Christine Fréchette, présidente et directrice générale de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal (photo courtoisie de la CCEM).

UN CAFÉ AVEC… CHRISTINE FRÉCHETTE

Christine Fréchette est passionnée du monde des affaires, spécialement celui de l’est de Montréal. Malgré son horaire très chargé, à quelques jours du Gala ESTim, la présidente de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal a accepté de prendre un café avec nous pendant quelques minutes via Zoom, le 28 septembre dernier.

EST MÉDIA Montréal : Vous êtes présidente de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal depuis 2016. Comment aimez-vous votre emploi?

Christine Fréchette : J’aime beaucoup ça, vraiment! Il y a une belle effervescence qui caractérise l’est de Montréal. Ça m’anime grandement! Une effervescence qui permet d’attirer de nouveaux joueurs économiques, de nous positionner comme un territoire attrayant et d’accompagner nos entreprises, particulièrement nos PME, car nous avons beaucoup de PME dans notre réseau. Nous avons au total 1200 membres. Nous offrons un service d’exportation qui accompagne environ 200 entreprises par année. Également, nous avons un service d’aide à l’innovation. Nous participons beaucoup à des consultations de nature publique qui ont trait au développement pour l’ensemble du territoire ou de certains secteurs spécifiques. C’est un travail très dynamique. Je suis entourée d’une magnifique équipe et les membres sont très engagés. Les gens ont l’est tatoué sur le cœur, et ça paraît. Ça crée une ambiance très agréable!

EEM : Quels ont été vos défis les plus difficiles jusqu’à maintenant? Une de ces épreuves s’appellerait-elle par hasard « COVID-19 »?

CF : (rires) Dans ces derniers mois, oui! C’était un défi autant pour nous que pour nos membres. Une pandémie qui nous fige à ce point, sur le plan économique et social, personne ne pouvait prévoir ça. La nécessité d’adopter des mesures urgentes, de faire des changements de cap, de réviser des plans de développement… Ça a pris tout le monde par surprise et nous continuons d’apprendre à nous adapter. L’équipe de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal a su pivoter rapidement et efficacement. On essaie toujours de défendre la voix des entreprises et organisations de l’est de Montréal ardemment dans ce contexte, tout en ayant en tête les enjeux sanitaires de santé publique. Trouver le juste équilibre entre la dynamique économique et la pandémie, c’est quelque chose que l’on doit réviser chaque semaine, en suivant l’évolution de la situation.

EEM : Vous, en tant que femme d’affaires d’expérience, avez-vous déjà connu une crise de cette ampleur?

CF :  Non, jamais. La pandémie a créé une crise très soudaine. D’habitude, on le sent lorsqu’une crise économique s’installe. Il va y avoir des signes avant-coureurs. Des fois, une crise économique peut survenir rapidement, mais jamais à cette vitesse. De plus, l’essor économique avant le mois de mars était très favorable. Ça allait très bien, spécialement pour Montréal. Avec l’arrivée de la pandémie, on a tourné le bouton à « off » de l’économie à la vitesse de l’éclair. Dans la dernière décennie, il y avait eu la crise de 2008, mais ça reste très différent en terme de rapidité de changement de contexte économique. Dans ce cas-ci, c’est une crise autoprovoquée par le confinement. On apprend à manoeuvrer dans un tel contexte.

EEM : Vous disiez, tout à l’heure, que votre équipe et vos membres ont l’est tatoué sur le cœur. J’imagine que vous êtes, vous aussi, une femme de l’est de Montréal?

CF : Oui! Je viens de déménager, mais j’ai habité sur le Plateau Mont-Royal pendant vingt ans. C’est fou de constater à quel point les gens ont un sentiment d’appartenance très fort pour l’est de Montréal. L’est de l’île est un territoire qui a vécu des périodes difficiles, dont le processus de désindustrialisation, qui a causé de nombreuses pertes d’emploi. Ça a changé beaucoup l’identité de l’est, et c’est comme si sa nouvelle identité n’était pas encore tout à fait définie. C’est sur quoi nous travaillons. Nous voulons faire connaître les atouts du territoire, son potentiel pour de nouveaux créneaux économiques, revitaliser ses artères commerciales, faire la promotion de ses forces, etc. Depuis quelques années, je vois que les gens aiment beaucoup ce que nous proposons, car ils ont à cœur le devenir de l’est de Montréal.

EEM : Quels sont ces nouveaux créneaux?

CF : Il y en a qui sont déjà existants, mais qui sont peu associés à l’est dans l’esprit des gens. Je pense, entre autres, aux sciences de la vie et de la technologie de la santé. Nous avons une expertise de pointe qui est reconnue à l’international. Notamment en immunothérapie, en thérapie cellulaire, en intelligence artificielle dans le milieu de la santé, etc. Il y a des forces déjà existantes dans l’est, mais la population n’associe pas ce coin de l’île à l‘innovation en santé. Je pense que ça va changer. Les industries culturelles sont aussi très très fortes ici. Nous n’avons qu’à penser aux sièges sociaux de Radio-Canada, TVA, ou de la Sodec qui sont établis dans l’est.

EEM : Et probablement 50% des artistes du bottin de l’UDA qui résident à l’est du boulevard Saint-Laurent! (rires)

CF : Il y a vraiment une force au niveau des industries créatives qui est très intéressante dans l’est de Montréal!

Photo courtoisie de la CCEM.

EEM : Parlons de la femme derrière la présidente. Vous êtes mère et vous avez travaillé dans le milieu des affaires longtemps. Comment vivez-vous la conciliation travail-famille?

CF : La conciliation travail-famille a toujours été un thème important à mes yeux. Il faut adapter le milieu du travail aux exigences de la conciliation travail-famille. Il faut faire en sorte aussi que les pères s’investissent pleinement dans le cadre de cette conciliation. J’ai siégé au Conseil de la femme pendant neuf ans. J’ai milité longtemps pour qu’on associe les responsabilités familiales tant au père qu’à la mère. On a ce réflexe de tenter d’adapter les situations professionnelles pour les mères, mais dans les faits, les pères doivent s’investir pour décharger les femmes de certaines responsabilités. Je pense que c’est un processus déjà en cours, mais il faut continuer à travailler là-dessus. J’ai lutté notamment pour que les pères obtiennent un congé paternel non transférable à la mère. C’est maintenant en vigueur au Québec.

EEM : Wow, félicitations! Est-ce qu’il reste des enjeux pour les femmes dans le milieu des affaires selon vous?

CF : Absolument. La présence des femmes dans les postes de pouvoir n’est pas encore optimale. Sur les conseils d’administration non plus. Nous sommes vraiment en retard sur ce plan-là. Il faut mettre encore de l’énergie pour que nos femmes exercent leurs talents d’entrepreneurship. Je pense que la nécessité d’offrir des mesures de soutien à nos femmes entrepreneures est encore pleine et entière. Heureusement, il y a eu des programmes et de la sensibilisation qui ont été faits ces dernières années. Je ne considère pas, par contre, que la situation est égalitaire à ce jour.

EEM : Quels conseils donneriez-vous à une jeune femme qui voudrait se lancer en affaires?

CF : De persévérer, d’avoir confiance en elle, de s’entourer de gens détenant des expertises intéressantes pour son domaine d’affaires, d’aller chercher du soutien… De ne pas avoir peur de s’adresser à des gens qui occupent des postes élevés. Des fois, des personnes que l’on croit inaccessibles peuvent être interpelées par nos demandes. Le dynamisme et la passion d’une entrepreneure peuvent devenir rapidement contagieux!


Le dossier spécial « L’EST EN DÉVELOPPEMENT 2020» a été rendu possible grâce à la collaboration des partenaires suivants :