Manifestation du 29 septembre 2022 dans le cadre des élections provinciales, sous la bannière de la campagne Engagez-vous pour le communautaire (courtoisie RQ-ACA)

L’ACTION COMMUNAUTAIRE AUTONOME EN QUÊTE D’UN SOUTIEN ACCRU DE QUÉBEC

Le Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA) est aujourd’hui un acteur incontournable au Québec tant sur le plan social qu’économique. Son influence est considérable sur le développement des organismes qui oeuvrent « sur le terrain » pour améliorer le sort des plus vulnérables.

Créé en 1996, le RQ-ACA est l’interlocuteur entre le gouvernement et les organismes communautaires. Il compte 70 regroupements et organismes nationaux, sans oublier les 4 500 organismes de l’Action communautaire autonome (ACA) à travers tout le Québec. Actuellement, le RQ-ACA répertorie dans le réseau quelque 54 000 emplois alors que les organismes mobilisent pas moins de 425 000 bénévoles et militants. Ces organismes interviennent dans différents domaines, dont la violence conjugale, l’itinérance, la santé mentale, l’alphabétisation populaire, l’action bénévole, l’environnement, la défense des droits ou encore le logement, pour ne citer que quelques exemples. 

Un moteur économique majeur 

Outre son importance sociale indéniable, le RQ-ACA joue un rôle économique crucial au Québec. Le secteur représente en effet 1,6 % de l’ensemble des emplois de la province. Durant l’année 2021-2022, chaque organisme de l’ACA au Québec employait en moyenne 12 personnes, dont 7 à temps plein et 5 à temps partiel. 

« On est un secteur d’emploi qui est plus puissant que certains domaines économiques, qui sont pourtant présents depuis plus longtemps que nous au Québec », constate Caroline Toupin, coordonnatrice du RQ-ACA. À titre comparatif, le secteur de l’agriculture représentait environ 1,1 % des emplois au Québec 2022, d’après le Bulletin annuel sur le marché du travail au Québec de Statistique Canada. 

Selon les zones géographiques, le travail communautaire serait même indispensable au bon fonctionnement des municipalités : « Lorsque des intervenants du RQ-ACA vont dans certaines villes et villages québécois, ils constatent que les groupes communautaires représentent les principaux employeurs », souligne Tristan Ouimet-Savard, responsable de la mobilisation au RQ-ACA. 

De plus, pour 100 M$ investis dans le milieu communautaire, ce sont 183,7 M$ qui seraient injectés dans l’économie. Et pour ces mêmes 100 M$ , un produit intérieur brut (PIB) de 110 M$ serait généré alors que 1 900 emplois seraient maintenus ou créés, d’après le Mémoire aux consultations prébudgétaires de 2024 du RQ-ACA.

Un besoin urgent de financement 

Avec la pandémie et l’inflation qui s’en est suivie, entre autres, les besoins de la population subissent une croissance exponentielle ces dernières années. Donnée significative, 51 % des organismes de l’ACA notaient une augmentation du nombre de personnes qui utilisaient leurs services en 2021-2022 par rapport à l’année précédente. 

Cette croissance de la demande met à rude épreuve les 4 500 organismes de l’ACA, qui dépendent du financement de Québec pour accomplir leur mission. Néanmoins, ce financement ne représentait, en 2021-2022, que 27 % à 34 % des frais totaux des organismes de l’ACA. Ce qui signifie que, pour 2021-2022, le milieu communautaire était principalement financé par entente de services ou par des activités d’autofinancement, comme les dons ou le développement de volets d’économie sociale ou de projets : « C’est certain qu’il est plus intéressant pour un ministre ou un élu de financer un projet car il a davantage de contrôle sur ce que l’on fait », souligne Caroline Toupin. 

Les équipes des organismes communautaires sont les premières à souffrir de ce manque d’investissements. Le taux horaire moyen pour les emplois à temps plein dans les organismes de l’ACA était de 24,71 $ en 2021-2022, alors que le taux horaire moyen au Québec était de 32 $ : « La différence est énorme! Alors que la majorité de nos employés à temps plein possèdent un diplôme d’études postsecondaires! », insiste la coordonnatrice du RQ-ACA. 

Par conséquence, en 2021, le taux de roulement moyen était de 35 % dans les organismes de l’ACA, alors que ce taux était de 9,1 % pour l’ensemble de la province. Le nombre de postes vacants ne cesse d’augmenter : « Nos organismes ont exprimé avoir besoin de 3 personnes de plus en moyenne, ce qui représente 13 500 emplois supplémentaires », affirme Caroline Toupin. 

Les équipes du RQ-ACA en clôture d’une semaine de grève et d’actions le 24 février 2022 (courtoisie RQ-ACA)

Un demi-pas vers la reconnaissance 

Devant ce financement insuffisant et plusieurs réclamations du RQ-ACA, Jean Boulet, alors ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, déposait le 13 mai 2022 son nouveau Plan d’action gouvernemental en action communautaire (PAGAC). Le RQ-ACA a pu constater que 77 % du contenu du plan était inspiré de ses préoccupations : « C’était déjà une bataille idéologique de gagnée! », s’exclame Caroline Toupin. 

Mais si leurs aspirations ont été entendues, le manque d’investissements est resté un problème. D’après l’annonce du gouvernement, le PAGAC représentait un investissement de 1,1 milliard de dollars réparti sur 5 ans, dont 80 % allait être investi dans la mission globale. Néanmoins, la présentation du gouvernement était assez éloignée de la réalité : « 860 millions sera donné à la mission globale au terme des 5 ans, mais c’est une addition qui ne devrait pas se faire. En réalité, c’est 234 millions de plus qui reviennent chaque année. Après cinq ans, cet argent restera dans la mission globale en tant qu’investissement », explique la coordinatrice du RQ-ACA. 

De plus, le budget du gouvernement se base sur une évaluation qui date de 2016 : « On était donc pré-pandémie, pré-inflation, pré-pénurie de main-d’oeuvre… Entre la première évaluation de nos besoins à cette époque et aujourd’hui, nous avons besoin d’un budget à multiplier par cinq! », termine Tristan Ouimet-Savard.


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