Alain Poloni, l’aventurier aux commandes de l’Heureux Bouddha. (Photos : EMM)

DE GLOBE-TROTTEUR À ENTREPRENEUR, LE PARCOURS INSPIRANT D’ALAIN POLONI

Au début des années 80, Alain Poloni, actuellement propriétaire de la boutique d’objets décoratifs et exotiques l’Heureux Bouddha, part à la conquête de la planète, réalisant ainsi un de ses plus grands rêves. Après cinq années autour du monde et plus de 34 pays découverts dans les années qui suivirent, ce véritable globe-trotteur est devenu un entrepreneur créatif, très apprécié des citoyens de l’Est de Montréal. De l’Ouest canadien à l’Amérique du Sud, en passant par les États-Unis et l’Asie du Sud-Est, pour finalement terminer son périple en Afrique du Nord, son parcours est pour le moins étonnant et… inspirant!

Jeune aventurier

Après avoir été refusé au Cégep, M. Poloni profite de cette occasion pour voler de ses propres ailes et aller apprendre d’une autre façon. Alors qu’aujourd’hui la tendance nomade est à son apogée et qu’il est commun de mettre ses études sur pause le temps d’une session sabbatique à l’étranger, c’était beaucoup moins répandu il y a presque 40 ans. M. Poloni quitte le Québec avec le but de se rendre en Inde. Toutefois, ce n’est qu’après ses deux premières années à l’étranger qu’il s’y rendra finalement et c’est pourtant en arrivant en Indonésie qu’il a un véritable coup de cœur pour l’Asie du Sud-Est, son deuxième chez-lui. Au fil de ses trouvailles fascinantes et extraordinaires, Alain Poloni décide de finalement revenir au bercail après cinq ans sur la route, avec l’intention de partager ses coups de cœur, de faire voyager les gens à son tour et surtout de représenter les artisans locaux au Québec afin de favoriser l’économie autant régionale qu’orientale. Une idée qui mettra un peu de temps à se concrétiser, mais qui anime déjà les pensées du globe-trotter à cette époque.

Alors qu’il partait vivre une des plus grandes aventures de sa vie, Alain Poloni était bien conscient qu’une atmosphère pour le moins particulière l’attendait en Asie du Sud-Est. La guerre du Vietnam venant de se terminer et le génocide au Cambodge ayant semé la terreur, la tension était palpable. Pourtant, ça n’a pas arrêté l’aventurier dans l’âme. Évidemment, à cette époque et particulièrement avec le climat hostile qui régnait, peu d’Occidentaux s’aventuraient dans ces régions du monde. M. Poloni se rappelle d’ailleurs que l’un des tout premiers guides de voyages Lonely Planet sur l’Asie du Sud-Est venait tout juste d’être publié. Dans beaucoup d’endroits, il comptait parmi les premiers « blancs » autorisés à visiter le pays pour le tourisme. En 1986, on venait tout juste d’admettre les premiers voyageurs en Birmanie (maintenant le Myanmar) pendant qu’au Cambodge, c’était presque impossible puisque le pays était en train de se reconstruire. Ayant depuis visité l’ancienne Indochine plus de 8 fois, il se rappelle que durant ses premiers périples, l’électricité n’était pas encore accessible. Un énorme contraste avec la réalité du pays actuellement. S’étant finalement développé à la vitesse grand V dans les 15 dernières années, le Cambodge est méconnaissable, affirme M. Poloni. Les routes en terres battues et l’aspect rural ont été un peu mis de côté dans les grandes villes et c’est maintenant un pays fréquemment visité par les touristes, en raison de ses prix avantageux et de ses nombreux temples historiques mystérieux.

Avec plus de 34 étampes différentes dans le passeport de sa vie, Alain Poloni avoue avoir beaucoup de difficultés à choisir un favori. « Mon cœur est définitivement en Asie du Sud-Est, mais j’hésite entre le charme envoûtant de l’Indonésie, l’authenticité du Cambodge et l’exotisme des Philippines », nous confie-t-il. Ces influences se reflètent inévitablement dans les trouvailles que l’on peut faire chez l’Heureux Bouddha puisqu’environ 70% des objets proviennent de ces pays ainsi que de l’Inde et la Thaïlande.

L’Indonésie quant à elle, faisait partie de son circuit dès le départ. Il y a passé un court séjour avant de se rendre en Australie, puis y est revenu sept mois plus tard pour véritablement tomber en amour avec la région. À cette époque, très peu de touristes accaparaient la capitale balinaise, on trouvait encore plusieurs rizières abondantes à Ubud, et Kuta, quant à elle, était développée, mais on était loin du passage actuel. M. Poloni se considère très chanceux d’avoir pu explorer le pays alors qu’il était presque inconnu, mais nous rassure en nous disant qu’avec plus de 18 000 îles, il y a encore beaucoup à découvrir. L’Indonésie est loin d’être dénuée d’intérêt et à éviter, affirme le voyageur. De quoi titiller ceux qui rêvent de cette destination paradisiaque depuis toujours !

Rendre l’utile à l’agréable

Étant loin de se considérer comme un homme d’affaires né, Alain Poloni nous raconte que c’est vraiment le plaisir d’encourager les artisans et le fait de savoir que son entreprise aide les communautés locales à mieux vivre qui l’ont poussé à démarrer l’Heureux Bouddha alors qu’il venait d’un tout autre domaine que celui des affaires. Cette curiosité de vouloir dénicher des perles rares et de les partager avec la clientèle québécoise lui fait d’ailleurs redécouvrir ses endroits préférés à chaque fois.

Poloni a aussi ses endroits fétiches comme dans le quartier Tegalalang à Ubud, où il trouve de nombreuses merveilles. Même s’il retourne souvent chez les mêmes artisans depuis plusieurs années, il en trouve également de nouveaux à chaque visite. Il se rend d’ailleurs souvent jusque dans leurs ateliers pour voir la marchandise de plus près et faire des choix qui trouveront leur place dans sa caverne d’Ali-Baba. De savoir qu’il contribue à l’emploi là-bas, est définitivement une de ses plus grandes motivations à continuer. « Acheter pour 1000$ de stock là-bas, ça fait une méchante différence pour eux, ça leur permet de varier leurs menus, de faire rouler leur économie et d’augmenter la qualité de leur vie familiale. », dit-il avec une humilité sincère. Tel un véritable nomade, il part souvent en moto, du matin au soir, pour trouver ses trésors à travers les marchés et les rues sinueuses de Bali. Toutefois, n’étant pas un acteur assez imposant sur le marché, il ne peut pas toujours négocier des exclusivités afin de laisser une marge de manœuvre aux artisans. « Dans l’avenir, j’aimerais beaucoup ouvrir une deuxième succursale afin de partager plus et améliorer davantage l’économie locale autant au Québec qu’en Asie. » Sa boutique sur la rue Masson accueille d’ailleurs plusieurs œuvres d’artistes québécois aussi.

Alain Poloni en compagnie de la gérante de la boutique l’Heureux Bouddha, Myriam Letourneau.

Alain Poloni est un homme passionné par la vie qui semble d’ailleurs en avoir vécu plusieurs tant son parcours est diversifié. Après son épopée autour du monde, il part travailler en Arctique pour une compagnie minière. Au cœur du cercle polaire, il explore et procède à l’échantillonnage du sol à la recherche de diamants. « Je vivais dans un campement et on devait prendre l’hélicoptère tous les jours pour se rendre sur nos lieux de travail. Je ne m’en plaignais pas, j’ai toujours aimé l’hiver et le froid ne me dérangeait pas. », ajoute l’aventurier. Toutefois, lorsque sa fille naît, le voyageur recherche une plus grande stabilité et revient s’installer au Québec pour y travailler dans la construction dans le domaine du cinéma pour la conception des décors.

« L’entrepreneuriat, j’ai appris ça sur le tas. », nous dit-il sans gêne. Même si le facteur bonheur se ressent instinctivement quand on discute avec lui, l’entrepreneur de 57 ans nous avoue que si c’était à refaire, il s’informerait davantage des réglementations locales puisqu’il dit avoir eu beaucoup d’embûches au départ quant à l’utilisation de son local commercial. Après avoir reçu des amendes pour travaux non conformes, il a été forcé de faire affaire avec des contracteurs agréés afin de respecter la législation. « C’était contre-intuitif parce que je venais du domaine de la construction. J’ai toujours été habile de mes mains et passionné pour les travaux manuels. Je voulais que la boutique ressemble à la vision unique que j’avais en tête, mais j’ai trouvé ça dur au début avec les délais des contracteurs. Par chance, j’étais bien entouré et je pouvais toujours compter sur le soutien de mon épouse. » nous lance le globe-trotteur.

Un homme inspirant qui nous prouve que suivre son intuition et sortir de sa zone de confort pour trouver sa voie, c’est toujours gagnant.


La boutique l’Heureux Bouddha est située au 3022, rue Masson, à Montréal
www.heureuxbouddha.com