La rue Masson dans le quartier Rosemont (photo : EMM).

CAMPAGNES DE SOCIOFINANCEMENT POUR L’ACHAT LOCAL : LA SOLIDARITÉ AU-DELÀ DE L’ARGENT

En ces temps de pandémie, pas moins de quatre campagnes de sociofinancement ont été lancées cet été sur la plateforme numérique La Ruche pour stimuler l’achat local sur le territoire de l’Est de Montréal. Elles ont toutes atteint leur objectif, et beaucoup plus dans le cas de l’arrondissement de MHM où 251 580 $ ont été amassés en appui aux commerçants de la SDC Hochelaga et de l’Association des commerçants de Tétreaultville, sur un objectif initial de 75 000 $.

Les autres campagnes ont été réalisées pour les commerçants de la Promenade Masson dans Rosemont (100 420 $), les commerçants de Montréal-Nord (100 000 $) et l’Association des commerçants et professionnels du Vieux-Pointe-aux-Trembles (38 260 $ en date d’aujourd’hui).

Rue Ontario, principale artère commerciale de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve (photo : EMM).

Le concept de ces levées de fonds est pratiquement identique d’une association à l’autre : le contributeur pouvait acheter des certificats de 20 $ à dépenser dans le commerce de son choix, mais d’une valeur réelle de 30 $ compensée par les partenaires de la campagne, soit principalement les Caisses Desjardins locales et les arrondissements. Dans certains cas les Sociétés de développement commercial et associations de commerçants ont aussi contribué à leur campagne locale. Ainsi, le consommateur en obtient plus pour son argent, alors que les commerces de proximité pourront bénéficier d’une certaine rentrée d’argent, dépendant de leur popularité auprès des contributeurs de la campagne qui choisissent évidemment où ils veulent bien dépenser leurs bons d’achat.

Au final, c’est la vague de solidarité qui impressionne

Tout dépendant de l’angle que l’on adopte pour analyser le phénomène, on peut déduire que les montants amassés sont considérables… ou minimes considérant le nombre de commerces impliqués et qui se partagent en théorie les sommes, dans un contexte ou le commerce de détail a été foudroyé par la Covid-19 en subissant d’énormes pertes dans plusieurs cas.

Mais chose certaine, et les principaux intervenants s’accordent sur un point : ces campagnes ont eu un impact économique réel sur leur territoire respectif, et ont surtout jeté un baume sur la morosité qui s’amplifiait depuis le printemps du côté des propriétaires de commerces locaux, qui ont pu constater à quel point ils sont importants aux yeux de la population qui les entoure. Une aide financière certes, mais un appui moral qui a fait du bien nous a-t-on répété dans le cadre de ce reportage. De plus, il faut spécifier que ces campagnes de sociofinancement sont un outil qui s’ajoute finalement aux différents programmes d’aide des trois paliers de gouvernement. C’est le cumul de différentes sources de financement qui fera vraisemblablement la différence en bout de ligne pour le commerce de proximité.

Rue Hochelaga, dans Tétreaultville (photo : EMM).

« Le montant amassé, pour plusieurs, a été très significatif et aidant pour poursuivre leurs activités. Ceci dit, en plus des fonds amassés, de savoir que la population est présente en support aux entrepreneurs a également été un aspect marquant dans ce projet. À voir les citoyens et citoyennes qui achètent des certificats, ça permet de valider que la clientèle sera au rendez-vous lors de la reprise économique. Et qu’ils ont hâte de revenir en commerce, qu’ils sont présents et pas loin! C’est aussi cet aspect non-négligeable qui a permis de donner du courage aux commerçants, et un soutien moral aux entrepreneurs. Cette partie du projet est moins quantifiable, mais elle était ressentie lors de l’annonce des montants officiels amassés à chacun des commerçants participants, qui recevaient également la liste de leurs contributeurs, et c’était assez touchant pour plusieurs » a déclaré Viviane Caron, directrice générale de l’Association des commerçants de Tétreaultville.

Du côté de Montréal-Nord, le directeur général de la CDEC sur ce territoire, Jean-François Gosselin, se dit très satisfait du 100 000 $ recueilli pour aider les commerçants de l’arrondissement. Ce secteur a été particulièrement éprouvé par la pandémie, rappelons-le. « Il s’agit d’un signal fort envoyé par près de 300 personnes en soutien aux commerces de notre territoire, ce n’est pas rien. Est-ce que l’impact est suffisant pour combler manque à gagner des derniers mois? Bien sûr que non. Par contre, l’ajout de liquidité dans les commerces aidera les propriétaires à faire face aux dépenses les plus urgentes. N’oublions pas qu’ils ont dû aménager leurs commerces pour s’assurer de limiter la propagation du virus, et ils devront payer bientôt leurs comptes de taxes municipales en plus des dépenses courantes et ce dans un contexte d’achalandage en forte baisse. La campagne de sociofinancement va certainement les aider à souffler un peu », affirme M. Gosselin.

Jean-François Gosselin, directeur-général de la CDEC Montréal-Nord (photo tirée de la page Facebook de l’organisme).

Ce dernier affirme que la CDEC Montréal-Nord devrait lancer une nouvelle levée de fond dès septembre, alors que les consommateurs devraient pouvoir acheter cette fois directement des bons d’achat chez les commerçants participants, ou encore en ligne.

Le directeur général de la SDC Hochelaga, Jimmy Veilleux, se dit aussi très satisfait des retombées de la campagne dans MHM. « Mais l’impact sera variable d’un commerçant à l’autre, certains attirent naturellement plus de consommateurs pour diverses raisons, donc ils en profiteront plus. Mais ça reste positif pour l’ensemble des participants qui ont adhéré à la campagne, ça c’est sûr. Je vois cette initiative comme un soutien supplémentaire aux aides gouvernementales et aux différents projets et fonds mis en place par la SDC avec ses partenaires, notamment l’arrondissement de MHM et la Caisse Desjardins d’Hochelaga-Maisonneuve, pour soutenir les commerçants », explique-t-il. Il est possible, toujours selon M. Veilleux, que la SDC réalise d’ailleurs d’autres projets du genre dans les mois à venir.

Pour conclure, Viviane Caron de l’Association des commerçants de Tétreaultville résume bien la pensée qui semble animer en ce moment les instigateurs de ces campagnes. « Je mentionnerais que le soutien des consommateurs envers leurs commerçants de quartier pendant cette crise est vraiment remarquable. La revalorisation de l’achat local par la population est intéressante actuellement. Il y a eu un déclanchement, une espèce de révélation pour les citoyens qui ont vécu la fermeture de plusieurs des commerces sur leur territoire de façon temporaire ce printemps. Cela a visiblement marqué plusieurs personnes, et les a sensibilisé du même souffle encore plus à l’importance des commerces de proximité », dit-elle.

NDLR : L’arrondissement de Saint-Léonard nous a confirmé qu’il n’avait pas orchestré ou appuyé de campagne de sociofinancement pour les commerçants sur son territoire. L’arrondissement d’Anjou et la Ville de Montréal-Est n’ont pas répondu à nos appels. Quant à l’arrondissement de VSMPE, il nous a indiqué avoir plutôt opté pour financer la livraison à domicile (en vélo) pour les commerces de Saint-Michel cet été. Finalement, la direction de la Promenade Masson et l’Association des commerçants et professionnels du Vieux Pointe-aux-Trembles ont décliné l’offre de participer au reportage.