La députée libérale d’Hochelaga, Soraya Martinez Ferrada (photo courtoisie).

BUDGET FÉDÉRAL : L’EST DE MONTRÉAL DANS LA MIRE D’OTTAWA

Le gouvernement fédéral présentait un budget très attendu le 19 avril dernier. À l’intérieur des près de 900 pages qu’il contient, un encadré mentionnant l’est de Montréal retient l’attention. On a voulu en savoir plus. Rencontre avec la libérale Soraya Martinez Ferrada, députée fédérale de la circonscription d’Hochelaga.

À travers un budget des plus progressistes et dépensiers, Ottawa s’est donc positionné, souhaitant « établir un partenariat sur les priorités régionales dans la Zone d’innovation de l’Est de Montréal ». En page 243, on peut lire ceci : « Sur le terrain : L’est de Montréal a une longue histoire d’activité industrielle, et des travaux sont en cours en vue de revitaliser le secteur pour l’économie de demain. Ce secteur a le potentiel de devenir une plaque tournante pour la recherche novatrice et pour les entreprises en démarrage et celles en expansion. Le gouvernement demeure favorable à de nouvelles approches visant à favoriser l’innovation, à aider les entreprises à se développer et à créer de nouveaux emplois, et il étudiera comment il pourrait s’associer pour mieux soutenir les possibilités de développement offertes aux Canadiens de toutes les régions, dont l’est de Montréal. »

Ce n’est pas par hasard qu’un tel encadré est apparu dans le budget, et la députée d’Hochelaga a quelque chose à y voir. « Le rôle du député, c’est celui de s’assurer que la voix de sa circonscription soit entendue à Ottawa. J’ai travaillé en concertation avec tous les acteurs de l’est, autant les organismes, les entreprises, le Comité de développement de l’est de Montréal et la Chambre de commerce de l’est de Montréal. Mais c’est sûr que c’est moi qui apporte la voix des gens de mon comté et de l’est au cabinet des ministres et à la ministre des Finances », dit fièrement Soraya Martinez Ferrada. Le tout représente un travail de plusieurs mois et découle de consultations virtuelles menées par la députée auprès des entreprises et des citoyens. « Le résultat aujourd’hui est que le gouvernement reconnaît l’importance de l’est, c’est écrit dans un budget fédéral pour la première fois et c’est un gain important pour nous. »

Mais quelles retombées pour l’est?

L’est de Montréal est bien sûr rempli de potentiel, mais reste un territoire au passé industriel plutôt lourd. Pensons aux pétrolières qui marquent passablement le paysage, ou encore aux activités portuaires et autres grandes industries, par exemple. Alors, que compte faire le fédéral exactement pour amener plus de bleu et plus de vert dans l’est de Montréal? « Ottawa ne choisit pas les projets. Ce sont les communautés qui le font. Ce qu’on a fait dans le budget, c’est de reconnaître l’importance de soutenir la croissance économique et de l’emploi, et donc d’assurer qu’Ottawa devienne un partenaire des choix que feront Québec et Montréal », explique la députée, aussi secrétaire parlementaire du ministre des Transports. « D’ailleurs, sur la question du transport collectif, une chose importante à noter, c’est qu’on vient tout juste d’annoncer un financement historique de 15 milliards qui va permettre d’être un réel partenaire dans des projets en transport partout au pays. » Avec la venue prochaine du Réseau express métropolitain (REM), le fédéral pourrait donc être appelé à en devenir partenaire.

Le financement du fédéral passe parfois inaperçu. Pensons à la construction de la piscine et de la pataugeoire du parc Joseph-Paré, dans le Nouveau-Rosemont; le gouvernement du pays y a participé à hauteur de 1,5 million. Du côté du logement, la Maison Tangente, L’Anonyme, CARE Montréal et Cap St-Barnabé, des organismes situés à Hochelaga ou à Mercier, profitent régulièrement de subventions provenant du fédéral. « On a ajouté 2,5 milliards supplémentaires pour construire du logement abordable et un montant sur 2 ans pour soutenir les gens en situation d’itinérance. Et c’est en partie le financement du fédéral qui a permis qu’on puisse financer l’hébergement d’urgence au YMCA l’hiver passé », soutient Soraya Martinez Ferrada. Et avec la pandémie qui sévit toujours en cette troisième vague, le gouvernement du Canada compte poursuivre le financement en sécurité alimentaire également. Bien sûr, tout cet argent n’est pas entièrement destiné à l’est de Montréal. Néanmoins, comme les communautés les plus vulnérables sont aussi les plus impactées par les conséquences économiques de la COVID-19, ce secteur de la métropole a droit à une bonne part du gâteau. « Et mon rôle en tant que députée, c’est de m’assurer que les gens dans notre comté et dans l’est de Montréal vont aller chercher l’argent qui leur revient dans les programmes qui existent. Et de l’argent, il va y en avoir et je suis convaincue qu’il va atterrir dans notre comté. »

Progrès et féminisme

Avec son soutien aux programmes sociaux, mais aussi sa volonté de créer des services de garde subventionnés partout au pays, le gouvernement fédéral annonce ainsi ses couleurs féministes. Les statistiques le démontrent : ce sont les femmes qui sont le plus durement touchées économiquement par la pandémie de COVID-19 en plus de souvent hériter de la garde des enfants à la maison lorsqu’écoles et garderies ferment. « On met sur pied les fondations qui permettront d’assurer une relance économique durable, mais aussi féministe. La place et le retour des femmes sur le marché du travail ainsi que l’appui à tous les travailleurs passent par les subventions salariales, les congés de maladie, le programme de relance économique (PCRE), le soutien aux PME et l’accès aux garderies », soutient Soraya Martinez Ferrada. « Il faut donner les moyens de créer des services de garde solides, ce qui n’est pas le cas partout au pays. » Le budget actuel mise donc sur leur développement. Est-ce que le Québec aura sa part quand même, lui qui subventionne déjà ses services de garde? On imagine que oui, mais une chose est sûre, c’est que le gouvernement fédéral en place reconnaît l’exemple à suivre qu’est le Québec et le consultera. Ses centres de la petite enfance créés par le Parti québécois en 1997 servent déjà de modèles ailleurs dans le monde. « Ça démontre que le Québec a toujours été progressiste dans ses innovations sociales. Il sera l’exemple sur lequel on va s’inspirer, ce qui devrait nous rendre très fiers. » Le budget mentionne aussi que plus d’argent ira aux familles et que l’allocation canadienne pour enfant sera augmentée.

Toutes ces annonces, aussi progressistes soient-elles, coûteront cher, très cher. Le déficit, qui a atteint en 2020-2021 354 milliards, s’abaissera, selon la ministre des Finances Chrystia Freeland, à 154,7 milliards en 2021-2022, ce qui reste très élevé. Qu’en pense la députée de Hochelaga? « Je pense que ce que le budget dit, c’est que ce n’est pas à l’individu de s’endetter pour passer à travers cette crise, mais c’est au gouvernement, collectivement, de s’endetter pour s’assurer que tout le monde passe au travers. » Somme toute, pour les libéraux au pouvoir, le temps n’est donc pas à l’austérité, mais plutôt à l’abondance, et ce, afin de ne laisser personne derrière… mais aussi peut-être un peu parce que le vent des élections commence à souffler.