UNE ÉCOLE À ANJOU FORME DES PROFESSIONNELS DE L’ACIER DEPUIS 25 ANS
Créé en 1998, le Centre de formation des métiers de l’acier (CFMA) est à vocation «nationale». 15 enseignants y encadrent entre 140 et 180 élèves venus de toute la province chaque année. Il a pour mission de fournir des professionnels de l’acier à toute l’industrie de la construction au Québec.
Situé à Anjou au 9200 de la rue de l’Innovation, l’établissement est ainsi le seul au Québec à offrir trois diplômes d’études professionnelles (DEP), en pose d’armature du béton, en chaudronnerie et en montage structural et architectural. « Ces DEP préparent aux métiers de ferrailleur, chaudronnier et montreur-assembleur dans la construction. Ces professions sont méconnues, et à faible population », indique Denis Ouellet, directeur général du CFMA. Un autre DEP est dispensé en fabrication de structures métalliques et de métaux ouvrés menant au métier d’assembleur, mais dans ce cas il ne s’agit pas d’une exclusivité du CFMA dans le réseau scolaire québécois.
Les statistiques annuelles 2022 de la CCQ confirment que ces métiers ne sont pas les plus courants sur les chantiers. L’an dernier on recensait au Québec 2 053 ferrailleurs, 3 533 monteurs-assembleurs et seulement 637 chaudronniers, apprentis compris. Pour les chaudronniers, il est question ici de professionnels spécialisés qui travaillent généralement sur de grosses installations industrielles.
Des formations et des compétences
Pour les dirigeants du centre, la formation initiale enseignée à travers les DEP est cruciale, car elle permet notamment aux diplômés de travailler sur les chantiers en toute sécurité. Ils ont par exemple appris à travailler en hauteur, dans des situations à risque, ou encore à utiliser correctement un harnais, et bien évidemment, tout cela en plus de l’ensemble de leurs connaissances techniques en poche. Pour travailler rapidement dans le domaine de la construction, il y a donc la solution de se former au préalable dans un centre de formation comme le CFMA et d’obtenir des cartes de compétence.
Il y a aussi la possibilité d’y accéder aujourd’hui avec le programme «Bassin Ouvert, pénurie de main-d’œuvre» de la Commission de la construction du Québec (CCQ), mais cette dernière voie serait relativement dangereuse, selon les dirigeants du CFMA, « car les employés arrivent sur les sites sans connaissances du métier, des outils et des risques existants. » Mieux vaut donc une formation adéquate assurant aussi un avenir à long terme, et qui ouvre des portes pour d’autres formations plus avancées et des perspectives de carrières avantageuses.
Un recrutement difficile…
« L’accès possible à nos métiers sans DEP rend plus compliqué notre recrutement, déplore M. Ouellet. Un ferrailleur peut avoir un salaire horaire de 45 ou 46 $ l’heure. Cela est alléchant de passer par la voie la plus rapide, sans formation ni cartes de compétence. Mais ce n’est pas une bonne solution car pour maîtriser un métier, faut passer par une formation donnée par des professionnels et une institution reconnue. »
Pour combler ses cohortes, le centre fait donc la promotion des métiers lors de salons, dans des camps d’entraînement et dans les écoles secondaires. Les jeunes peuvent par ailleurs en tout temps participer à son activité « Élève d’un jour » pour découvrir un ou plusieurs métiers de l’industrie.
« Nous recrutons des étudiants sur l’ensemble du Québec, un immense territoire. Nous devons fournir une main-d’œuvre de qualité aussi bien aux entreprises du Lac-Saint-Jean, de Gaspésie comme à celles de Montréal », explique Steeve Tremblay, directeur adjoint du CFMA.
Les cohortes de DEP comprennent généralement une ou deux filles, qui sont les bienvenues. L’équipe compte même une enseignante en chaudronnerie, Nathalie Delisle, une pionnière, en poste depuis 10 ans. Le milieu de la construction a beaucoup de mal à recruter la gente féminine malgré beaucoup d’efforts de la CCQ ces dernières années, donc le CFMA est particulièrement heureux d’accueillir ces étudiantes chaque année, même si on en voudrait beaucoup plus nous dit-on. Des intéressées?
… mais des atouts
L’école possède aussi des avantages, comme le fait d’être un établissement provincial, donc sans concurrence directe, et à échelle humaine. « Notre centre est petit et familial, ajoute l’adjoint. Les gens qui ont étudié ici reviennent des années après pour suivre des ateliers de perfectionnement, tout le monde se connait. La petite équipe du CFMA demeure très accessible et donne beaucoup de support aux étudiants quand ils ont des difficultés d’apprentissage ou personnels, surtout que certains sont loin de chez eux. L’établissement est vivant et nous travaillons en synergie, comme une ruche. »
Un autre volet : la formation continue
En complément des DEP, 3 500 travailleurs en poste y sont formés chaque année, pour un total d’environ 10 000 heures, au travers de 350 ateliers de perfectionnement. Leur durée varie de 13 à 150 heures, et ils peuvent concerner les opérations de nacelles, de chariots élévateurs ou des apprentissages plus spécifiques. « Dans la construction du pont Champlain, nous avons été sollicités pour former tous les travailleurs qui avaient à faire du boulonnage sur les structures et des épissures [liaisons entre deux poutres d’acier], comme une assurance qualité », raconte le directeur.
La sécurité des travailleurs d’abord
Tous les programmes comprennent un volet santé et sécurité, et le centre travaille en étroite collaboration avec la CNESST lors d’accidents de travail qui concernent son champ d’expertise, notamment pour participer aux enquêtes. Selon les deux cadres dirigeants, l’intérêt dans cet échange est d’avoir « une rétroaction de la part de la CNESST sur les incidents et enquêtes, afin de pouvoir actualiser les formations en prenant en compte les bonnes pratiques. »
Il y a deux ans, après avoir appris de la CNESST que les trois derniers accidents de travail graves s’étaient déroulés lors de l’installation de pontage pour les toits, impliquant des monteurs, le CFMA a réagi. Il a fait changer son toit de pratique de 5 mètres sur 5 avec une hauteur de 1 mètre du sol, par un autre de 15 mètres sur 15 avec une hauteur de 3 mètres, plus proche de la réalité d’un travail en hauteur, après avoir validé les bonnes techniques et procédures pour éviter les blessures.
Le CFMA doit donc s’adapter en continue. Cela a été le cas par exemple avec l’actualisation du DEP en pose du béton, avec l’ajout de la fabrication de pièces de béton hors chantier, devenue une pratique courante dans l’industrie. « Pour le pont Jacques-Cartier, une usine proche du chantier a servi à fabriquer les poutres et dalles de béton, ensuite transportées puis installées, avec l’intervention de ferrailleurs », rappelle M. Ouellet.
Une organisation scolaire à part
À vocation nationale, le Centre de formation des métiers de l’acier n’a pas de conseil d’établissement comme les autres écoles du réseau scolaire régulier au Québec. Il dispose toutefois d’un comité de gestion chargé de fixer ses orientations, et qui est composé de représentants du Centre de services scolaire de la Pointe-de-l’Île (CSSPI), du patronat, des syndicats, des associations du domaine et du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur du Québec.
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