LE CDEM « 2.0 » SERA PLUS INFLUENT AVEC DES PRISES DE POSITION PUBLIQUES
Le Comité de développement de l’est de Montréal (CDEM), qui rappelons-le, a été mis sur pied il y a une dizaine d’années dans un contexte de « post démantèlement de Shell dans l’est de Montréal » par l’ex-députée de Pointe-aux-Trembles, Nicole Léger, avec à ses côtés le maire de Montréal-Est, Robert Coutu, est semble-t-il passé à une autre ère la semaine dernière.
Ainsi, c’est plus de 70 membres du CDEM qui ont participé le 25 septembre dernier via vidéoconférence à une rencontre chargée d’émotion où l’on a notamment souligné le départ de Mme Léger à titre de présidente de cette grande table de concertation de l’est de Montréal. Les députés Vincent Marissal et Alexandre Leduc lui ont alors remis la médaille de l’Assemblée nationale du Québec pour son engagement envers l’est de Montréal, un geste qu’elle ne s’attendait pas et qui, visiblement, l’a très touché.
C’était aussi l’occasion d’annoncer officiellement l’entrée en fonction d’un nouveau comité de transition pour le CDEM dont la co-présidence est maintenant assurée par le maire de l’arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, Pierre Lessard-Blais, et le maire de Montréal-Est, Robert Coutu. Ces derniers seront appuyés par trois vice-président.es, soit Malika Habel, directrice générale du Collège de Maisonneuve; Dimitri Tsingakis, directeur général de l’Association industrielle de l’est de Montréal; et Annie Bourgoin, directrice générale de PME MTL Est-de-l’Île.
Le CDEM regroupe en date d’aujourd’hui près d’une centaine de membres provenant d’élus et de personnel politique de tous les paliers de gouvernement, d’organismes, de corporations, de tables de concertation, d’institutions et autres leaders de l’est de Montréal, soit de Rosemont à la Pointe-de-l’Île et du nord au sud. Il a pour mission de « promouvoir, consolider et favoriser le développement économique, social et environnemental de l’est de Montréal par sa prise en charge collective », peut-on lire sur leur communiqué de presse émis cette semaine.
Un CDEM en évolution
À part la création d’un comité de transition, qui s’avère en fait la nouvelle direction du CDEM, la mouture 2.0 de cette table de concertation amène un autre changement d’envergure qui aura certainement un impact majeur sur la pertinence et la pérennité du CDEM. Il s’agit d’un nouveau mécanisme interne qui permet à l’organisation de prendre plus facilement position, officiellement et publiquement, concernant différents enjeux dans l’est montréalais. À partir de maintenant, si 75 % ou plus des membres sont d’accord avec une prise de position du CDEM, celle-ci peut être diffusée publiquement, alors qu’auparavant cela prenait l’unanimité pour le faire. Donc pas étonnant qu’en dehors d’un certain cercle fermé, on entendait finalement peu parler du CDEM, malgré l’impressionnant rassemblement des forces vives de l’est autour de sa table.
« En fait, c’était ça le grand défi du CDEM 2.0 : passer de la parole aux actes, en quelque sorte », a exprimé Robert Coutu hier, lors d’un entretien téléphonique avec EST MÉDIA Montréal. Même son de cloche du coté de l’autre co-président, Pierre Lessard-Blais. « Pour que le CDEM demeure pertinent, il faut qu’il soit capable de se positionner et de jouer son rôle d’influenceur et de rassembleur. Notre nouvelle règle du 75 % a été conçue en ce sens », nous a-t-il déclaré.
D’entrée de jeu toutefois, les deux maires ont tenu, lors de l’entrevue, à souligner l’exceptionnel travail de Nicole Léger ces dix dernières années à la direction du CDEM. « C’est une logistique vraiment intense le CDEM. Mme Léger ne comptait pas ses heures, bénévolement, pour convaincre des dizaines et des dizaines d’acteurs influents de l’est à participer à cette grande table, année après année, et surtout élection après élection. Je me souviens que moi-même, à ma première année de mandat, je m’intéressais peu au CDEM, mais Nicole revenait me voir régulièrement, me parlait et m’expliquait pourquoi le CDEM était si important pour l’est de Montréal. Elle était très convaincue et convaincante, la preuve, j’ai accepté aujourd’hui la co-présidence (rires) », témoigne le maire de MHM. Quant à Robert Coutu, grand ami de Nicole Léger, maire de Montréal-Est et membre fondateur du CDEM, il affirme que le grand tour de force accompli par l’ancienne députée péquiste est d’avoir créé un espace concret, et en bout de ligne puissant, où peuvent enfin se rencontrer régulièrement les leaders de l’est de Montréal. « L’est de Montréal est composé de plusieurs territoires et entités administratives et on ne savait pas nécessairement tout ce qui se passait auparavant chez nos voisins, on ne se côtoyait pas tant que ça. Le CDEM a fait en sorte que pas mal tout le monde dans l’est se parle maintenant sur une base régulière, et nous avons des buts communs, des défis communs, même si la réalité n’est pas la même nécessairement à Montréal-Est qu’à Montréal-Nord, par exemple. Mais chose certaine, on se connaît mieux aujourd’hui et c’est plus facile de faire front commun, grâce à l’initiative de Nicole Léger », explique Robert Coutu.
Alliance pour l’Est de Montréal versus CDEM
Une autre table de concertation importante s’est créée en 2019 dans l’est de Montréal sous l’égide notamment de la Société de développement Angus et de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal, sous l’appellation « Alliance pour l’Est de Montréal » et regroupant en date de janvier dernier quelque 24 organisations provenant des secteurs institutionnels, corporatifs et communautaires de l’est de Montréal, dont plusieurs sont aussi membres du CDEM. À la différence de cette dernière organisation, l’Alliance pour l’Est de Montréal exclut de ses rangs, pour le moment du moins, tout élu et personnel politique.
Disant vouloir réunir « les forces vives de l’est de Montréal » et « viser un véritable New Deal ouvrant la voie à un renouveau durable pour l’Est de Montréal », l’Alliance pour l’Est de Montréal pouvait être perçue jusqu’à aujourd’hui comme une organisation en voie de remplacer éventuellement le CDEM, mais les choses semblent s’éclaircir avec l’évolution toute récente du CDEM. « L’Alliance pour l’Est de Montréal est sur un tout autre registre que le CDEM car nous ne sommes ni une table de conversation ni une organisation de lobbying. L’Alliance se veut une organisation de transformation du territoire dans une perspective de transition sociale et écologique. L’Alliance existe pour que des projets dans les différents quartiers de l’est de Montréal émergent et se concrétisent dans une volonté de transformation », explique Christian Yaccarini, président et chef de la direction de la Société de développement Angus.
C’est d’ailleurs une définition que semble partager Pierre Lessard-Blais à propos de l’Alliance : « D’après-moi, leur rôle est plutôt centré dans la réalisation de projets, alors que le CDEM se veut plus comme un groupe influenceur pour définir et appuyer les grandes priorités de l’est de Montréal. Le CDEM n’est pas un porteur de projets comme l’Alliance. Je crois que nous avons un rôle complémentaire, mais ce sera à l’Alliance de se définir plus clairement », dit-il.
Christian Yaccarini se dit également heureux de la transition que semble amorcer le CDEM. « Je suis très content qu’il se transforme. Le CDEM demeure une table de concertation et c’est important d’avoir un tel lieu dans l’est de Montréal. Que le CDEM devienne aussi une organisation de lobbying auprès des instances gouvernementales pour faire avancer des dossiers de l’est est en soi une excellente chose », avance-t-il. Sur le plan de la représentation politique au sein même du CDEM, le dirigeant de la SDA apporte la réflexion suivante : « Bien sûr, comme tout le monde, je me pose la question sur la capacité que nous aurons à prendre des positions communes fortes compte tenu des différents partis politiques qui y sont représentés. De la même façon, le fait que les deux co-présidents soient des élus politiques, que les appareils politiques soient si impliqués dans le CDEM peut être un atout comme une difficulté. Mais globalement c’est une avancée pour l’est. »
Les dix priorités du CDEM
Voici les nouvelles priorités du CDEM officiellement adoptées la semaine dernière, et qui devraient diriger les travaux de cette table de concertation pour les mois à venir, sinon les années à venir :
TRANSPORT ET LOGISTIQUE
- Accélérer l’implantation d’un nouveau mode de transport collectif structurant et durable reliant le centre-ville et la Pointe-de-l’Île de Montréal en s’assurant notamment qu’il s’intègre harmonieusement aux milieux de vie et aux pôles d’emplois traversés.
- Prendre les mesures nécessaires pour assurer l’aboutissement des travaux du prolongement de la ligne bleue du métro vers l’Est de l’Île de Montréal.
DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL
- Investir massivement et rapidement dans la décontamination des sols et dans le développement d’infrastructures de l’Est de Montréal en vue de relancer et exploiter son plein développement économique et social dans le respect des principes du développement durable.
- Reconnaître l’Est de Montréal comme un territoire stratégique afin d’y établir des zones/pôles d’innovation basés sur les secteurs porteurs, notamment l’économie circulaire et les technologies propres, les sciences de la vie et les technologies de la santé, le bioalimentaire, la logistique et le transport, en s’appuyant sur le savoir et le développement durable.
SAVOIR, EMPLOI ET ENTREPRENEURIAT – VOLET SAVOIR ET EMPLOI
- Soutenir la mise en place et la pérennité d’initiatives favorisant l’accès aux études supérieures et le développement d’une main d’œuvre qualifiée pour la population de l’Est de Montréal.
- Amener les entreprises à développer et à renforcer leurs liens avec les établissements d’enseignement et les acteurs en innovation et en recherche appliquée (collégial et universitaire), en favorisant notamment l’accès à ces ressources.
SAVOIR, EMPLOI ET ENTREPRENEURIAT – VOLET ENTREPRENEURIAT
- Soutenir les initiatives émergentes permettant tant de stimuler l’entrepreneuriat (notamment pour les communautés culturelles), que de favoriser l’attraction d’entreprises innovantes (notamment en technologies propres, bioalimentaire et sciences de la vie et technologies de la santé) et de développer des projets d’affaires mettant de l’avant des modèles circulaires.
- Développer et pérenniser des initiatives de développement de la culture entrepreneuriale en milieu scolaire (ex : jeunes entreprises, clubs entrepreneurs, coopératives étudiantes, collégial en affaires, programmes spécifiques, etc.).
MILIEU DE VIE ET SANTÉ
- Pérenniser le financement du Programme de développement de l’habitation sociale et communautaire.
- Développer un parc de logements locatifs adéquat et inclusif avec considération de la capacité de payer des ménages locataires du territoire.
Le dossier spécial « L’EST EN DÉVELOPPEMENT 2020» a été rendu possible grâce à la collaboration des partenaires suivants :