelle entreprise aujourd’hui veut investir dans un emplacement difficile d’accès pour ses employés? Et qui veut venir habiter dans une zone, à Montréal, où on le sait que le transport est difficile et où ça prend presqu’obligatoirement un véhicule? Si on veut rehausser le niveau de richesse dans l’Est, et offrir une qualité de vie meilleure à tous les niveaux, ça passe par une grande amélioration du transport, définitivement », soutient Mme Rouleau.

Autre projet d’envergure qui a fait couler beaucoup d’encre en campagne électorale et qui viendrait sérieusement donner un coup de fouet à l’économie de l’Est est la réfection complète de la rue Notre-Dame, un immense chantier qui alimente les discussions (et les passions…) depuis une trentaine d’années sur le territoire. Un dossier complexe qui interpelle les trois paliers de gouvernement puisque le Port de Montréal, de juridiction fédérale, est aussi directement touché par le réaménagement de cet axe routier. Selon Chantal Rouleau, ce projet ambitieux devrait aussi voir le jour sous la gouverne caquiste.  « C’est dans la volonté du premier ministre d’avoir une belle rue Notre-Dame en harmonie avec tous les éléments qui la composent : le fleuve, les quartiers résidentiels et les secteurs industriels », soutient-elle. Sans donner plus de détails pour le moment, la députée de Pointe-aux-Trembles affirme néanmoins que « la rue Notre-Dame sera transformée en boulevard urbain du Pont Jacques-Cartier jusqu’à la Pointe-de-l’Île. »

La troisième priorité de la CAQ pour l’Est de Montréal, soit la décontamination des sols, est déjà une mesure officielle du gouvernement, annoncée par Mme Rouleau. « Ce que l’on a dit, et ce qu’on fait, c’est que nous injecterons 200 millions de dollars pour la décontamination des sols dans l’Est au courant des prochaines années. Cette somme s’ajoute aux 75 millions supplémentaires qu’avait accordé le gouvernement précédent pour l’ensemble de l’Île de Montréal », soutient la ministre. Cette mesure « aidera à panser cette plaie qui nuit énormément au développement économique de la région, aux prises avec ce leg de l’industrie lourde », avance Mme Rouleau, qui ajoute que son ministère et la ville travaillent déjà de concert afin d’identifier les zones et les projets qui bénéficieront de ces investissements, et que la mécanique pour octroyer ces fonds sera dévoilée sous peu.

Transition rapide

L’ex-mairesse ne semble pas du tout intimidée par ses nouvelles fonctions de ministre. C’est une femme extrêmement en confiance que nous avons plutôt rencontré cette semaine. « Ce n’est pas un chambardement complet pour moi parce que j’étais déjà très impliquée dans les dossiers de l’Est et de la métropole. Les acteurs socio-économiques de la région, je les connais très bien, et en grande partie je continue de côtoyer le même milieu. Les enjeux de la région, je les connais aussi très bien, ce qui change, c’est le niveau de discours, le niveau d’intervention », explique-t-elle.

Le grand changement pour elle, c’est que ce n’est plus la mairesse d’arrondissement qui vient défendre un point pour ses citoyens, c’est maintenant la ministre qui peut dorénavant prendre en mains ces enjeux et dire, eh bien, on y travaille immédiatement. « Et c’est ça que j’allais chercher! C’est pour ça que j’ai fait ce saut, que j’ai fait cette course, c’est pour aller chercher ces outils-là », a-t-elle déclaré avec la conviction qu’on lui connait.

Est-ce qu’elle détiendra véritablement les rênes pour revitaliser l’Est à la hauteur de ses ambitions? « Je peux vous dire que c’est sur nos engagements que la CAQ s’est mise à travailler le premier jour, dès l’assermentation, et le même après-midi nous étions déjà en conseil des ministres. Ça va définitivement bouger », affirme Mme Rouleau.

Sa perception du pouvoir tourne autour de la capacité de rassembler, de convaincre, et de maîtriser les rouages de l’administration publique. « Pour conduire la machine, il faut la comprendre et connaître comment ça marche. Mais le plus important par la suite, c’est que ce pouvoir, appelons-le comme ça, doit servir à desservir, à répondre aux besoins de la population », dit-elle.

Comité de travail conjoint Montréal-Québec

L’ancienne adversaire politique de Projet Montréal et de la mairesse Valérie Plante a déclaré à Est Média Montréal que la mise sur pied du comité de travail conjoint entre Québec et la métropole n’était pas une instance qui allait s’embourber dans d’innombrables études et que son objectif est d’accélérer le processus décisionnel pour le développement de la ville, surtout sur le plan économique. « Cette alliance, ce n’est pas pour faire des études. C’est pour réaliser des projets, et ça touche directement ceux prévus pour l’Est de Montréal », clame la ministre. Cette dernière se dit d’accord avec la récente intervention médiatique de l’ex-maire de l’arrondissement de Rosemont-La-Petite-Patrie, André Lavallée, qui avait déclaré le mois dernier qu’il y avait bien assez d’études pour l’Est et que l’on connaissait très bien aujourd’hui où et comment on devrait investir pour relancer le territoire. « C’est vrai qu’il y a eu ces dernières années énormément d’études, beaucoup de propositions, beaucoup de discussions. Mais aujourd’hui on est à l’heure de l’action, les choses doivent se faire. Pour moi, la création du comité, c’est un signal extrêmement fort et positif pour dire que nous sommes maintenant dans l’action », exprime Mme Rouleau.

Une annonce devrait avoir lieu très bientôt concernant la composition de ce comité de travail et le rôle exact qui lui sera octroyé. « Nous sommes en train de finaliser tout ça au moment où on se parle », nous disait la ministre.

Projet Saint-Laurent

Le premier ministre François Legault a affirmé récemment au magazine L’actualité qu’il avait l’intention de mettre de l’avant plusieurs idées qu’il avait avancées en 2003 dans le cadre de son plan de développement économique intitulé Projet Saint-Laurent, lequel ambitionnait de faire de la vallée du Saint-Laurent un nouveau Silicon Valley. C’est à cette époque que M. Legault avait rencontré Chantal Rouleau, qui avait quelque peu participé à l’élaboration de ce plan d’action.

Est-ce que le Projet Saint-Laurent pourrait avoir un impact dans l’Est de Montréal? « Absolument! M. Legault a formé un comité sur la stratégie maritime dont je fais partie, et cela aura des répercussions très importantes dans l’Est, mais des répercussions positives », dit-elle. Le gouvernement caquiste désire profiter de la proximité du fleuve et bien évidemment du Port de Montréal pour faire de l’Est une zone d’innovation liée notamment au transport maritime. « Le Saint-Laurent, c’est l’artère vitale du Québec. Nous avons à protéger cette ressource, et nous pouvons aussi la considérer comme un vecteur important du développement économique, du moins encore plus qu’avant », affirme Mme Rouleau. Pour elle, le fleuve pourrait servir davantage pour le transport de marchandises, ce qui pourrait réduire le transport routier lourd qui longe le port, mais aussi pour la mobilité de la population locale. « On l’a bien vu cet été dans Pointe-aux-Trembles, le projet pilote de navette fluviale vers le centre-ville a très bien fonctionné. Je crois fermement que le fleuve peut devenir un de nos outils de transport collectif dans l’Est », affirme-t-elle.

Élections dans RDP-PAT : Chantal Rouleau dit rester neutre

L’arrondissement de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles aura un nouveau maire le 16 décembre prochain, jour d’élections partielles fixé par la Ville de Montréal à la suite de l’élection de Chantal Rouleau à l’Assemblée nationale.

Deux principaux candidats se font la lutte pour la mairie d’arrondissement, soit Caroline Bourgeois, conseillère de la Pointe-aux-Prairies entre 2009 et 2013 avec Vision Montréal et par la suite directrice de cabinet pour Chantal Rouleau, alors membre d’Équipe Coderre, et Manuel Guedes, ancien conseiller d’arrondissement, toujours d’Équipe Coderre, qui avait toutefois perdu son siège au terme de la campagne en 2017.

La candidature de Mme Bourgeois, cette fois pour le parti de Valérie Plante, Projet Montréal, en a fait sourciller plus d’un sur la scène politique montréalaise. Toutefois, Chantal Rouleau nie catégoriquement une quelconque ingérence dans la course à la mairie. « Je ne suis pas impliquée dans l’élection municipale. Je vais travailler avec la personne que les gens de RDP-PAT vont élire, je ne veux pas m’en mêler », soutient la nouvelle ministre responsable de la Métropole. Lorsqu’on lui pose la question à savoir si l’élection de Projet Montréal dans RDP-PAT ne lui faciliterait pas la tache dans son nouveau rôle, Chantal Rouleau répète qu’elle ne soutient officiellement personne et qu’elle est prête « à travailler avec le nouveau maire ou la nouvelle mairesse, qu’importe ses allégeances. »